Okis & Mani Deïz, la crème de la crème des bromances

Cela ne fait pas si longtemps que le nom d’Okis est apparu sur les radars des médias rap. Et pourtant en très peu de temps le rappeur de Lyon a su imposer son style. Un style qui pourrait paraître tout à fait basique dans la plus pure veine du boom-bap classique à la française, mais c’est là qu’est la force d’Okis, il se rend très vite identifiable au milieu de la masse, que ça soit par son flow, ses références ou bien sur, son argot lyonnais. Sa rencontre avec Mani Deïz, producteur extrêmement talentueux et superstar de cette même scène boom-bap indé, a évidemment joué pour Okis. Autant au niveau de la lumière que ça a pu lui apporter que sur la construction de son style.

Comme le rappeur l’a déjà raconté, la rencontre avec Mani Deïz vient d’un coup de fil du producteur au rappeur qui sur le coup n’en croit pas ses oreilles. Pour qui a grandi en écoutant du rap dans la période du renouveau de cette scène boom-bap au début des années 2010, on peut comprendre l’effet que peut avoir un appel de Mani. D’ailleurs on (sous la plume de Xavier) l’avait interviewé il y a plus de 10 piges déjà. Bref, la rencontre a lieu et donne naissance à leur premier album en commun Rêve d’un rouilleur sortie en novembre 2023 (qu’on a chroniqué ici). Un premier essai largement transformé, où Okis invite Limsa d’Aulnay et Casus Belli, caution 6-9 oblige, et où il installe déjà ce qui caractérise son style si particulier, beaucoup de mulitsyllabique mais avec des placements très originaux, un flow plutôt nonchalant mais qui laisse très peu de place aux silences. Okis a des choses à dire et il utilise chaque temps pour placer ses mots. Il parle de sa ville de Lyon, des ses influences et orientations politiques qui ne doivent pas être facile à défendre tous les jours dans sa ville et bien sur de foot, un thème récurrent, lui qui a failli être journaliste sportif.

Après cette première réussite, ce qu’on peut appeler désormais un duo, va continuer à travailler des sons ensemble. Okis lui, grâce à sa notoriété grandissante va apparaître en featuring sur tout un tas de projets d’excellentes qualité, de Sameer Ahmad à Eloquence, de la compil’ des suisses de Grand Bazaar à Costa. Et puis un an et demi après Rêve d’un Rouilleur, le duo sort La Crème en mars dernier. Le format est plus petit, seulement huit titres, pense-t-on à l’époque, où Okis invite des rappeurs de Lyon comme lui (c’est sa bio officielle sur Genius, rappeur de Lyon). On retrouve Tedax Max et ses deux gars sûrs municipaux, du nom de son label, Matox et Rowtag. Toujours composé comme une ode à sa ville, tout en gardant un esprit très critique et hyper réaliste comme sur le morceau « On rôde, on ride ».

« À peine rentrés, on salit les carreaux, Trois gones qui rappent leurs racines dans un étalo gris, dans un état lowkey raciste ».

Ce qui saute aux oreilles sur ce deuxième projet, c’est vraiment comment l’alchimie a l’air naturelle entre Okis et Mani, et on a vraiment l’impression qu’Okis a trouvé le meilleur écrin possible pour ses paroles dans les instrumentales de Mani. Le beatmaker du 91 qui s’est aussi adapté au rappeur du 69, très bavard, pour que ses prods soient marquantes, tout en laissant la place et le temps à l’auditeur de capter toutes les subtilités de celles-ci.

Le plus petit format de La Crème prend tout son sens quand les deux acolytes annoncent la sortie du projet Double Crème. A peine trois mois après leur dernière sortie ils reviennent, sur huit titres, toujours deux featurings et non des moindres avec JeanJass (qui est décidément partout), et Gen qu’on pourrait rapprocher d’Okis sur ce côté nouvelle scène du rap indé. Déjà le troisième projet en entière collaboration Okis/Mani et on pourrait commencer à croire que la formule va s’essouffler, qu’Okis va avoir moins de choses à dire et Mani Deïz moins d’inspiration, rassurez-vous il n’en est rien. Tant qu’il restera d’obscurs joueurs ou entraîneurs de foot à citer, des gros racelards à dénoncer, une société à critiquer, la ville de Lyon à dépeindre, Okis aura des choses à raconter. Autant vous dire qu’avec ces thèmes là, l’inspiration d’Okis est infini.

« Vodka à la pelle, un verre a la SACEM, Arnault a mille fois plus de thunes que Louis XVI et il a sa tête. Fais doux, y sait, mais j’crois trikar qu’on m’pisse dessus, trois-quatre Ricard sans prise de tête, y a pas d’brigade sans fils de pute ».

Est-ce que l’impact sera le même si Okis ne raconte plus tout ça sur des prods de Mani Deïz ? Est-ce que Mani Deïz trouvera toujours la flamme pour envoyer des instrumentales de qualité aussi régulièrement ? Est-ce que Lyon va vraiment descendre en ligue 2 ? Autant de questions sans réponse qui joueront certainement sur l’avenir d’Okis, ce qui est sûr c’est qu’on attend déjà avec impatience, la prochaine cerise sur cette crème.

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