Prince Waly a tout du « Man of the Year » : son album Moussa semble avoir mis tout le monde d’accord, ses apparitions sur la Saboteur Mixtape et le dernier Souffrance ont fait mouche, son freestyle Grünt est un condensé de gros rap, il a eu droit à son Colors et a même fait une pub pour Call of Duty. L’occasion pour nous de revenir sur dix ans d’activités, d’albums au sein de son groupe Big Buddah Cheez, d’EPs en solo, en duo, de featurings, pour arriver à ce tant attendu premier album. Nous croiserons du beau monde durant ce parcours, de Fiasko Proximo, son acolyte de toujours, à Ali, de Myth Syzer à Lomepal, en passant par 1995, L’Entourage et Alchemist. Back in the days en 10 Bons Sons, durant lesquels nous avons abordé la vie de groupe, son émancipation, l’Amérique, le retour du boom bap au début des années 2010, le style Prince Waly, le storytelling, le chant dans le rap, et Lunatic bien sûr.
1 – Big Budah Cheez – « Ma routine roule à M.City » (Ma routine roule à M.City, 2012)
Ah incroyable ! Ce morceau, c’est la nostalgie avant tout. C’est un des premiers morceaux qu’on a fait avec Big Buddah Cheez. Si je ne dis pas de bêtises, c’était en 2011 ou 2012… Ça m’évoque une époque, les premiers pas dans le rap, notre innocence. On faisait de la musique à 100%, par passion. On développait notre univers, on se retrouvait tous les jours au studio, pour créer un style à nous. C’est aussi à cette période qu’on a fondé le collectif Exepoq Organisation avec Clifto Cream, Kohm, Issaba, tous mes gars de l’époque… Ce morceau m’évoque une grosse nostalgie.
Quand sort ce projet, le premier, tu le vis comme une sorte d’aboutissement, ou tu te projettes déjà et tu le vois un commencement, un début de marathon ?
C’est vraiment un début, ce n’est pas encore un aboutissement. A cette époque, je n’avais vraiment pas confiance en moi. Quand on sort ce projet, on l’a vécu comme si on avait lancé une bouteille à la mer. On se dit qu’on fait de la musique, qu’on aime ce qu’on fait, on sait qu’on n’est pas encore des professionnels, mais notre son peut peut-être plaire à certaines personnes. Ce premier projet c’est notre carte de visite. On est au début de notre marathon, au début d’une grande aventure. Puis on a vu qu’il y avait d’autres groupes dans Paris qui faisaient le même genre de musique, que ce soit 1995, les mecs de L’Entourage et on est rentré en contact. Ce projet, c’est aussi ce qui m’a mis le pied à l’étrier. Il a permis d’une certaine manière de construire Prince Waly.
2 – Myth Syzer feat Prince Waly – « Clean shoes » (ZEro EP, 2013)
« Clean Shoes » ! Là pour le coup et pour revenir sur ce truc d’aboutissement, ça a été le premier morceau « Prince Waly » on va dire. Il y avait Big Buddah Cheez mais je n’avais pas encore cette esthétique. « Clean Shoes » l’a vraiment lancé dans le milieu du rap. C’est avec ce morceau que les gens m’ont découvert, ont capté mes influences, mon amour pour le monde du cinéma, le linge, etc. Toutes ces choses qu’avant je n’avais pas vraiment développé. Ça me rappelle aussi cette collaboration avec Myth Syzer. Le vrai départ pour Prince Waly, c’était ce morceau-là. Sans « Clean Shoes », Prince Waly n’aurait pas existé aujourd’hui.
Le titre de ce morceau est en anglais et je me suis amusé à compter les références, les occurrences aux States et il y en a 24. Tu es influencé par les États-Unis, comme beaucoup d’entre nous, on est un peu des petits américains d’ailleurs, même si ce n’est pas forcément flatteur. Mais la critique du modèle américain est plutôt absente dans tes textes.
