Le mois de february a débuté sur les chapeaux de roues avec la pantalonnade de cérémonie des Oscars, et s’est terminé beaucoup plus sombrement avec le décès, plus précisément le meurtre, du rappeur newyorkais Pop Smoke. La liste des rappeurs abattus continue inexorablement de s’allonger… Bref, nous allons tâcher de vous divertir avec cette nouvelle édition des 10 Bons Sons outre-Atlantique.
Denzel Curry & Kenny Beats – Unlocked
En voilà une belle surprise. Après le succès de son dernier album Zuu (qu’on a par ailleurs placé dans notre bilan 2019), Denzel Curry lâche un EP surprise avec l’ami Kenny. Tout a commencé en 2019 quand Denzel Curry et Kenny se rencontrent pour l’émission concept The Cave de ce dernier, où il invite un rappeur et lui fait une instru’ aux petits oignons. Un an après donc, les deux acolytes se sont bien trouvés et le résultat à la clef se trouve être un EP 8 titres, accompagné d’une vidéo assez comique d’une vingtaine de minutes mêlant dessins animés, cartoons et prises de vue réelles. – Clément
CJ Fly – Grew Up ft. Haile Supreme (Prod. Statik Selektah)
Début septembre 2019 sortait « Rudebwoy », extrait du second album du bon vieux membre de Pro Era, CJ Fly. Prévu pour le 6 mars prochain et annoncé bizarrement comme son « debut album » (on n’oublie pas le très critiquable Flytrap sorti en 2016), le projet sera entièrement produit par Statik Selektah, et accompagné bien entendu par l’inévitable Joey Bada$$ (qui nous a prouvé récemment qu’il rappait encore). Véritable hommage à la Jamaïque, le rappeur s’est entouré de Haile Supreme sur plusieurs morceaux et a bien entendu invité quelques uns de ses bougs sûrs (Kirk Knight, Chuck Strangers, l’inévitable Conway The Machine ou encore Nyck Caution) pour parfaire le tout. Plusieurs morceaux sont déjà disponibles, il n’y a plus qu’à attendre la date fatidique pour l’ensemble du projet. – Clément
Reason – Show Stop (Prod. The 90’s & !llmind)
On vous parlait en novembre dernier de Reason, l’équivalent de C-17 si le Dr. Géro était Kendrick Lamar. Toujours pour annoncer son deuxième album solo intitulé New Beginnings, le rappeur de Carson dévoile le morceau « Show Stop », banger lancinant à la mélodie entêtante. On retrouve un certain !llmind à la production (même si c’est une collaboration avec The 90’s), ce bon vieux Dr. Géro aux adlibs et donc Reason, plus nonchalant que jamais. Une recette un poil surannée mais qui malgré tout fonctionne encore. – Clément
Aminé – Shimmy (Prod. Pasqué, Maneesh, Vinylz & 1da)
Après un break d’un peu plus an et demi, Aminé marque son grand retour. Auréolé du succès de son dernier album ONEPOINTFIVE (sorti en 2018), le rappeur préféré de Dame D.O.L.L.A. nous a dévoilé le morceau « Shimmy », produit par pléthore d’excellents producteurs : Pasqué (derrière la plupart des productions « acides » d’Aminé), Maneesh (Drake, Travis Scott, YBN Cordae), Vinylz (Childish Gambino, J. Cole, Lil’Wayne) et enfin 1da aka Boi-1da qui n’est plus trop à présenter (allez, si : Drake, G-Eazy, Eminem, Big Sean…).
A l’écoute du son, ou à la simple lecture du titre de la track, vous aurez ressenti le ki d’un certain Ol’Dirty Bastard. Même la pochette du single fait référence à la cover de Return To The 36 Chambers.
