10 Bons Sons US en février 2023

Ankylosé par les fêtes, l’univers du rap était relativement calme en tout début d’année. L’atmosphère romantique du mois de février s’est avérée le terrain idéal pour que fleurisse enfin la musique. S’il n’y a décidément plus de saisons, nous avons quand même défriché, pour vous, dix morceaux qui valaient le détour.

Payroll Giovanni – Crib in the woods

Et voici un nouvel album pour le très constant Payroll Giovanni, teasé le mois dernier avec l’excellent « Balcony Thoughts ». Sur un court sample de clavier qui sent Miami Vice et les années 80, le rappeur de Detroit déroule un gros couplet bien paranoïaque où il est question de se faire discret sans pour autant délaisser les blings-blings. Le delivery est soutenu, convaincu. Payroll célèbre une réussite qui passe par le mental avant de se matérialiser dans le monde, tout en étant très précautionneux, conscient que tout peut disparaître du jour au lendemain par un mauvais choix ou un évènement extérieur. « Had to disappear from certain shit, these niggas be weird ». – Jérémy

Shy Glizzy feat. Youngboy NBA – Fools fall n love (prod. Buddah Bless)

En voilà une vraie confrontation de marathoniens. Shy Glizzy invite le tout aussi productif Youngboy NBA sur son dernier album pour un étonnant morceau de Saint-Valentin. Glizzy machônne ses mots sur un couplet en pure prolongation du refrain, se vante de ses conquêtes et s’auto-complimente par leur biais. Tout un programme. L’arrivée de son collègue est chaotique, à son image, avec son utilisation de l’auto-tune quelque peu bruitiste, ses intonations poussées et sa malignité. Peu avare, le natif de Bâton-Rouge distribue même des billets de 100 au gosse de son rencard. Glizzy and Youngboy NBA are for the childrens. – Jérémy

Bishop Nehru – Titanium Clocks

Des années que j’attends qu’il explose tout, à échelle nationale et internationale. Mais hélas, il semblerait que Bishop prenne le même chemin que certains de ses comparases comme Dillon Cooper ou Chester Watson. C’est à dire une belle petite communauté de fidèles, une certaine notoriété en Europe et plusieurs succès d’estime très précieux. Mais bon à défaut d’avoir le rayonnement d’un Joey Bada$$, Bishop Nehru continue son petit bonhomme de chemin et distille ici et là des bons morceaux, des bonnes énergies et des belles réflexions. D’ailleurs je vous recommande d’écouter son dernier opus en date, Nehruvian Tuesdays : Volume 3 qui contient pas mal de jolies choses. – Clément

Tha God Fahim – Man Of Steel

Un nouveau projet du truculent Tha God Fahim vient tout juste de sortir, un mois à peine après Chess Moves, son projet collaboratif avec NicoJP. Intitulé Iron Bull et produit par des jolies noms comme Eyeree et Nicholas Craven, le projet contient 9 morceaux et se veut probablement plus comme un EP ou mixtape qu’un album à part entière. On retrouve donc notre protagoniste Tha God Fahim accompagné de lascars que j’apprécie tout autant ; j’ai nommé Mach-Hommy et Your Old Droog. Le projet s’écoute d’une traite, « all quality beats » comme disent les ricains. Mention spéciale au morceau introductif et son fameux sample de Chico Hamilton (« T’es comme une bougie qu’on a oublié d’éteindre dans une chambre vide »…). Bref, une très bonne sortie de plus à rajouter à la collection du emcee d’Atlanta. – Clément

Sada Baby – Casada Jr (Prod. MIA JayC)

Cela faisait un moment que l’on n’avait pas entendu le trublion de Detroit sur un long format solo. Avec Shonuff, Sada revient plus armé et énervé que jamais. L’heure que durent les 20 morceaux passe à une vitesse folle, et les lignes sauvages du barbu du Michigan sont d’une efficacité redoutable. La très grande rareté d’invités pouvant apporter un contrepoids à ses couplets au rythme si particulier, faits d’une montée en intensité, renforce l’atmosphère infernale du disque. Alors certes, on triche un peu en vous mettant le clip de « Casada Jr. », sorti le 31 janvier, mais la musique de Sada vaut la peine d’être écoutée en vidéo. Et de toute façon, on vous recommande le reste. – Xavier

