10 Bons Sons US en mars 2023

Un mois de mars un peu particulier puisque nous fêtons ce mois ci l’inculpation de Donald Trump avec une trentaine de chefs d’accusation. On espère que ça puisse aller jusqu’au bout et en attendant, voici 10 Bons Sons anglophones pour festoyer avec frivolité, dix ans après la toute première édition (relire nos 10 Bons Sons US en mars 2013).

Kool Keith & Real Bad Man – Jungle Fever

A presque 60 ans, Kool Keith a la productivité d’un rookie. Il y a certes parfois du déchet, mais celui qui a commencé chez les Ultramagnetic MC’s parvient toujours à être pertinent comme en témoigne son dernier album avec le producteur Real Bad Man (souvent aperçu au côté de Boldy James). Sur un court sample vocal, Kool Keith déroule autour d’un lexique animalier, convoquant lions, pythons et éléphants et charriant par la même toute la nature pour ce qui se veut être un texte à la « National Geographic », soutenu par quelques bruitages venant renforcer l’ambiance. Un élément en entraîne un autre dans ce morceau consistant, bien tenu d’un bout à l’autre – Jérémy

JPEG Mafia & Danny Brown feat. redveil – Kingdom Hearts Key (prod. JPEG MAFIA)

Deux des rois de la bizarrerie se sont réunis pour un album commun très prometteur. La production de JPEG MAFIA flirte avec une cacophonie maîtrisée. Son sample de la chanteuse japonaise Maaya Sakamoto est aérien mais traité de manière brutale, mixé fort, parfois coupé brusquement. Les deux rappeurs, adeptes de productions casse-gueule s’en donnent à coeur joie sur ce terrain, dans un style totalement libre et avec des références parfois limites (on pense à cette phase sur Hunter Biden). Unique featuring de l’album, redveil apporte ici un style vocal différent avec sa voix cassée, sans toutefois trop dépareiller. On conseille cet album commun aux amateurs de sensations fortes. – Jérémy

Lord Apex – Stars In Their Eyes (prod. Drae Da Skimask)

Le Londonien a sorti un album en début du mois mars. Intitulé The Elevated and Elusive, le projet rassemble quinze morceaux enregistrés sur les cinq dernières années et tous produis par Drae Da Skimask. 15 petites tranches de vie, sur des instrumentales très soul et lofi, parfois drumless, qui colle si bien à l’univers et aux mots de Lord Apex. Sur le morceau qui nous intéresse ici, le natif de White City nous livre un morceau smooth et touchant sur lequel il évoque son parcours et le soutien de ses proches et de sa famille. Une jolie track qui ne devrait que vous faire écouter le reste du projet. – Clément

Hit-Boy x The Alchemist – Slipping Into Darkness

Quand deux des plus grands producteurs se rencontrent ça ne peut que faire des étincelles. Et c’est bien evidemment le cas de cette connection Hit-Boy et The Alchemist qui avec le morceau « Slipping Into Darkness » nous démontre une fois de plus leur talent à toute épreuve. En plus de faire deux excellentes prods, ces messieurs crachent également le feu et rappe chacun leur tour, sur l’instrumentale faite par l’autre. Une belle façon d’illuster l’adage qui dit qu’on est jamais mieux servi que par soit même. Et histoire d’enfoncer le clou, n’oublions pas que nos deux protagonistes sont fort d’une très grosse activité en 2023, avec un projet avec Larry June pour Alc et pour Hit-Boy, un solo : Surf or drown et un projet collaboratif avec Musiq Soulchild. Bref, deux grosses machines. – Clément

Tyler, The Creator ft. Vince Staples – STUNTMAN (prod. Tyler, The Creator & Pharrell Williams)

En ce 31 mars, l’excellent Call me if you get lost a eu le droit a sa réedition avec pas moins de 8 titres inédits. On y retrouve notamment ce morceau qui sent la poudre, une ambiance alarmiste rappelant de bons souvenirs à Vince Staples qui a déjà fait ses preuves sur ce genre de productions. L’instru évolutive rappelle d’abord les Neptunes (et oui, Pharell co-produit) avant d’aller vers quelque chose de plus guerrier grâce à sa sirène et ses lourds claviers. Un parfait terrain d’entente pour les deux rappeurs qui livrent des couplets survoltés avec un débit soutenu, le tout dans un esprit fédérateur : « Ni**** wanna join us ’cause they can’t beat us ». – Jérémy

