2022 : l’année rap US en 10 albums

2022 fut une année ou nous avons pu reprendre notre souffle (s/o Jean-Luc) après une longue pandémie dont on ne voyait plus trop le bout. Pas trop longtemps non plus au vu de la quantité astronomique des projets qualitatifs sortis cette année. Contrairement à l’année dernière ce ne sont pas 10 artistes qui ont retenu notre attention mais bel et bien 10 albums.

Mehyem Lauren & Daringer – Black Vladimir

Aux côtés de l’excellent Daringer, Mehyem Lauren commet là l’un des meilleurs albums MC/Beatmaker de l’année. Le son Griselda lui sied tout aussi bien qu’aux rappeurs de la maison, et peut être même plus que celui des beatmakers avec qui il a souvent collaboré (Harry Fraud, DJ Muggs). Les productions de Daringer se basent souvent sur peu d’éléments: des samples courts, minimalistes sans être lassants, et finalement rapidement obsédants, qui permettent à Mehyem de mettre en valeur son écriture très technique, bourrée de rimes internes, et son sens du refrain rentre-dedans. L’esthétique globale est d’une grande cohérence. Sentiment d’urgence (l’aspect grinçant, quasi-horrorifique des samples jouant là un grand rôle), crasse d’un bitume foulé par les pires crapules, les deux hommes créent une ambiance de menace perpétuelle qui rend l’ensemble captivant, et ce dès Black Pinot, une introduction hyper-efficace sur laquelle on retrouve Action Bronson. Plusieurs gros enchaînements nous frappent ensuite, à l’instar de celui de Conflict Resolution et de Red Pesto, deux des meilleurs titres de Black Vladimir. Si l’ensemble fonctionne aussi bien, c’est grâce à la constance de l’effort fourni par les deux hommes qui parviennent à livrer un projet contenant bien peu de temps morts. On connaît Mehyem Lauren comme un très bon MC, mais il n’a pas toujours sorti des projets à la hauteur de son talent, par manque d’écrémage ou d’une identité vraiment propre. Avec Black Vladimir, il sort là ce qui est sans doute son meilleur album en date. Rien de révolutionnaire (on ne peut pas avoir 10 projets révolutionnaires par an), mais on est là sur du boom-bap terriblement bien exécuté, ce qui en fait un des essentiels de l’année. Une collaboration qu’on demande à revoir. – Jérémy

Greentea Peng – Greenzone 108

Greentea Peng est une artiste du sud de Londres qui depuis ses débuts, expérimente toutes sortes de choses. Avec un style très hybride, l’artiste aux multiples casquettes (chanteuse, rappeuse, auteur et interprète) oscille entre plusieurs influences musicales : le R&B, le reggae ou encore le hip-hop mais à une seule et unique sauce : le psychédélique.  Depuis ses débuts en 2018 avec son premier EP Sensi , elle s’expérimente également à la néo-soul avec une approche unique et au combien originale. En septembre dernier, elle sort la mixtape Greenzone 108 qui va cumuler des millions d’écoutes et régaler nos tympans. La mixtape (allez savoir pourquoi ce n’est pas un album) est composée de morceaux groovy, de productions éthérés aux guitares électriques tourbillonnantes, mais aussi de véritables expérimentations fructueuses : la présence d’une fanfare sur « Stuck in the middle », une rythmique très ska sur « Three Eyes Open » ou encore la ballade très très chill « Top Steppa » qui se ponctue par une guitare très rock’n’roll. Avec cet opus, Greentea Peng nous dévoile sa progression musicale mais aussi textuelle. Elle a gardé les sonorités psychédéliques autrefois explorées pour y greffer de nouvelles influences qui donnent une énergie supplémentaire. Très inspirant et inspiré, Greenzone 108 est définitivement un des albums de l’année 2022. – Clément