Ankhlejohn & Look Damien! – Family Trauma

S’il a pu échapper aux fatwas de l’ayatollah Khomeiny, c’est surtout que ce dernier a disparu avant qu’Ankhlejohn ne naisse. Ce n’est pas faute d’avoir multiplié les versets sataniques au cours d’une discographie longue comme le bras, où l’excellence est le fil rouge, tant sur des beats drill que sur des boucles plus chantantes, telles que celles de Look Damien! sur une grande partie de cet excellent The Dead don’t die, ou encore sur des instrumentales plus hybrides, comme ce « Family Trauma » qui conclut une nouvelle sortie très solide pour Big Lordy. – Xavier

Skyzoo & The Other Guys – 100 To One

Si la constance avait un visage, celui de Skyzoo n’en différerait pas de beaucoup. Avec The Mind of a Saint, Skyzoo célèbre la dernière saison de Snowfall et la fin des aventures macabres de Franklin Saint. Entièrement produit par The Other Guys, l’album est encore un exemple de consistance, de bonne rime et de sagesse. Les cuivres des producteurs apportent une richesse musicale bienvenue, qui s’illustre notamment sur ce « 100 to one », morceau fleuve qui retrace le parcours du anti-héros de South Central. – Xavier

Rome Streetz & Big Ghost LTD – Pz N Qz (feat. Method Man)

En joignant leurs forces, Rome Streetz et Big Ghost LTD nous présentent un disque que l’on était en droit d’attendre. Les deux hommes se sont croisés par le passé et n’ont pas caché leur volonté de concocter quelque chose dans l’arrière boutique. Le rappeur New-Yorkais semble particulièrement à l’aise dans les disques mis en musique par un producteur exclusif, et l’esthétique poussiéreuse du blogueur fantomatique ne pouvait rêver meilleur compagnon. Mais les deux hommes ont décidé de mettre les petits plats dans les grands avec un invité particulièrement plébiscité : l’illustre Method Man. Un clavier entêtant, deux (2) notes de basse et une boucle de batterie infatigable plus loin, la voix criarde du jeunot en deuxième partie de trentaine s’accorde parfaitement à celle, abrasive, de son ainé. – Wilhelm

Madlib & Meyhem Lauren & DJ Muggs – Fresh Out the Water

Autre habitué des disques collaboratifs, Meyhem Lauren semble avoir conclu l’exploitation (active) de son album commun avec Daringer en mettant en image « Airplane Mode » courant février. Visiblement pas en reste, il a rejoint DJ Muggs, un de ses acolytes de longue date. Mais, pariant sur la force du nombre, les deux loustics officient cette fois aux côtés de Madlib, excusez du peu. Difficile de dire si l’opulence est plus perceptible dans le titre de l’album à venir, Champagne for Breakfast, ou du casting en lui-même. Seul bémol à noter, toutefois, les huitres ingurgitées sur le tournage du clip étaient sans aucun doute possible dégueulasses. – Wilhelm

Lil Wayne – Kant Nobody (prod. Avenue & Swizz Beat)

C’est en revisitant « Niggaz Done Started Something » que Lil Wayne tient à remettre les pendules à l’heure, à rappeler qu’il est le meilleur rappeur de l’histoire. La rythmique un peu plus rapide et moderne que l’originale et le « What » samplé du regretté DMX puent la patte de Swizz Beatz et Petit Wayne n’a plus qu’à dérouler. Il change de flow et de placements quand bon lui semble avec une aisance assez délectable. Du début à la fin de son couplet fleuve, on sent le plaisir qui envahit cet éternel enfant dès qu’il passe derrière un micro. On aura rarement vu un hommage aussi festif. – Wilhelm

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