10 Bons Sons US en avril 2022

Ce mois-ci, nous apprenions la disparition à seulement 55 ans de DJ Kay Slay, véritable légende new-yorkaise du djing, du graffiti et plus globalement de la culture hip-hop. Merci pour tout « Mr. Smack Your Favorite DJ », repose en paix.

Pusha T – Brambleton (prod. Pharrell Williams)

Difficile d’extraire un titre de l’ogive que vient de nous délivrer Pusha T, alors pourquoi ne pas partir de la track 1 ? D’abord il y a cette association avec Pharrell qui restera toujours magique. La moitié des Neptunes lâche une production rétro-futuriste qui nous envoie directement dans l’espace, tout en plaçant sa voix çà et là, donnant un supplément de vie au morceau. Pusha donne l’impression de ne jamais appuyer sur l’accélérateur, le flow est posé, la diction pure. Une force tranquille. Tout cela met parfaitement en avant son écriture ciselée où pleuvent les jeux de sonorités, les références mêlant la culture des années 80-90 et les allusions à sa propre vie (il évoque notamment la mort de son pote Shampoo). On en reparlera dans les tops de fin d’année. – Jérémy

Knucks – Nice & Good feat. SL

On vous en parlait le mois dernier avec le très bon titre « Leon, The Professional » et on vous en reparle ce mois-ci avec « Nice & Good », en featuring avec SL. Il faut dire qu’en même temps, les trois premiers singles de son album Alpha Place à venir le 6 mai sont loin de faire rire les mouettes. La tracklist du projet non plus d’ailleurs, où l’on pourra retrouver Stormzy, Lex Amor ou encore Sainté. Le fleuron du rap UK en somme.
Revenons au morceau choisi ici, « Nice & Good », en featuring avec SL et sur une instrumentale produite par Knucks lui même. De la même manière que les deux précédents morceaux dévoilés, on retrouve un cuivre lancinant et aérien qui sied parfaitement aux deux emcees et à leur prose flegmatique. Fort est à parier que l’intégralité de l’album sera dans la couleur travaillée depuis quelques années par le rappeur londonien : un savant mélange de jazz, de grime, de drill et une élégance dont seuls les locaux de la ville surnommée The Old Smoke ont le secret. – Clément

Action Bronson – SubZero (prod. The Alchemist)

Il est là, il est de retour, notre amoureux des sandwichs et des plantes vertes ! Après deux années de silence et son album dédié à nos amis les dauphins, le rappeur du Queens refait surface avec le morceau « SubZero », premier single de son sixième album studio, intitulé Cocodrillo Turbo, sorti à la fin du mois d’avril. Vêtu d’un magnifique maillot des Knicks, Action Bronson ride totalement son dernier titre, au sens propre comme au sens figuré. Sur une instrumentale drumless (oui, encore) produite par l’illustre inconnu The Alchemist, Bronson nous démontre qu’il n’a pas perdu de sa superbe et possède toujours des références qui font mouche. Ici, mention spécial à l’une des meilleurs séries de tous les temps, j’ai nommé Les Soprano. – Clément

Billy Woods ft. Despot – Versailles (prod. DJ Preservation)

Pas à pas, Billy Woods s’est imposé comme l’un des rappeurs les plus obsédants de la scène indépendante. Sur « Versailles », il brille encore une fois par son écriture, entamant son morceau par un subtil parallèle entre traders et petits trafiquants, le concluant par une référence à l’Etranger de Camus. A ses côtés, un éternel espoir de la scène indé, qui ne manque lui aussi pas de talent : Despot. De sa voix haut perchée, il se pose en parfait complément, poursuivant lui aussi le thème du grand capital à sa manière. Avec sa production répétitive comme un cycle boursier, « Versailles » paraît d’abord difficile à aborder, pourtant plus on l’écoute plus on a envie de l’écouter. Du pur Billy Woods. – Jérémy

Ab-Soul – Hollandaise (prod. Kal Banx)

