10 Bons Sons en octobre 2018

Le rap a évolué, nos goûts aussi parfois, la composition de l’équipe de rédaction également au fil des ans, ainsi que celle en charge de sélectionner les 10 Bons Sons dans la catégorie rap français tous les mois. Ce qui n’a jamais changé, c’est la cadence et la régularité dans la parution de chacune de nos rétrospectives mensuelles. Voici donc l’édition numéro 80, 79 mois après la première du nom.

Le 26 octobre : Billy Bats & J.E – Ki (Prod. Grinsound)

A la manière de Goku et Vegeta, les rappeurs Billy Bats (lire notre interview 10 Bons Sons) et J.E (Barbu Gang) ont fusionné le temps d’un 7 titres (comme les 7 boules de cristal, autre référence à Dragon Ball Z) intitulé Gogeta. Si les deux MC’s ne sont pas pour ainsi dire de la même génération, ils croisent le micro au sein du label / studio toulousain CDXX depuis quelques années déjà, et ont en commun une technique à toute épreuve et des flows tout-terrains capable de terrasser tous types de supports instrumentaux. Ce n’est donc pas une surprise s’il ressort de ce projet une alchimie évidente, et leur fusion ne pouvait qu’augmenter leur ki, comme sur le morceau du même nom. Ce titre, produit par Grinsound, (qui signe avec Tortuga, autre beatmaker du label, l’intégralité des instrus de Gogeta) constitue un des sommets du projet, en attendant le premier album solo de J.E programmé pour le 7 janvier. – Olivier

Le 19 octobre : Joe Lucazz & Pandemik Muzik – La légende de Battling Siki

2018 est définitivement l’année de Joe Lucazz. Après No Name 2.0 et Paris Dernière, le plus américain des rappeurs hexagonaux en est à son troisième opus de l’année avec Carbone 14. Et le format d’association avec un beatmaker unique semble convenir à Joe, puisqu’après Paris Dernière qui était déjà entièrement produit par Char, les 9 productions de Carbone 14 sont toutes signées Pandemik Muzik (lire notre récente interview). Déjà producteur majoritaire des deux volumes de No Name, l’alchimie entre les deux entités était déjà connue. Et cela se ressent d’autant plus quand le projet est centré autour d’un thème comme c’est le cas ici. Sur des mélodies très imprégnées de jazz, les textes sont truffés de références aux cultures africaines et afro-américaines. Un bon exemple est « La légende de Battling Siki », morceau que nous avons choisi d’extraire, en référence au boxeur franco-sénégalais, premier boxeur africain à devenir champion du monde. – Xavier

Le 26 octobre : Taipan – Les cassos du futur

 Le phénomènal Taipan vient, une nouvelle fois, d’étaler son talent et son inimitable perspicacité ce mois-ci. Une troisième fulgurance (EP) en une année et demie, sobrement intitulé P.A.N. 2 qui vient clore tout simplement une des trilogies les plus qualitatives du rap français. La tracklist pourrait se suffire à elle-même tant les thèmes sont bien trouvés, aussi amusants que cyniques. Mais le contenu des titres est assez exceptionnel, provoquant sourires, rires, et dépressions à la fois. Craignant d’être « mal interprété comme Jamel qui fait la ola » ou promettant de « stériliser le public de Cyril Hanouna », l’ex-membre de Bomayé s’en prend aux cassos du futur avec un sarcasme bienvenu. « Fiché S » narrant le départ d’un jeune homme pour le Jihad ou « Mal au pantalon » revenant en détails sur sa découverte de la sexualité à la manière d’un Seth Guex sur « Bistouflex » sont des titres incontournables de 2018. – Antoine

Le 11 octobre : Coelho – Santa Maria (Prod. Be Dar et Dusty Goldstein)

