Le mois dernier sortait le dernier album du Wu-Tang Clan, A Better Tomorrow. Mais, presque comme prévu, c’est plutôt 36 Seasons de Ghostface Killah sorti le 9 décembre qui mérite de faire la une de l’actualité Wu-Tang en ces périodes de fêtes. Autant la bande à RZA, minée par les conflits internes, a déçu avec un contenu insipide, autant Ghostface nous a une nouvelle fois enchantés, bien aidé par les productions de The Revelations, présents sur chaque piste.
Après avoir été salué par la critique avec Twelve Reasons To Die en 2013, Ghostface Killah aka Tony Starks a donc remis ça, pour ce qui est -déjà- son 11ème album solo. Et si le succès de Ghostface tenait au fait de conserver des fondamentaux tout en s’éloignant de temps à autres de ses potes du Wu ?
En effet, comme sur ses précédentes sorties, pas de RZA, pas même de Method Man ou de Raekwon, ses potes de Wu Massacre (2010). Pourtant l’album se tient très très bien entre morceaux stressants façon « je-tire-sur-tout-ce-qui-bouge-dans-cette-back-alley », ou les instrus plus soul des Brooklynois de The Revelations. Si vous aimez la première atmosphère sus-citée, vous vous délecterez de « Homicide » co-produit par Malik Abdul-Rahmaan, dont on vous parlait pour son travail auprès de Oddisee et Diamond District récemment.
https://soundcloud.com/tommy-boy-1/homicide
« Ayo go against the grain, I smell a massacre
I’ll stick a bomb in your limo, blow up your passengers
Kill every one of ’em, leave no witnesses
Time for revenge, now live out your sentences » – « Homicide »
« Tu vas à contre-courant, je sens un massacre
Je vais plastiquer ta limo, descendre tes passagers
Tuer chacun d’un, ne laisser aucun témoin
C’est l’heure de la vengeance, de connaître tes sentences »
« The Dogs Of War » (featuring Shawn Wiggs et le vétéran Kool G Rap) produit le même effet, tout comme « Blood In The Streets » avec AZ. Si le Wu est absent, vous avez déjà remarqué que de bons guests sont néanmoins présents sur 36 Seasons. Dès le premier morceau déjà, la basse vertigineuse de Fizzy Womack et de The Revelations, accueillait AZ et Kool G Rap en sus de Ghost. Sympa comme échauffement auditif. Surtout que les trois MC’s n’ont pas perdu de leur superbe, particulièrement AZ, le pote de Nas étant même invité sur cinq titres. Sur ce battlefield musical, Ghostface Killah en profite pour envoyer paître quelques anciens homies qu’il n’arrive plus à reconnaître dans son borough de Staten Island…
https://soundcloud.com/tommy-boy-1/thebattlefield
« Ayo, I’m back after nine years, that’s 36 seasons
Shit is changed up for all types of reasons
Staten Island ain’t the same, shit is lame
No familiar faces son, I’m dodging the game » – « The Battlefield »
« J’suis de retour après 9 ans, ça fait 36 saisons
Les choses changent pour toutes sortes de raisons
Staten Island est changé, c’est devenu ridicule
Plus aucun visage familier, j’esquive cette mascarade »
Mais on le sait aussi, Ghostface Killah aime parler de love, comme sur « Love Don’t Live Here No More », où il évoque sa plus grande peine de cœur. Les chœurs, la voix de la chanteuse de Kandace Springs, la basse, les quelques notes de piano, berceront mêmes les moins sensibles. Ce n’est certainement pas anodin s’il s’agit du premier single de ce 36 Seasons.
Le reste du skeud est tout aussi bon, et on n’a pas vraiment envie d’appuyer sur stop en mettant 36 Seasons dans les enceintes. Mieux même, cet album donne envie de pencher une oreille plus attentive aux travaux de The Revelations, qui ont même droit à leur propre morceau avec la reprise de « Thin Line Between Love and Hate » de The Persuaders (1971).
Ce LP est une réussite, prouvant que Ghostface sait faire appel aux meilleurs quand le Wu-Tang souffre sur A Better Tomorrow. En invitant AZ, Kool G Rap, Kandace Springs et d’autres, et en confiant à des spécialistes soul la production de cet album, comme il l’avait fait avec Adrian Younge sur « Twelve Reasons To Die », Ghostface Killah a eu le nez creux. Malgré un peu d’amertume qui flotte dans les lyrics plusieurs fois sur cet album, Tony Starks s’est sans doute fait plaisir en studio.
Pour vous procurer 36 Seasons , ça se passe ici (téléchargement) ou ici (physique).
Date de sortie : 9 décembre 2014 // Label : Tommy Boy
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C’est marrant de voir, 14 ans après, que finalement c’est Ghostface qui aura eu la carrière musicale la plus consistante (qualitativement et quantitativement) au sein du Wu, là où au tout début, Method Man sortait du lot de manière évidente et semblait être le mieux armé pour avoir une carrière à succès. Et à priori la tendance ne sera pas inversée.
Je suis bien d’accord avec cette chronique, je dirais juste qu’on sent un peu trop le « je fais un autre projet à la 12 Reasons » ainsi que l’absence de RZA à la production exécutive (où il était présent sur 12 Reasons) qui, de par son expérience cinématographique (à la musique ou la réalisation), aurait permis d’en faire une histoire en 14 pistes totalement aboutie, comme l’était 12 Reasons. Mais ça reste un très bon album. Avec une très belle pochette.