Conway The Machine – God Don’t Make Mistakes

Il n’aura pas fallu moins de 5 années à Conway et Shady pour concrétiser le contrat qui les lie dans un album humblement intitulé God Don’t Make Mistakes. Depuis la signature, Griselda s’est largement installé, passant de chouchou des rappeurs new-yorkais d’un certain âge à troupe la plus connue des inconnus – la Scred Connexion américaine finalement. Depuis 2017, Conway a sorti plus de 15 disques, collaboratifs ou non. Et, malgré quelques explorations çà et là, la forme n’a jamais été terriblement bouleversée, le fond encore moins. Difficile pour nous de lui en tenir rigueur, tant nous avons mentionné son travail dans nos colonnes mensuelles, mais une lassitude se justifierait aisément. Conway le sait sûrement, Shady Records aussi. Ils ne se priveront pas d’en jouer avec deux singles aussi archétypaux qu’efficaces en amont du disque puis une introduction poisseuse dans laquelle la présence de la voix toujours plus usée de Beanie Sigel installe les habitués dans un rocking-chair douillet, entre un cadavre au sang tiède et une gazinière qui ne revendique pas la certification HACCP. Immédiatement après, on découvre une production grandiloquente où l’horizon change un peu : Conway commence à s’ouvrir. Ses invités Lil Wayne et Rick Ross, eux, marchent sur l’eau en chausson, mais notre Machine préférée se distingue par le côté sincère et écorché vif qui s’aperçoivent dans son couplet. Le disque sera un plongeon tête en avant dans cette direction et on ne l’aura jamais entendu aussi transparent que dans « Stressed » ou « God Don’t Make Mistakes » ; pas même dans le désormais légendaire « The Cow ». On ne découvre pas le côté émotif du natif de Buffalo, on n’est même pas surpris qu’il soit traumatisé ; ce qu’on attendait moins, c’est qu’il nous le dise aussi frontalement et pas simplement au détour d’une phrase. Peut-être que c’est paradoxal d’un point de vue marketing, mais ce premier album en major semble avoir été fait par Demond Price pour Demond Price avant toute autre considération. – Wilhelm

Pusha T – It’s Almost Dry

Maintes fois annoncé, maintes fois repoussé, il aura finalement fallu attendre 7 ans à partir de King Push : Darkest before dawn pour revoir le MC virginien sur un long format, avec l’entremets de luxe qu’avaient constitué les 7 titres de Daytona, sorti en 2018. D’une durée finalement plutôt courte (35 minutes), It’s Almost Dry s’inscrit dans la parfaite continuité du EP qui avait remis l’ancienne moitié des Clipse sur le devant de la scène il y a de cela 4 ans. Si Kanye West était aux manettes de l’intégralité du précédent opus, il est cette fois accompagné de Pharrell. Un retour aux sources pour Push, les Neptunes ayant été les producteurs attitrés de Clipse vers le milieu des années 2000. Et malgré tout le mal que l’on pense du premier cité, force est de constater que cette association est parvenue à bâtir une architecture sonore puissante, épurée et élégante, idoine pour le ton lent, agressif et sentencieux du roi du Coke Rap. Car oui, il est très souvent question de cocaïne dans It’s Almost Dry, comme le titre pouvait le laisser entendre, à tel point que cela donne parfois une impression de fan service. En cela la durée réduite du disque permet de ne s’ennuyer à aucun moment, évitant l’overdose. Mais si Terrence Thornton brille dans un domaine, c’est dans la constance. Qu’importe l’atmosphère, King Push ne faiblit pas une seule seconde, maintient toujours l’auditeur sous pression comme peu savent le faire, que ce soit par la qualité de l’écriture ou par le magnétisme de son interprétation. Ces nombreuses qualités font de It’s Almost Dry un album proche de la perfection dans la mesure où tout est à sa place et rien n’aurait dû être fait différemment. Une qualité rare par les temps qui courent, qui montre l’importance de laisser vivre une discographie plutôt que d’adopter une productivité frénétique. – Xavier  