En ce mois d’octobre, nous avons eu l’occasion de découvrir le nouveau projet de Coelho, MC en provenance de Nantes. Son LP, qui porte le nom de Vanités, souffle comme un vent de fraicheur sur la scène actuelle. Force est de constater que ce dernier nous a particulièrement séduits. Nous avons décidé de mettre en lumière le titre « Santa Maria », véritable révélateur du talent de ce jeune rappeur et de son profil atypique. Le texte est soigné, le flow maitrisé, l’interprétation spontanée et viscérale. Vanités vient de sortir sous le label Mezoued Records qui collabore notamment avec Sniper et Vald. Coelho assure d’ailleurs les premières parties du rappeur d’Aulnay-sous-Bois sur sa tournée actuelle (XEU Tour). De bon augure pour le futur. – Jordi

Le 12 octobre : Heuss L’Enfoiré feat. Vald – L’addition 

Lorsqu’un potentiel tube de l’été sort en octobre, on peut parler d’une occasion manquée. Tous les ingrédients étaient pourtant réunis car le featuring Heuss L’Enfoiré et Vald a quelque chose d’envoûtant : des paroles légères, une instrumentale mélodieuse jouée à la guitare, un clip tourné à La Réunion. En clair, tout ce qu’il fallait pour accompagner les mojitos et la chaleur. A l’approche de l’hiver et alors que les feuilles mortes se ramassent à la pelle, on se consolera avec « L’addition », belle combinaison entre les deux rappeurs qui nous rappelle que l’été est déjà loin. – Costa

Le  22 octobre : Kery James – J’rap encore (Prod. Wealstarr)

Kery James rappe encore. Celui qui a commencé en 1991 sur l’album de MC Solaar, qui a eu une première carrière avec Ideal J, ponctuée en 1998 par le classique Le combat continue, sort le 16 novembre 2018 son septième album solo. Et à l’écoute de ce titre, on comprend qu’il rappe encore. On pouvait pourtant être inquiet suite au premier extrait « PDM » qui n’avait rien d’innovant, dans la forme et surtout dans le fond. Et comme nous, il a dû se poser cette question : « pourquoi rappe-t-il encore ? ». Surement parce qu’il a encore des choses à dire, à dénoncer (le système, les violences policières, l’Éducation Nationale, l’hégémonie de Skyrock). Et n’en déplaise à ceux qui considèrent que la forme doit prendre le pas sur le fond, la zumba n’est pas la version finale du rap. « Qui prétend faire du rap sans prendre position ? » Sûr de ses forces, c’est un Kery James qui assume ce qu’il est, un rappeur conscient, qui a des classiques en pagaille et qui s’aventure au théâtre, au cinéma. Il rappait dans les nineties, a annoncé plusieurs fois sa retraite, mais il rappe encore. A l’image de Disiz, de Rim’K, de Youssoupha, de Joe Lucazz ou de Flynt, Kery prouve que les quadras ont encore des choses à dire et qu’ils s’adaptent plus ou moins à l’ère du temps (sans forcément céder au fantasme de chantonner à tout prix). Sur une prod entêtante  de Wealstarr, avec lequel il collabore depuis A l’ombre du show business, il lâche un morceau sans refrain avec une variation de flow à la fin qui montre que Kery James est toujours dans le coup et qu’il faut mettre du respect sur son nom. N’en déplaise à certains… Et si tu kiffes pas… – Chafik

Le 11 octobre : Mothas La Mascarade – Michel Michel (Freestyle)

La dernière fois qu’on a entendu parler de Mothas La Mascarade c’était en 2015 pour un inédit intitulé « 10.52 ». Un morceau volant qui ponctuait trois années de silence depuis son premier projet Paris South Playa sorti en 2012. C’est la même époque bénie des projets comme 22h-6h de Walter & Lomepal (qu’on évoquait récemment autour du projet de Walter) ou encore du troisième Grünt spécial BPM… Une époque révolue mais qui laisse bien des souvenirs. Retour en 2018 donc, avec le freestyle « Michel Michel » qui annonce un retour aux affaires (sans mauvais jeux de mots) de l’homme que l’on nomme La Mascarade. Sur une face B 100% boom bap, et avec François l’Embrouille comme intro et pont, Mothas évoque le chemin parcouru, les années passées et tease sur le futur, toujours avec la même verve qu’il y a des années. « Y’a cinq ans j’étais passionné aujourd’hui j’le suis toujours. » – Clément