C’est vrai. Depuis tout petit j’ai baigné dans cette culture, j’ai toujours l’impression d’y avoir vécu, à travers internet, les films, etc, sans n’y être jamais allé pourtant. J’ai été bercé par toute cette culture, grâce aux jeux vidéo, aux vêtements, aux clips… J’ai toujours été un peu fasciné par cette culture-là, par cette langue aussi, que je trouve très stylée. La langue française, est très belle, c’est une langue très riche et je suis trop content de faire du rap en français parce qu’on a de la chance de pouvoir faire des jeux de mots, de varier nos tournures de phrases, chose qui en américain est un peu plus compliqué je trouve. Mais l’anglais, est beaucoup plus simple et fluide. Je me souviens avoir eu une discussion avec Fiasko Proximo et il me disait : « Dans un texte, si tu mets le mot « gun » c’est tout de suite plus stylé que si tu dis « pistolet ». C’est pour ça que j’utilisais beaucoup de mots anglais, c’était purement pour le flow et le style. Il faut savoir qu’il y a certains mots que je m’interdis d’utiliser parce que je ne les trouve pas beaux justement et « Clean Shoes », c’est clairement la période où je me disais que je ne devais utiliser que des mots qui sonnent bien, des mots assez ronds, des mots qui glissent. C’est pour ça qu’à cette époque j’avais autant de mots anglais dans mes textes. Mais a contrario aujourd’hui, je suis beaucoup plus apte à avoir un sens critique sur le modèle américain comme dans certains morceaux où je parle de fusillades, de bavures policières. Mais c’est vrai qu’avant j’étais plus centré sur le style, le visuel, tout ce qui est un peu vitrine. Par la suite, je me suis un peu plus rendu compte et c’est vrai que tout n’est pas beau là-bas et c’est même je pense le contraire. L’Amérique on a tendance à la fantasmer et c’est du sûrement à toute cette culture pop.
3 – Hologram Lo feat Alpha Wann & Prince Waly – “Rov or benz” (Deeplodocus EP, 2014)
(Il cherche ses mots) L’histoire de ce morceau est dingue… On faisait notre son dans notre coin et un jour je reçois un message d’Hologram Lo qui me demande s’il peut sampler ma voix sur un freestyle Grünt où à un moment je dis : « Aurai-je le Range Rover ? La Mercedes ? ». Et moi j’étais fan d’eux, je le suis toujours, mais à cette époque, pour moi, on faisait le même genre de musique que moi et en plus ils arrivent à exploser, donc c’était des modèles pour moi ces mecs-là. Quand il me demande, je suis honoré et je donne bien sur mon accord. Ensuite, il me dit que sur le morceau il y a Alpha Wann qui va poser un couplet et il me demande si je suis chaud d’en poser un aussi. Pour moi, c’était un accomplissement, j’étais validé par les mecs que j’écoute, que je kiffe et que je trouve très talentueux. Si ces gars me validaient, je me disais que je pouvais faire du rap sérieusement. Ça a été ma façon d’entrer dans la cour des grands on va dire.
Quand on a fait le clip, on a été à Londres et je me rappelle, c’était la première fois de ma vie que je prenais l’avion. Tu vois, ce morceau me rappelle que la musique m’a énormément fait voyager. Pour « Doggy Bag » aussi le clip, c’était à Londres. Dernièrement j’ai fait une pub pour Call Of Duty, ça m’a permis de voyager. Très souvent, quand je prends l’avion, c’est en lien avec la musique, alors qu’avant, je voyageais très rarement pour mes affaires personnelles.
Le morceau sort en 2014 et à cette époque-là, depuis trois-quatre ans, avec Alpha, Hologram Lo, 1995, L’Entourage, 5 Majeur, une nouvelle scène rap fraiçais, dont tu fais partie, est en train d’émerger et remet le boom bap, le kickage au goût du jour ; comment tu vivais cette époque présentée par certains comme un renouveau ? A moins que tu n’aies la tête dans le guidon et tu ne t’en rendais pas compte ?