6 ans ont passé depuis la sortie de Do what thou wilt, album ô combien clivant mais qui aura sur se révéler au fil du temps. Le retour d’Ab-Soul a donc tout d’un évènement, et ce « Hollandaise » fait bien le travail. Il est bon de réentendre le grain de voix si particulier du rappeur de TDE et son flow énergique, parfois au bord de la rupture. Il aborde ici la perte de la foi, le temps de quelques mesures, et déroule d’improbables jeux de mots autour d’Abraham Lincoln et des œufs bénédictines (oui, oui). Alors oui, on pourrait attendre quelque chose d’encore plus poussé de la part d’Ab-Soul, mais nul doute que cela viendra. En attendant, ce morceau se pose comme une parfaite mise en bouche. – Jérémy

Gunplay feat. Ricco Barrino – Bucket List (Prod. J. Manifest)

Entre Pusha T et Gunplay, le mois d’avril a fait honneur au « coke rap ». Comme à son accoutumée, Gunplay livre avec ALL Bulshit Aside un album d’une amplitude qualitative très large, entre le très bon et le plutôt mauvais. L’album démarrait pourtant de bien belle manière, avec ce « Bucket List » et son appréciable touche de R&B/Neo-Soul avec Ricco Barrino. L’ambiance vocale, solennelle et lente de la production de J. Manifest est du plus bel effet, pour accompagner un texte plutôt personnel du protagoniste. – Xavier

Freddie Gibbs feat. Rick Ross – Ice Cream (Prod. Kenny Beats)

Avec cette nouvelle jeunesse donnée au légendaire « Ice Cream » de Raekwon, Freddie Gibbs et Rick Ross signent sans doute l’un des plus alléchants et des plus consistants blockbusters musicaux de ce premier semestre 2022. L’énergie cocaïnée de gangsta Gibbs semble contagieuse, tant Rick Ross, dernièrement plus à l’aise sur des ambiances smooth, retrouve le peps de sa fringante jeunesse. L’actualisation de la production mythique de RZA par Kenny Beats, ainsi que l’imagerie du clip sont également de grandes réussites. En définitive, on ne reprochera à cet hommage que sa durée très avare, ne faisant qu’à peine dépasser les 2 minutes. – Xavier

Tee Grizzley – Robbery Part. 3 (Prod. J.R. Rotem)

Nos lecteurs savent que le rap de Detroit occupe une place importante dans notre répertoire. Pour autant, si l’on est très friands de la violence brute et climatisée de la ville du Michigan, nous savons également apprécier sa version plus « policée » que l’on retrouve dans les disques de Tee Grizzley, celui-ci étant parvenu à porter la voix de la ville au-delà de ses frontières. Avec Half Tee Half Beast, l’ours des grands lacs signe probablement l’une de ses productions personnelles les plus abouties. Sur un album pratiquement dépourvu d’invités, Tee se montre plus introspectif et intime, tout en laissant la place à des morceaux plus bruts de décoffrage. Bonne synthèse de ces deux ambiances, « Robbery Part. 3 » reprend brillamment la série des « Robbery », storytelling plein de suspense sur le crime, la prison, et le crime en prison. – Xavier

Sha Hef & Tony Seltzer – Steppin

Nouvelle sortie du rappeur new-yorkais qui semble, depuis quelques années, s’épanouir sur des formats relativement courts et produits par une entité unique, ici Tony Seltzer. Les deux compères ne s’enquiquinent pas spécifiquement des étiquettes et, si les boucles sont à l’honneur tout au long de ces 30 minutes, les rythmiques vont du néo-boom bap aux sonorités plus modernes dans un tout cohérent. Sha Hef semble parfois en pilote automatique, mais le rythme de sortie plutôt sain et ses intrinsèques qualités de rappeurs le protègent très largement de la lassitude. – Wilhelm

Ransom feat Willie The Kid – Imperial Glaciers (prod. Nicholas Craven)

Des boucles de soul à perte de vue, une des écritures les plus soignées de cette chère musique, un flegme à toute épreuve et des placements férocement précis : pas de doute, nous sommes chez Ransom. No Rest For The Wicked nous présente un rappeur un peu plus personnel qu’à l’accoutumée, plus enclin à se livrer… pudiquement. En revanche, il est assez difficile d’extraire un seul morceau de cet l’excellent ensemble. Mais puisqu’il faut faire un choix, la présence de Willie The Kid et la splendide boucle concoctée par l’infatigable Nicholas Craven font pencher la balance en faveur d’« Imperial Glaciers ». – Wilhelm

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