10 Bons Sons en décembre 2022

En 2022, et comme les années précédentes, le mois de décembre fut le théâtre de sorties de qualité, parfois éclipsées par les bilans de fin d’année. Jugez plutôt.

Le 16 décembre : Ol’Kainry, Kamnouze & Horseck – « Ball-Trap » (prod. Misère Record)

Sixième extrait de la compilation Deadline à paraître ce mois-ci et intégralement produite par le beatmaker Misère Prod, « Ball-Trap » réunit un casting qui rendra nostalgique les amateurs de la grande époque du label Nouvelle Donne. Si le titre est une référence au premier morceau d’Ärsenik paru en 1995, il ne clame pas non plus que les valeurs du rap se sont perdues, ou que le genre se portait mieux avant. Il s’agit ici davantage d’une ode à la culture et à ses passeurs (avec une mention pour le couplet de Kamnouze), sur laquelle les trois rimeurs font également étalage de leur expérience derrière la plume et le microphone. Comme le disait déjà si bien Rocca en 1996, et parce qu’on est tous le vieux (ou le jeune) de quelqu’un, « Old school, new school, là n’est pas la question. » – Olivier

Le 26 décembre : Zeu – « Haaland » (prod. Epektase)

Cette année sous le sapin, on pouvait trouver une nouvelle boucherie signée Zeu. L’ancien MC du Panama Bende nous livre ici un morceau très sombre, à l’instrumentale poussiéreuse et ô combien nébuleuse. Pas de refrain, juste du kickage intensif et deux petits 16 mesures pour mettre les points sur les i et nous filer l’eau à la bouche pour la suite. Le troisième opus de sa série Trash Talking est annoncé pour 2023. Vivement. – Clément

Le 29 décembre : Jarod – « Termine 2022 » (prod. Lewnwv)

« Tu connais les bails ma gueule. » Comme toutes les fins décembre depuis dix ans, Jarod délivre une démonstration de rap sur une instru évolutive, lui permettant de briller dans différents styles. Entre 2012 et aujourd’hui les sonorités ont eu le temps d’évoluer, et Jarod s’est appliqué à s’y essayer, année après année. Dans cette série, « Termine 2022 » est un bon cru, tant le débit, les flows, et l’énergie mise dans le track donnent l’impression que le temps n’a pas d’emprise sur le Caméléon. Les traditions, ça a parfois du bon. – Olivier

Le 21 décembre : Nessbeal – « Mourir à Casa » (prod. Highcell)

Le Maroc aura décidément fait l’actualité en ce mois de décembre 2022. Après son parcours historique plein de panache en coupe du monde, Nessbeal nous balance depuis Casablanca l’hymne de la capitale économique du royaume chérifien. Avec sa verve habituelle (écouter notre podcast spécial Nessbeal ici), NE2S met en musique la froide réalité de Casanegra, avec toujours autant de darija (langue du quotidien au Maroc) dans le texte. Si on a en tête les images folles furieuses du derby Raja / WAC, Nabil Selhy nous rappelle que la vie est sauvage en dehors des gradins du stade Mohamed V. Le bougre vivant à présent au bled, on ne serait pas contre une connexion avec la dynamique scène locale (on leur donne même le titre de la collab, Maroc United). – Chafik

Le 15 décembre : Niro – « Papa fait le pitre » (prod. Osiris)

Le 28 octobre dernier, Niro se produisait sur la scène du Zénith de Paris. Cet évènement était considéré par beaucoup comme l’apogée de sa carrière. Le Blésois profita de l’occasion pour annoncer la parution d’un nouvel album avant fin 2022. Cependant, la sortie de Taulier a pris un peu de retard puisque l’artiste souhaite y ajouter quelques featurings et produire un bon nombre de clips. Pour nous faire patienter, il est désormais possible d’écouter le splendide morceau « Papa fait le pitre » enregistré récemment chez Colors. Avec ce titre produit par Osiris, Niro éclabousse le game de son talent et fait preuve de créativité tout en continuant à suivre sa ligne directrice. Éblouissant. – Jordi

Le 28 décembre : Char – « Comme si de rien n’était » (prod. Mani Deïz)

