Arts Martiens sort aujourd’hui, et les quelques extraits dévoilés par le groupe ont su générer une véritable attente autour du nouvel album d’IAM. L’occasion pour Le Bon Son de rencontrer Imhotep, architecte sonore du groupe depuis ses débuts, et particulièrement impliqué sur le projet. Voici la première partie de l’interview qu’il nous a accordée, dans laquelle il est question d’Arts Martiens bien sûr, mais aussi de l’ensemble de la discographie d’IAM…
Comment vous sentez-vous, avec le groupe, à quelques jours de la sortie de votre 6ème album, Arts Martiens ?
On se sent plutôt bien ! On est très contents et très fiers de cet album, parce qu’on l’a vraiment travaillé en collectif. On a vraiment retrouvé l’esprit d’équipe dans la manière de travailler, un peu dans l’urgence. On est très fiers de le défendre aujourd’hui, à la fois en promo et sur scène. Et puis, comme tous les artistes, on sait que c’est la crise sur le marché du disque, mais on espère que cet album nous permettra de continuer à faire des shows et des vidéos de qualité. Si on veut faire rêver les gens avec de belles vidéos et de beaux spectacles, il faut que tout le monde trouve son compte, on peut pas demander à nos équipes de travailler pour rien. Ceci dit on est déjà super contents des premiers échos de la presse et de nos proches. On est toujours très attentifs à l’accueil du public, et on espère que ça va le faire… On y croit !
Il y a eu quelques rebondissements dans la genèse de cet album, est-ce un soulagement de le sortir enfin ?
En fait, c’est surtout un soulagement d’avoir réussi à l’enregistrer et le mixer dans les temps. On était parti sur une piste Ennio Morricone dans laquelle on se serait inspiré de ses musiques pour créer un album sur cette thématique. Ça a été un peu compliqué à gérer d’un point de vue financier, parce que les autorisations étaient très chères. Compliqué artistiquement aussi, les morceaux n’allaient plus nous appartenir, mais être considérés comme des oeuvres d’Ennio Morricone, sans que l’on soit mentionnés dans la création, l’écriture, la compo… On n’y a pas retrouvé notre compte artistiquement. On est donc revenu à la base, et on s’est fait un album d’IAM tout simplement.
Le fait d’être à 5, et non plus 6, a-t-il changé votre dynamique de travail ?
Pas vraiment. Tu fais allusion au départ de Freeman, et cette manière de travailler on l’avait dès le départ du groupe, avant même qu’il soit MC, puisqu’au départ il était danseur. Ce travail d’équipe, collectif, on l’avait déjà avant qu’il ne passe derrière le micro. Après il a fait un choix, celui de quitter le groupe et de mener à bien sa carrière solo. On respecte ce choix, mais on n’a eu aucun mal à s’adapter, et tout le monde a travaillé l’esprit serein et tranquille, et ça continue, plus fort que jamais !
‘Musicalement, je me retrouve plus dans cet album que sur les deux précédents.’
Tu es l’architecte sonore d’IAM, quelle a été ton implication sur cet album ?
Je me suis impliqué à fond, parce qu’on a choisi de travailler tous regroupés dans un studio dans lequel on avait différents ateliers : compo, écriture… Ça permettait de réagir très vite et de travailler en interaction. Akhenaton et Shurik’n ont participé avec moi à la conception de certaines musiques. Mais il n’y avait pas que les membres du groupe IAM : on a aussi fait appel à Faf la Rage, et à Sébastien Damiani, compositeur et pianiste de musique classique, qui nous a donné un gros coup de main, et on le remercie, pour les arrangements au piano et aux cordes. Moi j’ai aussi donné ma patte sur la plupart des morceaux.
J’ai dû produire pas loin des deux tiers des titres sur cet album. Musicalement, je me retrouve plus dans cet album que sur les deux précédents, sur lesquels j’étais peut-être plus en retrait, parce que c’étaient des univers musicaux qui me correspondaient moins. Après dans la carrière d’un groupe on peut pas toujours appliquer la même recette. On s’est permis des petites expériences sur les albums précédents. Là on revient non pas à la base, mais au IAM canal historique. Le fait aussi de mixer avec Prince Charles, qui est le même ingénieur avec qui on avait mixé L’école du Micro d’Argent, ça donne vraiment un son… Ce gars est un magicien du son ! Il a une oreille phénoménale, et en plus il a abordé les morceaux avec un regard neuf, sans a priori, alors que nous on avait un peu la tête dans le guidon. Il a apporté le recul nécessaire au mix de cet album. Et son style inimitable de mix.
Tu parlais de L’école du Micro d’Argent, vous avez sorti hier “Notre Dame Veille”, qui rappelle “Marseille la nuit” avec cette phrase justement. Ce morceau a suscité beaucoup de commentaires positifs sur les réseaux sociaux, célébrant le retour aux sonorités et aux paroles de l’époque L’école du Micro d’Argent, Taxi, Où je vis… C’est quelques chose que vous avez pensé, recherché ?