Pour moi, on faisait un truc de niche. On était mis dans la case « mecs à l’ancienne », on était très jeunes mais on nous prenait pour des anciens, on disait de nous qu’on était restés bloqués. On ne nous prenait pas vraiment au sérieux j’ai l’impression. Du coup, on faisait notre truc vraiment par passion, parce qu’on aimait ça, il n’y avait rien de forcé, il n’y avait pas de calcul. Par la suite, on s’est rendu compte qu’il y avait quelque chose à faire, qu’il y avait un public pour ce genre de musique aussi. Mais c’est vrai qu’on avait la tête dans le guidon. Quand on a vu l’ampleur que ça a pris, on s’est dit que quelque chose était en train de se passer, que les codes étaient en train de changer, donc c’était cool pour nous car on le faisait vraiment naturellement.
4 – Bon Gamin feat Prince Waly & Jeune LC – « Sans titre », 2015
Pour moi, c’était une époque où je me sentais vraiment épanoui dans ma musique, où j’étais hyper créatif, j’avais beaucoup de textes. Je ne dirai pas que j’étais à mon prime mais je sentais que j’avais un très bon niveau. J’étais entouré de bons gars, de mecs très très forts. On avait ce truc de challenge, de concurrence saine. Quand on en voyait un sortir un texte, tu avais envie de faire mieux que lui. J’étais vraiment dans une bonne époque, entre Exepoq, Bon Gamin, L’Entourage. En terme de clips on s’amusait aussi. On avait encore cette innocence, on n’était pas trop dans le business, c’est ce qui fait qu’on était très très forts à cette époque-là. On faisait tout avec le cœur.
On a vu dans les morceaux précédents que tu rappes en duo avec Fiasko Proximo dans BBC, avec L’Entourage, là dans un posse cut avec Bon Gamin, l’année suivante tu feras un EP avec Myth Syzer ; comme Ol’kainry t’es pas vraiment un rappeur solo.
Oui, c’est vrai. Avant que je fasse « Clean Shoes », je disais à Fiasko que jamais je pourrais faire de solo, que je ferais du Big Buddah Cheez toute ma vie. Et il me disait « ce n’est pas possible », d’autant que lui voulait faire des projets solos, des mixtapes de beatmaker. Donc je me suis dit « s’il fait des solos, qu’est-ce que je vais faire moi ? » J’ai alors commencé à me projeter, à faire des choses pour moi. Je me suis toujours vu comme un rappeur de groupe ou de collectif et c’est cette discussion avec Fiasko qui m’a un peu mis un coup de pied au cul. Si Fiasko n’est plus là, qu’est-ce que je fais ? J’ai commencé à m’activer, à me rapprocher de plein de gars, comme sur mon dernier album mais déjà sur BO Y Z où je me suis émancipé puisqu’avant, je faisais soit des projets à deux, soit en groupe. Je faisais beaucoup de featurings aussi, sur BO Y Z, il y a six featurings sur les neuf morceaux du EP. Il m’a fallu du temps pour m’émanciper.
5 – Prince Waly feat Myth Syzer – « Junior » (EP Junior, 2016)
« Junior », je pense que jusqu’à la fin de ma vie, ce sera le morceau du cœur on va dire. C’est le premier morceau où j’ai commencé à parler de moi et de ma vie, je ne l’avais jamais fait avant. Je me souviens, on était sur la construction du EP et Syzer était aux États-Unis où il faisait mixer le projet. Moi je bossais à cette époque donc je ne pouvais pas faire les allers-retours. Il a fait la prod de « Junior » là-bas et me l’a envoyée en me disant que je devais absolument rapper dessus. C’était une période assez compliquée pour moi, mon frère avait des problèmes, ça ne se passait pas très bien à la maison et je n’étais pas dans une bonne énergie. Il m’a conseillé justement de me servir de cette énergie pour faire le son, d’en parler sur le morceau, ça me ferait du bien. J’ai essayé et ça a donné naissance au morceau « Junior ». J’ai bien fait de l’écouter dans le sens où aujourd’hui encore, c’est un de mes morceaux qui me touche le plus, un de mes préférés, un des plus streamés. Syzer a eu une vision incroyable et cette chanson me rappelle toute cette époque.