En cette fin de mois de décembre, Char a eu la remarquable idée de déposer ce cadeau quelque peu inattendu au pied du sapin. Le pilier du collectif Le Gouffre, au même titre que ses acolytes, était resté tapi dans l’ombre depuis de longs mois. Il revient pour notre plus grand bonheur avec un nouvel EP prévu début 2023 et portant le nom de Comme si de rien n’était. Pour annoncer cette excellente nouvelle, il a choisi de dévoiler le magnifique clip du morceau éponyme. Mis en musique par Mani Deïz, lui aussi de retour ce mois-ci avec son album instrumental The symphony of Dr Olson, et mis en image par L’Indis, ce titre se veut de très bonne augure quant à la qualité du futur opus. Le rendez-vous est fixé au 3 février. – Jordi

Le 2 décembre : Aketo ft. Limsa d’Aulnay – « Régal » (prod. RicoGotThatFye)

La deuxième partie de carrière d’Aketo nous offre de beaux moments de bravoure. L’ancien rappeur de Sniper a pris de l’âge et se fait plaisir avec un rap plus décomplexé. Comme annoncé dans le refrain, le projet de vie c’est de se régaler, de foutre sa vie en l’air juste pour rire. Aketo pose des couplets autotunés au feeling, privilégiant l’instinct et les sonorités à tout le reste (« C’est comme ça le peura, c’est que des vibes« ). A ses côtés, le faux-rookie le plus cool du game : Limsa d’Aulnay, qui vient poser un couplet au débit lent et aux intonations lourdes avec des images qui font sourire. En bref, voilà un morceau 100% attitude qui fonctionne bien et qui permet une bonne pause dans un EP comprenant aussi plusieurs titres plus sérieux. – Jérémy

Le 15 décembre : Norsacce Berlusconi – « Dynastie intro » (prod. Congo Bill, Lewis Amber, Yaku, Le Marabout & D- Way Beatz)

A l’image d’un Meek Mill, Norsacce Berlusconi devient un spécialiste des intros qui tabassent. Celle de Marathon avait eu son impact, celle de Propaganda est tout aussi puissante. Le ton est enragé, les fins de lignes tombent brutalement, tantôt sur les caisses claires, tantôt sur les kicks. Le tout est délivré sur une production aux grosses sub-bass et avec des samples aériens qui se succèdent en arrière-plan. Le ton est sec et direct, Norsacce ne passe pas par quatre chemins pour dire ce qu’il a à dire, alternant entre individualisme et esprit d’équipe. Une petite référence aux stakhanovisme vient donner le ton pour l’ensemble de l’album. Propaganda. – Jérémy

Le 2 décembre : Seär Lui-Même – « Mr. Armand » (prod. Julien Nicolas)

Sans chercher à l’excuser, Seär Lui-Même s’efforce, au travers d’un storytelling (exercice dans lequel il excelle), d’analyser les mécanismes qui ont pu pousser Monsieur Armand, qu’on imagine octogénaire, à plonger au fil des années dans une xénophobie crasse et profonde. Mais il ne s’arrête pas là, puisque le refrain interpelle également le jeune adulte aux mêmes idées, potentiel auditeur de rap : « Mais toi tu es nostalgique de ce temps que t’as pas connu. (…) Dis-moi à vingt ans, de qui tu te défends ? » Une prise de hauteur maligne et efficace, pour un discours qu’il est bon d’entendre en 2022 (et même en 2023), un rappel utile à ceux qui penseraient que le rap est compatible avec les idées d’extrême droite. « Mr Armand » est extrait du nouvel album de Seär, Coupable, paru le 2 décembre dernier. – Olivier

Le 2 décembre : Scylla feat. Furax Barbarossa – « Comme si c’était la première fois » (prod. Kendo)

« J’voulais dire » (Comme un aimant, 2001) est un morceau majeur de la discographie d’Akhenaton. Son entrée, « A ceux qui m’appellent enculé j’voulais dire, qu’la première fois où ma main a pris un mic j’voulais rire« , a même été reprise ou détournée par quelques illustres noms du rap français au fil du temps tels que Nakk ou Aketo. En 2022, ce sont Scylla et Furax Barbarossa qui s’y sont collés sur « Comme si c’était le premier », leur morceau commun sur l’album ETERNEL du rappeur bruxellois, un track à ajouter à la longue liste de leurs titres communs. Ils y énumèrent habilement toute une série de premières fois, Furax profitant de l’occasion pour délivrer un couplet introspectif de haute volée, dans la continuité de ce qu’il a pu dévoiler sur son album Caravelle. Et qui apparait en featuring sur « Inclinaisons », le morceau qui fait suite « Comme si c’était le premier » sur le nouvel opus de Scylla ? Monsieur Akhenaton en personne, pour le seul autre feat rap de l’album. La classe. – Olivier

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