Che Noir & Big Ghost Ltd. Feat. Ransom & 38 Spesh – Bad Apples

A peine une semaine après avoir produit entièrement un album pour Rome Streetz, Big Ghost Ltd a enchaîné avec Che Noir. La MC de Buffalo continue ainsi son bonhomme de chemin, en enchaînant les sorties plus que solides, avec cette fois un régiment d’invités pour l’accompagner sur les 9 titres de Noir or Never. En particulier, la connexion présente sur « Bad Apples » a particulièrement séduit nos oreilles d’auditeur averti. Ransom et 38 Spesh constituent ainsi des compagnons d’armes de choix pour l’hôte. Si l’on regrettera que le premier cité montrent à tout le monde qu’il est le meilleur rappeur du morceau après le premier couplet, les deux autres font plus que se défendre, et les trois s’éclatent sur une production martiale du gros fantôme, parfaite pour ce type de passe d’armes. – Xavier

Jae Skeese feat. Conway – Symmetry (Prod. Trizzy Williams)

Après un EP avec son patron (activité à ne pas reproduire chez vous, privilégiez plutôt une sortie en forêt pendant la saison de la chasse), Jae Skeese enchaîne avec un album qui se veut vraisemblablement être une première carte de visite sous la bannière Drumwork, le label de Conway, dont il est la nouvelle coqueluche. S’il avait d’autres sorties à son actif, Abolished Uncertainities est certainement la plus aboutie et la plus complète, le jeune bison de Buffalo faisant montre de toute sa palette et se livrant à l’introspection à plus d’une reprise. Sur « Symmetry », Trizzy Williams a la splendide idée de reprendre le célèbre « Make it easy on yourself » de Jerry Butler, maintes fois utilisé dans le rap, en y ajoutant des drums trap. Et les deux comparses font fi de leurs intérêts opposés dans les rapports de production, et embrassent un corporatisme que ne renierait sans doute pas Eric Zemmour. – Xavier

Estee Nack & Vdon – Devils can’t fool God

Alors qu’il semblait ne vouloir proposer sa nouvelle musique qu’en exclusivité sur son site serioussoundz, Vdon pourrait avoir changé son fusil d’épaule puisque BRAP (Born Rewards & Penalties) a fini par se retrouver sur les plateformes de streaming, tout comme Blue Notes 2 avec Willie the Kid qui devrait suivre prochainement (enfin). Sur BRAP, il accompagne l’un des nouveaux petits princes (malgré sa dégaine d’ancien) du boombap newyorkais Estee Nack, qui avait eu son moment de mise en lumière sur 10 de Westside Gunn. Sa voix rauque se marie parfaitement aux samples poisseux et aux lignes de batteries légères de Vdon. Malgré quelques invités intéressants, c’est un morceau solo avec « Devils can’t fool God » que nous choisissons de mettre en avant, pour sa prod très « vdonienne » et la parfaite alchimie décrite précédemment. – Xavier

A$ap Twelvyy & Roc Marciano – Adventure Time (Ran Van Dam, Lindsay Lucas, Dane Zone & ZEKE)

C’est sur une petite boucle jazzy qu’A$ap Twelvyy et Roc Marciano ont décidé de joindre leurs forces. Alors qu’un autre sample – de voix, celui-ci – surplombe l’ensemble et nécessite une attention particulière pour tout comprendre, on ne passe pas à côté de la référence à Tony Soprano exécutée par ce bon vieux Marci. L’ambiance est toutefois idéale pour vaquer à vos propres occupations telles que manifester (pacifiquement et légalement) ou regarder votre vie lentement vous échapper lors de l’exécution, cette fois-ci, d’un plaquage ventral républicain. – Wilhelm

Larry June & The Alchemist – Ocean Sounds

Entre les chaleurs soudaines, les retours du froid et les pluies diluviennes, difficile de garder quelque repère météorologique que ce soit. Soucieux d’une information claire et transparente, Larry June a passé quelques coups de fil et s’est associé à Alchimist pour réaliser un travail scientifique de premier ordre : annoncer l’arrivée du printemps 2023. Bien que la versatilité d’Alchemist ne fasse plus de doute pour personne depuis quelques décennies maintenant, on apprécie qu’il se mette entièrement au service de la direction artistique de Larry June plutôt que de l’entrainer dans ses domaines de prédilection. Épaulés par des pairs plutôt prestigieux, sûrement en vu d’une prépublication (sérieux oblige !), les deux compères nous livrent un excellent album. – Wilhelm

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