C’était pas vraiment recherché. Moi j’ai toujours été pour ce type de son. C’est un peu mon influence dans le groupe. Après c’est vrai que le rap a évolué, et à un moment donné on a exploré d’autres univers. Les gens nous ont plus ou moins suivi sur ces explorations. Mais comme tu le dis, avec des morceaux comme “Notre Dame Veille”, on retrouve une partie de notre public qui est resté très attaché à ce type de morceaux. Tant au niveau du son, de la compo ou de l’écriture. Un certain public qui nous avait peut-être un peu perdu de vue, quand on était partis explorer d’autres types de musique ou d’écriture. Et on a de très bons retours sur ce genre de titres parce que les gens retrouvent un peu le IAM de L’école du Micro d’Argent.
D’ailleurs les étendards japonais que l’on peut retrouver sur la pochette, et les choix graphiques qui ont été effectués rappellent aussi L’école du Micro d’Argent.
Ça s’est décidé vraiment à la fin. La pochette, ainsi que le titre. Quand on compose un album, on ne se pose pas du tout la question du concept, c’est vraiment un truc qu’on a fait à la dernière minute. On s’est faits engueuler par le label parce qu’on ne rendait pas le titre et la pochette assez vite. On a failli mettre tout le monde à la bourre. Et en fait c’est en écoutant l’album et en le faisant écouter, avec des morceaux comme “Benkei et minamoto” ou “Sombre manoeuvre”, qu’on a retrouvé les instruments et l’influence asiatiques qu’on retrouvait dans certains graphismes et titres d’IAM. On peut même remonter jusqu’à Ombre est lumière.
‘Voir une galette, et surtout un vinyle, avec écrit “IAM” et “Arts Martiens” aux côtés du logo Def Jam, c’est juste un rêve qui se réalise.’
Le titre on l’a trouvé au dernier moment. Et effectivement, ça renoue avec une imagerie “IAM” qu’on avait peut-être laissée de côté à un moment donné, mais qui est toujours présente sur nos morceaux, y compris sur Saison 5 comme “WW”, ou “Le style de l’homme libre”. On a toujours gardé cette influence, et sur Arts Martiens, c’est peut-être une influence plus présente, plus prédominante.
Comment gère-t-on l’après L’école du Micro d’Argent, quand on sait que peu de groupes ont survécu à un succès pareil ?
Il faut le gérer humainement et artistiquement en tant que groupe. Nous ce qu’on a toujours évité dans notre carrière, c’est de refaire le même album, de se répéter. C’est pour ça que quand on a fait un gros hit avec “Je dans le mia”, on a pas fait “Le retour du mia”. Pour nous c’était un moment, une époque, et on a pas voulu reprendre cette recette pour enchaîner les tubes. De même que quand L’école du Micro d’Argent a connu le succès qu’on connaît, on s’est dit qu’on n’allait pas se répéter sur Revoir un printemps et Saison 5. On voulait essayer autre chose, et on ne voulait pas que les gens disent qu’on refaisait la même chose. C’était notre style à l’époque, le groupe IAM est un groupe qui se remet beaucoup en question, et même s’il y a des tendances et des influences qu’on retrouve tout au long des albums, on est un groupe. Il y a des individualités, des goûts, des désirs, des choix… Ce qui est important, quand on est un groupe et qu’on a du succès, c’est de garder les pieds sur terre. Il faut se dire que les disques d’or on les emmènera pas au paradis.
Et puis il faut se renouveler à chaque album. Quand on aborde un album, c’est un peu comme si on repartait de zéro. Le Hip Hop évolue, il faut tenir compte de ça. On ne peut pas toujours s’enfermer dans un style. Donc on a évolué, on continue à évoluer. Le meilleur album d’IAM sera le prochain !
Vous êtes la première signature de Def Jam France, comment vous sentez-vous au sein de ce label prestigieux ?
On est super fiers ! D’autant qu’on connaît l’histoire de ce label. On est chez Def Jam, mais c’est Def Jam Canal Historique. Def Jam, au début, c’est le label de rap mythique et mythologique qu’on connaît. Mais depuis ces dernières années, depuis que Def Jam Monde et Def Jam US ont été revendus, ils font un peu tout et n’importe quoi. Y’a de la variet’, y’a du rock. On ne valide pas tout ce qui sort sur Def Jam actuellement. Def Jam France par contre, a gardé une identité 100% rap. Y’a les Psy4 dessus, y’a Disiz aussi, et d’autres artistes qui sont signés sur ce label. Et forcément, pour quelqu’un qui connaît l’histoire de ce label, voir une galette, et surtout un vinyle, avec écrit “IAM” et “Arts Martiens” aux côtés du logo Def Jam, c’est juste un rêve qui se réalise.
Lire la 2ème partie de l’interview.
Arts Martiens : disponible depuis le 22 avril. iTunes / Deezer
Lire aussi la bonne chronique d’Arts Martiens de nos confrères du Rap en France.
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