J’ai l’impression que plus que sur « Clean Shoes », tu trouves ta formule sur « Junior », avec un mélange d’egotrip (je pense à la phase « J’suis pas l’meilleur mais j’suis putain d’fort »), de phases persos et de références de rap. Ce combo-là te représente clairement. Même sur le projet, il y a du storytelling, des feats avec tes proches.
Je suis entièrement d’accord avec toi. « Junior », c’est vraiment le morceau qui me représente, avec toutes ces références, toute cette esthétique vintage, mais avec aussi toutes ces phases un peu techniques, il y a vraiment toute la recette Prince Waly dans ce morceau. Avec ce titre, je me suis vraiment émancipé, c’est un solo en plus. Même dans mes références, je reprends et adapte le « Même si tu kiffes pas, écoute quand même », chose que je fais beaucoup sur l’album Moussa. Pour moi, Moussa, c’est la continuité de Junior.
6 – Alchemist feat Lomepal & Prince Waly – “Forêt” (Paris-Bruxelles, 2017)
Alchemist, très grand producer, qui a travaillé avec Mobb Deep, avec plein de gens dont je suis fan. C’était vraiment une expérience incroyable. C’était la première fois où je travaillais comme ça : on reçoit les prods, on me dit que c’est Alchemist et que c’est un projet Red Bull, donc déjà, c’est fou qu’ils aient pensé à moi. Ensuite, avec Lomepal, on avait flashé sur la même instru et il m’avait proposé qu’on collabore sur le morceau. J’étais chaud vu qu’en plus, j’étais fan de sa manière d’écrire. C’est vraiment le feeling qui a dicté le morceau, il n’y a pas de calcul. D’habitude, je ne travaille pas de cette façon, j’écris chez moi, pas en studio, quand j’y allais c’était juste pour enregistrer. Là, on a travaillé sur le son, on a fait des arrangements. Ça m’a donné une nouvelle vision sur la musique, une nouvelle méthodologie.
Justement, tu collabores avec Lomepal qui par la suite a pas mal évolué, en mettant plus de chant, de mélodie dans sa musique et toi aussi, tu chantonnes de temps en temps ; c’est une direction vers laquelle tu comptes aller davantage ?
Je compte utiliser le chant avec parcimonie. Je ne me considère pas comme chanteur. Je viens de l’école du rap, j’aime trop ça, même si ma culture musicale s’est développée avec le temps, que j’écoute plus de jazz aujourd’hui, de pop aussi, je suis vraiment fan de rap tu vois (il appuie sur le mot rap), le rap c’est toute ma vie. Mais tu vois Notorious Big avant ou Kendrick Lamar aujourd’hui ont mis du chant, de la mélodie dans leurs morceaux. J’ai rencontré ma femme qui est chanteuse, Enchantée Julia, et elle m’a donné beaucoup de techniques, m’a beaucoup aidé dans ma façon de voir la musique, elle m’a montré que je pouvais faire des choses que je pensais être incapable de faire. Elle m’a un peu décomplexé. Donc c’est normal que j’assimile ces nouveaux skills dans ma musique. Mais je ne ferai jamais d’album de chant, de chansons, je ne suis pas un chanteur, je n’ai pas envie de faire de fausse note, je ferai toujours du rap et j’assimilerai parfois de la mélodie ou des harmonies à mon rap. Comme « BBF » par exemple, c’est chanté, mais il y a quand même des moments de rap, même en termes de rimes, de placements, d’écriture, ça reste du rap. Je suis content d’avoir cette nouvelle méthodologie mais je ne ferai jamais de chanson (il appuie sur ce terme).
7 – Big Buddah Cheez – « Puffy » (Épicerie coréenne, 2018)
Ok, c’est sur Epicerie coréenne, le dernier album de Big Buddah Cheez, qui malheureusement, a été conçu dans une période un peu compliquée. Avec Fiasko, on a toujours été dans ce truc d’expérimentations, on n’a jamais eu notre moment où on s’est dit : « On tient notre truc, on a notre patte et on va faire notre musique à 100% ». La plupart des morceaux sur cet album, je ne les écoute plus vraiment, je suis totalement détaché de cet album-là. Outre l’aspect musical, au niveau professionnel, ça n’allait plus trop, on n’était pas très bien entourés à cette époque… C’était une période pas évidente pour nous. « Puffy », j’en suis vraiment détaché. Je sais qu’il avait plu à certains mais aujourd’hui, je ne suis plus trop en adéquation avec l’énergie de l’album Epicerie Coréenne.