Boldy James & Nicholas Craven – Fair Exchange No Robbery

Ce que réalise Boldy James depuis la sortie de The Price of Tea in China est tout à fait exceptionnel. Les superlatifs ne manquent pas lorsqu’il est question de rap sur internet mais cette fois, c’est le mot approprié. En trois ans et dix albums, on ne dénombre pas le moindre faux pas et il est important de noter que ce run s’inscrit dans les grands de cette musique. Assez tôt en 2022, Nicholas Craven décide d’inviter le rappeur le plus flegmatique de Détroit pour le troisième opus des « Craven N ». Il le reçoit sur une jolie boucle sans drums, les deux sont donc à leur aise, et le courant doit plutôt bien passer puisque le producteur canadien se met alors en tête de réaliser un long format avec son invité. Son seul objectif est de se satisfaire, lui, en tant que fan. De faire l’album qu’il voudrait écouter, en somme. De l’autre côté de la frontière, on tire sur des tornades et il ne fait aucun doute que Bo Jack préfère les collaborations sur des albums entiers plutôt que d’aller piocher un peu partout, et n’a aucune envie de ralentir le rythme. Les boucles de soul et de jazz vont donc en pagaille, les samples de voix entêtants pleuvent et Boldy crache le feu. Encore et toujours. Mais entre Real Bad Man, Futurewave et Cun, Craven a du jouer des coudes pour que Fair Exchange No Robbery se hisse dans notre sélection plutôt que ses concurrents. Il aura fallu attendre le coup de sifflet final et la splendide production de « Power Nap » pour que notre choix s’impose comme une évidence. Wilhelm

Ab-Soul – Herbert

L’attente a été longue après Do what thou wilt, un album parfois opaque et pas toujours bien compris mais dont la démarche était salutaire. Mais voilà, Ab-Soul est de retour 6 ans plus tard avec un nouvel album poussé par de très bons singles comme « Hollandaise » ou le touchant « Do Better ». Le rappeur y met quelque peu de côté son côté encyclopédique et foutraque pour se laisser aller à de nombreux instants intimes, voir très intimes, sa récente tentative de suicide étant évoquée. Il n’occulte cependant pas son côté plus humoristique en poussant encore plus loin son goût de la boutade et du jeu de mots, un aspect qui ne lui réussit pas constamment mais qui fait partie du personnage. De manière générale, l’écriture de Soul n’est pas toujours constante mais c’est aussi ce qui fait son charme tant son esprit semble virer de tunnel en tunnel. Une versatilité qui se reflète dans le choix des productions. Ab-Soul est à l’aise de partout et fait preuve d’une grande liberté dans ses flows et dans l’utilisation de sa voix qu’il n’hésite pas à étirer dans tous les sens. En résulte quelques grandes réussites comme « Message in a bottle », « Good man » ou « Gotta rap » qui font partie des meilleurs titres de l’album et qui contrebalancent le peu de morceaux qui nous laissent un peu plus circonspects comme « Go off ». Herbert est un album qui ressemble à son auteur de par sa variété et qui parvient à trouver un équilibre entre les moments sombres et cette perpétuelle envie d’aller mieux, de bonifier son quotidien. Ab-Soul cherche à extraire le bonheur du malheur et parvient, après les excès du précédent album, à trouver son alchimie interne. – Jérémy

