10 Bons Sons en février 2020

Comme chaque début de mois, l’heure est au bilan du précédent autour de dix morceaux de rap français qui ont retenu notre attention.

Le 6 février : Alvin Chris – Psycho (Prod. Dran Fresh)

Découverte du mois, Alvin Chris est un jeune rappeur qui débarque de Lille. Sur ce titre original, où la flûte nous berce gentiment, il traite de la folie avec un regard philosophique. « La première prison c’est l’esprit » nous dit-il, basant son discours sur les relations humaines, les sentiments qui nous animent. Une belle carte de visite pour un talent jusqu’ici inconnu, et donc à suivre. – Antoine

Le 4 février : Hill. G – Hall of fame

La seconde avant d’appuyer sur play pour découvrir ce morceau inattendu de Ill, on se sent fébrile. Nous reviennent à l’esprit tous ses freestyles légendaires, ses morceaux de bravoure sur différentes compilations, tous les rappeurs qu’il a influencés. Mais on se redit aussi qu’il n’a peut-être pas fait ce qu’il fallait pour avoir la carrière qu’il méritait et qu’un come back aujourd’hui serait risqué (après l’heure c’est plus l’heure). Et on presse play. On se prend à bouger la tête sur la prod, à sourire à l’arrivée sur le beat de Ill, à le trouver en forme, les rimes déferlant en cascade, avec toujours autant d’attitude, de flows, de name dropping, d’anglicismes, d’argot, de clins d’œil (à lui-même, aux X-Men, à l’aventure Time Bomb, au Rat Luciano, à Gaël Monfils aussi). Et on remet le morceau des dizaines de fois, ravi que le talent soit éternel. Si ce premier morceau est une réussite, il nous tarde d’écouter cette légende (« Hill G c’est french rap name ») sur un plus long format, son album solo R.A.P. arrivant prochainement. – Chafik

Le 1er février : Mala – Saoudien (Prod. JP Ovaproof)

Mala ! Sans rire, Mala ! Il y a quelque chose de simplement jouissif, rien qu’à aller appuyer sur play quand on voit « Saoudien » apparaître, sortant de nulle part, dans nos listes de lecture. Est-ce la prod saccadée, rythmée par des détonations, des effets de recul, un chœur lointain pour lui ajouter plusieurs couches de profondeur, ou est-ce simplement cette voix, inchangée, ce flow, si reconnaissable et dense, qui s’accommode parfaitement de cette couleur musicale et offre, modernisée, une performance explosive ? En tout cas, notre nostalgie se sent cajolée, caressée dans le bon sens, malgré les grosses ficelles, et ça marche. Mala se paye un retour plus que réussi. La suite, s’il vous plait. – Sarah

Le 4 février : Jarod – J’ai fait ce qu’il fallait (Prod. Yug’z)

Une simple mélodie, pour paraphraser Polnareff, mais une mélodie douce et efficace.
Jarod, rappeur habitué à sortir des sons régulièrement (et que nous avions interviewé en 2017) a choisi une jolie boucle de guitare composée par Yug’z pour chanter sa manière d’assumer ses responsabilités d’homme. Un flashback percutant sur ses prises de risque et son sens du devoir, à écouter et réécouter sans modération. – Antoine

Le 6 février : Isha – Boulot / Baobab (Prod. Mike Sabre)

La force du rap d’Isha, c’est un timbre de voix chaud, une écriture simple (en apparence), un sens de la formule implacable, et un univers propre, servi par un ensemble de références totalement cohérent. Sur le troisième volet de sa série La Vie Augmente (lire notre chronique), le O.G. bruxellois semble au sommet de son art, tant par la richesse musicale du rendu, que par la spontanéité qui se dégage du projet. C’est particulièrement flagrant sur « Boulot/Baobab », morceau sur lequel l’instrumentale prend un virage à 180 degrés à 1’45, et suit le mood de l’homme au Durag, sans perdre en cohérence. – Olivier

Le 7 février – Jewel Usain – Skateboard (Prod. Furlax)

Petite boucle aérienne et sombre, on sent le vent monter et les nuages se chargent au-dessus de Jewel alors qu’il nous embarque dans sa ride nonchalante de 3 jolies minutes trente. Flow intéressant et propre, placement précis et flexible, la rime tombe juste et le verbe est bien choisi, l’image est parlante et bien pensée. Une petite pièce de choix donc, toute en subtilité, dans un mois riche en gros cartons. Evasion garantie entre deux glissades. Le travail s’affine du côté d’Argenteuil… on suivra. – Sarah

Le 25 février : Waltmann – 240 (Prod. GooMar)