Quelques années après la fin du groupe, quel bilan tu fais de l’aventure Big Buddah Cheez ?
Je dois énormément à Fiasko parce que c’est lui qui m’a mis le pied à l’étrier, qui m’a mis dans le rap, qui m’a fait découvrir les X-Men, toute l’écurie Time Bomb… Sans lui, je n’en serais pas là aujourd’hui. Big Buddah Cheez a été une aventure incroyable, une très belle période de ma vie. Par la suite, quand on commence à monter, à prendre de l’ampleur, des choses positives arrivent mais aussi pas mal de négatives. On n’a jamais vraiment eu de projet où on était satisfaits à 100%. On a toujours été dans la recherche, dans l’expérimentation et malheureusement, au moment où on aurait pu aboutir sur quelque chose de professionnel, où on aurait pu maîtriser notre art, on a un peu eu l’herbe coupée sous le pied. Les derniers souvenirs malheureusement sont négatifs mais Fiasko reste mon frérot, on se voit encore aujourd’hui, parfois il m’accompagne sur scène. L’aventure BBC s’est terminée de façon un peu compliquée, mais on n’est pas à l’abri que dans cinq ans, deux ans, Fiasko reprenne goût à la musique et qu’on ait envie d’en faire ensemble.
8 – Cenza feat Prince Waly : « Prends la ride » (Tout droit sorti de Montreuil, 2019)
C’est « Prends la ride » sur l’album de Cenza, un morceau un peu West Coast. Faut savoir qu’avec Cenza, on n’habite pas très loin, j’ai grandi avec lui, il faisait partie de tous ceux que j’écoutais plus jeune. Au fur et à mesure, on s’est mis à trainer ensemble. C’était un pote à mon grand frère et quand il a su que je faisais du rap, il m’a tout de suite pris sous son aile. On a fait pas mal de morceaux ensemble, dont « Prends la ride ». On en a un autre d’ailleurs qui arrive très prochainement.
En plus de ta présence sur le dernier album de Souffrance, la connexion montreuilloise L’Uzine / Prince Waly continue.
C’est ça. C’est vraiment une histoire d’amour, on est fans les uns des autres. Souffrance sort son album à quelques jours du mien, je suis dessus, j’étais sur celui de Cenza, et sur mes prochains projets, ils seront dessus. Triplego aussi, c’est pareil. Il y a vraiment cet esprit familial. Il n’y a rien de forcé, on s’aime vraiment.
9 – Prince Waly – « BO Y Z » (EP BO Y Z, 2019)
« BO Y Z ». Ce morceau a changé ma vision de la musique, du fait notamment de la rencontre avec Feu Chatterton ! On s’est rencontrés au Petit Bain, j’avais fait une date là-bas, en 2016 si je ne dis pas de bêtise et il était venu me voir sur scène. Je n’étais pas au courant et c’est quelqu’un de mon équipe qui m’a dit : « Mais tu te rends compte, tu as Feu Chatterton ! Dans le public, c’est un truc de fou ». Par la suite, on a décidé de le contacter et c’est comme ça qu’on est entrés en contact. On s’est rencontré en studio et leur façon de travailler, de voir la musique, de s’approprier les choses, ça m’a fait changer ma façon de voir la musique. Le morceau « BO Y Z » est excellent et les gens ont beaucoup aimé la prise de risque, ça m’a fait sortir de ma zone de confort, sans forcément me dénaturer. J’aime aussi le message du morceau : la musique peut être universelle et peu importe le courant, si la musique est bonne, c’est tout ce qui compte.