Westside Boogie – More Black Superheroes

Après le gros succès d’estime connu par Everythings for sale, Westside Boogie était attendu au tournant. L’artiste de Shady Records revient avec un album qui, sans être conceptuel, suit un fil thématique assez subtil. On y parle de puiser ses forces dans ses faiblesses et de tomber le masque. D’arrêter de jouer les super-héros en cachant ses failles et ses défauts, car il n’y a rien de pire que de voir son coeur se transformer en pierre, comme lâché dans le premier couplet de « Stuck ». Westside Boogie veut être un héros du quotidien en s’acceptant pleinement. L’album prend parfois la forme d’une thérapie personnelle, Westside Boogie nous confiant régulièrement ses propres défauts (à l’image du refrain de « Can’t even lie »), mais cette thérapie, comme l’indique le titre de l’album, ne se limite pas à celle du protagoniste principal mais a pour vocation d’être celle de toute une communauté, bloquée selon Boogie dans des postures artificielles qui font parfois plus de mal que de bien. La douceur des productions et le côté mi-chantonné mi-traînard du ton adopté donnent à l’ensemble un aspect bienveillant. Westside Boogie est par ailleurs très doué pour transmettre les émotions dans son interprétation et il en est de même pour les invités. La voix angélique de Mamii apporte d’ailleurs beaucoup à deux reprises. More black superheroes est un travail de démélage. Il s’agit là de séparer le bon grai de l’ivraie et de travailler sur ses contradictions, tout en sachant qu’on ne pourra jamais totalement les effacer. Le refrain évolutif de « Contradictions », titre présent sur la réedition de l’album, en dit long sur le sujet : « You know you’re a contradiction, It’s time to admit It. » – Jérémy

Kendrick Lamar – Mr. Morale & The Big Steppers

S’il y a bien un album à côté duquel on ne pouvait pas passer, c’est bien celui de Kendrick Lamar. Des années qu’on attendait un nouvel opus du rappeur californien, 5 ans pour être plus précis, jusqu’au 13 mai 2022, date à laquelle Mr. Morale & The Big Steppers sort. En premier lieu, on observe la cover, où il se met en scène avec sa femme et ses enfants, portant une couronne d’épines et affublé d’un gun dans le futal. On va dire que le ton est donné. Divisé en deux parties de neufs tracks chacune, Mr. Morale & The Big Steppers est en quelque sorte le journal de bord des 5 dernières années du MC de Compton. Le rappeur de 35 ans nous invite dans son intimité et nous dévoile ses pensées les plus profondes sur son statut de père de famille, d’époux, sur l’amour, la perte, mais aussi sur certains de ses fantômes du passé (la relation avec son paternel), de ses traumatismes jusqu’à ses addictions. Côté instru’, Kendrick a opté pour des productions aux couleurs très soul, jazz et gospel. Bien entendu, il y a quelques morceaux qui sonnent beaucoup plus modernes, mais la direction artistique prise par Kendrick semble claire : ne plus se cantonner à faire des gros bangers intergénérationnels, mais bel et bien des morceaux intemporels, à l’essence unique et ô combien personnelle. Il aura fallu 5 albums à Kendrick Lamar pour livrer un projet qui dévoile un peu plus sa mélancolie et qui le rend un peu plus humain, un peu plus comme tout le monde, bien qu’il soit une icône connue et reconnue. – Clément