Le trublion du Bohemian Club dénommé Waltmann (anciennement Walter) délivre ici un inédit intitulé « 240 ». 240 . 420 ? Y a-t-il un rapport saugrenu ? Probablement quand on connaît l’amour du rappeur pour les cierges… Ou pas quand on découvre les dernières phases du morceau : « Je s’rai rentré pour 7, avant les 240 pour bébé, à 9-30, elle est dans la poussette ». Un morceau qui évoque donc la paternité ? Quelques notes de piano, un BPM plutôt lent, des drums costauds ; il n’y a pas à dire, la prod’ de GooMar est taillée sur mesure pour le flow caverneux et les placements si particuliers du MC de la 75e Session. Et quant à la dernière phrase de la track : Oui Waltmann, on veut l’album. – Clément

Le 20 février : Hermano Salvatore – Texto (Prod. Hermano)

Hermano le Marseillais, qui s’est fait connaitre à l’échelle nationale avec son groupe Tous Salopards mais surtout via ses performances au Rap Contenders, fait monter la pression ces derniers temps. Après son projet Manito sorti en décembre dernier et son morceau « Théorème » balancé en janvier, il en remet une couche avec « Texto ». La technique est sûre, l’instru, qu’il s’est lui-même concoctée, est efficace, les qualités d’écriture sont toujours là, Hermano s’étant fait maître dans les lyrics bien sentis, tout en incorporant un refrain mélodieux qui ne gâche rien. Le tout donne un morceau de qualité, au format original, avec un clip qui alterne les ambiances. A suivre. – Chafik

Le 28 février : Swift Guad & Al’Tarba feat. Cenza & Vîrus – Les chants du Maldoror

À la fin des années 2000, Al’Tarba, beatmaker et rappeur au sein du groupe toulousain Droogz Brigade, débarque à Paris. Assez vite, démarre une collaboration avec le Montreuillois Swift Guad qui durera plusieurs années. Happés par leurs évolutions musicales respectives ils marquent ensuite une pause dans leur travail commun sans pour autant se perdre de vue, mais remettent le couvert pour une Poignée de Punchlines anthologique en 2016, point de départ d’un nouveau chapitre dans leur collaboration. L’album commun, Musique classique, paru il y a quelques jours, vient démontrer que plus d’une décennie plus tard, les deux artistes n’ont rien perdu en termes inspiration, que ce soit dans les thématiques abordées ou la recherche minutieuse de samples. Pour ne rien gâcher, quelques collaborations de haute volée sont venues ponctuer ce long format, avec en premier lieu le sombre « Les chants du Maldoror », en featuring avec Cenza (enfin, un son commun entre les deux Montreuillois) et Vîrus, numéro un dans la catégorie « plume morbide », qui signe là un de ces couplets à tiroirs dont lui seul a le secret. – Olivier

Le 26 février : Sneazzy – A quoi tu joues (Prod. LCS, Loubensky, Hologram Lo’ & Diabi)

Le 6 mars prochain sortira le prochain album de Sneazzy, intitulé Nouvo Mode. Et en attendant, l’ancien rappeur de 1995 a dévoilé deux morceaux lives (pour Rounds, les nouvelles sessions Vevo filmées à 360°) : « A quoi tu joues » et « Schéma ». Un clip est également sorti : « Feu Régulier » et son rouge omniprésent. Bref, le morceau « A quoi tu joues » est depuis disponible dans sa version studio. Et c’est le morceau qui nous intéresse ici, avec son intro aérienne et chill, son changement soudain de vibe et ses bells hypnotiques. Il faut dire qu’on retrouve un Sneazzy très en forme, qui multiplie les punchlines savoureuses, les comparaisons efficaces et les adlibs made in Georgia. Tant mieux quand on sait que c’est cette track qui ouvre l’album. Reste à savoir si le bougre tiendra ce rythme et cette qualité sur la vingtaine de pistes que contient Nouvo Mode. Une chose est sure, c’est que la liste des featurings donne envie (Lefa, Nekfeu, S. Pri Noir, Alpha Wann ou encore Laylow). Réponse le 6 mars donc. – Clément

Le 14 février : Guizmo – Manifeste (Prod. IIVLB & Sims)

Sorti le 14 février, le morceau “Manifeste” de Guizmo est venu prouver une fois de plus le talent incontestable du rappeur de Villeneuve-la-Garenne. À l’heure où le format des morceaux est de plus en plus court, le membre de l’écurie Y&W prend les auditeurs à contre-pied et  vient ici cracher son vécu durant plus de sept minutes. À la manière d’anciens titres marquant comme « André », « C’est tout » ou encore « Mon CV », la formule  fonctionne toujours à la perfection : une boucle mélancolique, pas de refrain, une grosse dose de technique et surtout beaucoup de vécu. – Jordi

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