Il s’agit d’un storytelling dont tu as le secret, très cinématographique, comme plein d’autres que tu as faits, comme sur le dernier album. Je vais te proposer quatre stortellings d’autres artistes, tu me dis celui que tu préfères : « La Cavale » de Faf Larage, « La Trilogie » de Tandem, « Pucc’ Fiction » d’Oxmo et « XY » de Kery.
Tu sais quoi, avant que tu me fasses les propositions, j’avais « Pucc’ Fiction » dans la tête. Mais j’avoue que « La Trilogie » de Tandem est incroyable, parce qu’il y a les clips qui vont avec, qui accompagnent super bien la musique, il y avait Diam’s en procureur, Booba aussi, le clip est fou ! En vrai, « XY » aussi de Kery James est dingue. En fait, « Pucc’ Fiction », en terme de storytelling pur, c’est juste la perfection. Parce que c’est bien aussi qu’il n’y ait pas de clip, on peut nous-mêmes s’imaginer le truc. Pour la nostalgie, je choisirai « Pucc’ Fiction ». Aujourd’hui encore, dans l’instru, les mots qu’il a choisis, c’est hyper fort. D’ailleurs, il y a une grosse dédicace à eux dans le morceau « Crash » quand à la fin je reprends « C’est urgent, ce soir on verra les urgences, etc », je dirai pas la suite (rires). Ce morceau m’a vraiment traumatisé. Après j’avoue que je ne connais pas trop celui de Faf Larage, mais j’irai l’écouter.
10 – Prince Waly feat Ali – “Rottweiller” (Moussa, 2022)
(Sourire) Que dire ? Ce morceau, c’est vraiment l’aboutissement d’une carrière. D’une jeune carrière, mais c’est vraiment un aboutissement. A partir du moment où tu arrives à être identifié par ton idole de jeunesse et tu fais un morceau avec, c’est qu’au fond, tu as réussi ton parcours. Pour moi, Ali, c’est la voix que j’ai le plus écouté dans le rap, avec celle de Booba. Lunatic, c’est un pilier du rap français, si ce n’est le pilier. Ils ont changé la face du rap français, ils ont fait rêver pleins de jeunes. Comme ils disent : « C’est bandant d’être indépendant ». Aujourd’hui, on est plein à suivre ce business modèle, sans eux, il y en aurait plein qui n’existeraient pas, sachant qu’avant, c’était formaté par les maisons de disques, c’était compliqué de signer sans passer en radio. Eux ont prouvé que c’était possible de le faire, sans ces mecs-là, beaucoup auraient baissé les bras. Donc on leur doit énormément. Et même musicalement, c’est juste ouf que deux mecs de vingt ans qui qui rappent juste leurs vies, arrivent à transcender les foules, à amener pleins de gens dans leur univers. Vingt ans après, me retrouver avec Ali et faire ce morceau, pour moi, c’est juste un accomplissement. Je ne pouvais pas rêver mieux.
En effet, la boucle est bouclée et c’est peut-être même mieux que tu aies fait le feat avec Ali plutôt qu’avec Booba, où tu aurais pu être déçu par l’homme…
Clairement. Et au contraire, Ali, humainement, c’est quelque chose. On s’entend super bien, on était ensemble au téléphone tout à l’heure, c’est quelqu’un de très bienveillant. Comme tu dis, souvent, on peut être déçu par nos idoles et avec Ali, j’ai été tellement agréablement surpris. Je savais que c’était une bonne personne mais à ce point-là… C’est quelqu’un d’extraordinaire. Le morceau qu’on a fait ensemble parle de lui-même. Il est arrivé avec un couplet légendaire, son entrée sur le morceau (sourire). Je ne pouvais espérer mieux en tant que fan.
Dernière question, sur l’album, on retrouve tout un tas de références à Booba, comme tout au long de ta discographie d’ailleurs ; si tu devais citer LA punchline, celle qui t’a marqué et à laquelle tu penses quand on évoque Booba ?
La première qui me vient en tête, c’est la phase avec les gnous et les hyènes, sur « Ma définition » (NDLR : « Grillé mais je nie, ici les hyènes ont une insigne et j’espère qu’c’est pas l’un d’nous qui servira de gnou »). Ce son est un des meilleurs de toute sa discographie.
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