Freddie Gibbs – $oul $old $eparately

Stream Freddie Gibbs' New Album '$oul $old $eparately' Bonus Edition |  Complex

Si Freddie Gibbs voulait nous prouver qu’il fait partie des MC’s les plus doués du XXème siècle, il ne se serait pas pris autrement qu’avec cet album. Ayant, tout au long de sa carrière, fait montre de sa virtuosité lorsqu’il s’agit non seulement de varier les registres, mais aussi (et surtout) de s’en tenir à un seul avec l’exigence que requière un long-format (en attestent ses albums avec Madlib ou The Alchemist), le rappeur de Gary est revenu cette fois avec un format plus classique. Ainsi, le dernier disque estampillé Gangsta Gibbs entrant en résonnance avec ce $oul $old $eparately est sans doute Shadow of a Doubt, daté tout de même de 2015. Celui qui se fait désormais appeler Big Boss Rabbit renoue donc avec un album porté par une variété éclectique de producteurs (Jake One, Justice League, l’inénarrable alchimiste ou encore Kaytranada pour ne citer qu’eux), mais ne met pas pour autant de côté l’idée d’ensemble unifié. Si cette fois l’album n’est que peu homogène dans sa musicalité, il l’est dans la narration, étant porté par le thème du jeu d’argent, puisque le titre renvoie à $$$, un casino fictif servant de cadre et de ligne directrice aux 15 titres que comporte l’album. En plus des qualités techniques lui permettant de dresser à peu près n’importe quelle sonorité, Gibbs fait ainsi montre de son talent de storyteller et de son humour potache, le tout en étant entouré d’une palanquée d’invités allant de Scarface à Anderson.Paak, en passant surtout par Rick Ross sur « Lobster Omelette », pendant classieux du remake version banger de « Ice Cream », sorti quelques semaines avant l’album sur lequel il n’apparaît finalement pas. Pour toutes ces raisons, $oul $old $eparately pourrait finalement devenir l’album le plus emblématique du MC de l’Indiana, tant il rassemble au mieux l’ensemble de ses marques de fabrique. Et de porter encore plus haut l’une des discographies les plus riches de la dernière décennie. – Xavier

Knowledge the Pirate & Big Ghost Ltd – Wolves don’t eat with Shepherd’s

Wolves Don't Eat With Shepherd's by Knowledge the Pirate & Big Ghost Ltd on  Apple Music

Notre gros fantôme favori aura encore été l’un des principaux protagonistes d’une année extrêmement riche pour l’underground. Le beatmaker dont personne ne connaît le visage a une fois de plus enchaîné les sorties, tantôt en mettant la lumière sur d’obscurs manieurs de mots (Milano Constantine, Jae Skeese ou encore Mickey Diamond), tantôt en s’associant à des noms plus établis. Ce fut en particulier le cas pour Conway, avec lequel il a ajouté un troisième album à leur collection commune avec What has been blessed cannot be cursed, puis dans une moindre mesure avec Knowledge the Pirate, avec ce Wolves don’t eat with Shepherds. Si ce dernier n’a pas l’aura d’un Conway, il ne sort pour autant pas de nulle part, fort d’une discographie très consistante et d’une filiation plus ou moins étroite à Roc Marciano, qui est de toute évidence une influence importante pour lui. Aux côtés du pirate, les boucles fabuleuses de Big Ghost s’obscurcissent et deviennent avares en mélodie, tandis que ses beats ralentissent, jusqu’à disparaître comme sur « Young N Dumb ». La symbiose avec la voix nasillarde du rappeur se fait en douceur et paraît naturelle au bout de quelques titres. Et si celui-ci n’a pas les talents de conteurs de son aîné, il brille justement d’autant plus lorsque l’atmosphère descend dans les catacombes, comme sur « The Tombs », probablement le sommet du disque, se montrant ainsi à l’aise tant sur le beatless que sur des instrumentales plus rythmées. En définitive, ce sont quelques menues adaptations qui aurait été nécessaires à chacun des protagonistes pour faire de ces 12 titres un album complet et cohérent, ce qui rend l’association d’autant plus digne d’intérêt, et en fait une pierre majeure de l’underground de 2022. – Xavier

Ils auraient pu figurer dans notre bilan :

Rome streetz – Kiss the Ring / Nas – King’s Disease III / Roc Marciano & The Alchemist – Elephant Man’s Bones / JID – The Forever Story / Sza – SOS / Little Simz – No Thank You / Smino – Luv 4 Rent / Denzel Curry – Melt My Eyez See Your Future / Vince Staples – Ramona Park Broke My Heart / Ka – Languish arts / Lloyds Banks – The course of the inevitable 2 / French Montana & Harry fraud – Montega / Black Star – No Fear of Time / Billy Woods – Aethiopes / Black Thought & Danger Mouse – Cheat Codes / Mickey Diamond – No Liquor Before 12 / Dark Lo & Don Gunna – The Graveyard / Icewear Vezzo – Rich Off Pints 3

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