Bref, l’homme de l’Oregon est de retour aux affaires et fait ce qu’il fait de mieux : kicker avec aisance et décalage, pour une fois sur du boom-bap et se mettre en images. – Clément
Rick Ross & Westside Gunn feat. Lule – 350 (Prod. Sean Momberger & Lyle Leduff)
En voilà un morceau et une association inattendus (même si l’infect DJ Drama nous a quand même fait poireauter pendant deux semaines). La production mêle astucieusement la grandiloquence de l’empereur de toutes les Florides avec le goût du sample bien travaillé cher à notre bon pistolet du côté ouest. Et si l’on n’a pas l’habitude d’entendre le petit prince de Buffalo rapper à la suite de refrains comme celui que nous offre Lule, quelques écoutes permettent de s’y accommoder, jusqu’à ce que le morceau finisse par tourner en boucle. Et prouve une fois de plus la place, toujours plus importante, de Griselda sur la carte du rap. – Xavier
Boldy James & The Alchemist – Carruth
Un album entièrement produit par l’éminent Alchemist est un gage de qualité certaine, et notre argumentation pour vous convaincre d’écouter l’excellent The Price of Tea in China pourrait très légitimement s’arrêter là. On pourrait également ajouter que l’autre protagoniste du disque, Boldy James, vient de signer sur le label Griselda Records, ce qui certifie a priori des qualités de rappeur conséquentes pour ce briscard de Detroit âgé de 37 ans, qui n’a pourtant pas attendu cette exposition nouvelle pour semer mixtapes et albums sur son chemin. La superbe pochette du disque, ainsi que les invités y faisant une apparition devraient achever de vous convaincre. Là où ça se complique, c’est au moment de choisi un morceau à sortir de ce formidable ensemble d’homogénéité. Nous avons symboliquement opté pour l’introduction du disque, mais c’est vraiment pour la forme, n’attendez plus pour vous plonger dans l’une des meilleures sorties de ce début d’année. – Xavier
Vdon feat. Sauce Heist – Asolos
Un autre producteur un peu zinzin a fait parler de lui en ce mois de février. L’inénarrable Vdon, ses drums secs et très travaillés et ses boucles d’outre-tombe ont encore fait parler d’eux. Mais en tant que protagonistes cette fois, avec la sortie de Black Mass, nouvel album du génial beatmaker, où apparaissent une flopée de rappeurs avec lesquels le Newyorkais a déjà travaillé. Entre autres, Eto, El Camino, 38 Spesh, Dark Lo et même Dave East, qui fait quelque peu figure de guest star parmi tous ces obscurs découpeurs de sample. Là aussi, difficile de saisir un morceau plutôt qu’un autre, tant l’entièreté des invités jouent le jeu et livrent de formidables couplets à celui qui leur offre tant de production tout autant formidables. Prenons Sauce Heist, pour la découverte. – Xavier
The Jacka feat. Freddie Gibbs – Can’t go Home (prod. Maki)
En février 2015, Dominick NEWTON, véritable légende de la Bay Area, s’éteignait tragiquement, abattu en pleine rue. Cinq années plus tard, toujours en février, son manager décidait de dévoiler, après un bon coup de polish et quelques nouveaux invités, le disque sur lequel The Jacka travaillait. On se délecte (amèrement) d’un gangsta rap aussi délicieux que cru, adouci par une science musicale très singulière. L’album est enrichi par des guests assez évidents, ayant pour la plupart déjà travaillé avec le rappeur de Pittsburg. Les disques posthumes sont souvent soit gênants, soit frustrants. Murder Weapon est de la deuxième catégorie. – Wilhelm
G Herbo feat Chance the Rapper, Juice WRLD & Lil Uzi Vert – PTSD (prod. D.A. Doman)
Vendu comme un album révolutionnaire et sans précédent dans la carrière du Petit Herbert par ce dernier lui-même, on ne doutait pas de l’importance de PTSD dans la vie du gang-banger de Chicago. On remarque d’ailleurs très vite le soin et la minutie qui s’en dégagent, plus que la spontanéité habituelle. Et si l’on pouvait douter de la singularité de la galette dans une discographie bien touffue et assez cohérente, c’est effectivement le point de rupture annoncé. Qu’on se le dise, personne ne boudait son plaisir devant les couplets infernaux de 4 minutes sans répit qui nous étaient servi régulièrement ni devant les bangers chicago-esques. Mais, alors qu’il s’ouvre plus que jamais auparavant et que les stigmates et la mort hantent chaque piste, G Herbo semble éminemment prêt à aller mieux. – Wilhelm
DJ Kay Slay feat. Sheek Louch, Styles P, Sauce Money, Nino Man, Vado, RJ Payne & Jon Connor – Back to the Bars, pt. 2 (prod. Trackateering & Twins Production)
Véritable posse cut new-yorkais orchestré par le bien noble DJ Kay Slay, « Back to the Bars, pt. 2 » est un regroupement de découpeurs légendaires. Ils s’installent tour à tour sur une production des plus efficaces, succinctement introduits par l’interventions de l’hôte de maison. En criant. C’est donc une mission bien remplie par le Drama King. Et comme nous valorisons l’art avant toute autre chose au Bon Son, nous ne vous ferons pas l’affront d’élire le meilleur de la troupe (c’est Styles P). – Wilhelm