Le 19 octobre : ATK – Comme on a dit (Prod. Ajax) 

C’est inespéré, et pourtant réel. Le crew qui prenait du poids comme un gars obèse en 1998 est de retour, au complet, deux décennies après, avec le premier (!) clip de son histoire ! Bel hommage au regretté Fredy K, pour qui ATK a mis du cœur et des rimes, célébrant par la même occasion l’anniversaire du classique Heptagone. Déterminés et encadrés par Loko, chacun a pris le temps de se retrouver et de composer au mieux pour que ce come back soit une réussite. Mention pour le couplet de Cyanure, enchaînant les noms de titres et d’albums du crew, solos ou en groupe, pour former un couplet cohérent avec le thème. Promesse tenue pour FK et pour les fans, avec un nouvel album prévu le 7 décembre et deux concerts au New Morning dans la foulée. Avoue que tu kiffes ! – Antoine

Le 26 octobre : Siboy – Gout cerise (Prod. FirstMan & Yung G)

Siboy est un personnage à part. Rappeur hardcore, qui n’hésite jamais à faire dans le sale (« Suce ma capote gout cerise »), ce fan d’Alain Souchon, qui aime chanter, nous montre comme toujours sa part de d’humanité (« devant gros culs et marmots, j’ai des boums au cœur »). Cette association de sauvagerie et de finesse est la marque de fabrique du rappeur du 92I. En 2 minutes 30 et 2 petits couplets, Siboy, tout en testostérone, montre qu’il est dans la lignée de son très bon premier album, Spécial. Si certaines références du morceau sont grillées (La casa de papel, Mesrine), d’autres sont plus inattendues (« Après ta mort j’écoute ‘Alors on danse’ »). Comment ne pas dire un dernier mot du clip, truffé de trouvailles esthétiques, des blocks qui bougent en cadence à 404 Billy apparaissant en noir et blanc, sans oublier un Siboy décapité. Lourd. – Chafik

Le 26 octobre : Flynt – A partir d’aujourd’hui (Prod. A2H)

Notre rédaction se divise en deux catégories : ceux qui pensent que le troisième album de Flynt marque une franche rupture avec les deux premiers, et ceux qui sont d’avis qu’il se place dans la directe continuité de J’éclaire ma ville et Itinéraire Bis, malgré les sonorités trap et l’évolution dans le flow. Vous l’aurez compris, l’auteur de ces lignes fait partie du deuxième groupe, qui considère que la mise à jour réussie dans le flow, la consistance textuelle intacte, et un propos cohérent avec les précédents opus qui tient compte des années en plus au compteur, sont autant d’atouts qui font de ce disque une réussite. Mais s’il y a une chose qui tranche véritablement, c’est que sur Ça va bien s’passer, Flynt se livre davantage. En effet, le rappeur parisien ose à plusieurs reprises regarder la crise de la quarantaine dans les yeux, sans sourciller, comme sur « A partir d’aujourd’hui », chanson de rupture aussi réussie que l’était la déclaration d’amour « J’ai trouvé ma place » sur J’éclaire ma ville. La justesse dans le propos suggère que le MC a forcément puisé, au moins pour partie, dans son vécu, pour un morceau qui devrait parler aux concernés, au même titre que « Page blanche, nuits roses ». – Olivier

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Un commentaire

  • Bonjour,

    Je suis beatmaker sous le nom « La Vilerie » et je sort un projet rap indé (MAUVAIS GOÛT) avec plusieurs MCs français:
    Poochka, Evil Venom, Bitiop,Sad Vicious, Stick, Zicocap, CaravaneProd, Belek, LesRodeurs, Les Masters de l’Univers.
    Le projet sort le 13 septembre 2019 dans plusieurs plateformes digital (deezer, spotify,…), sur mon bandcamp, sur youtube et en CD que je vend à 5€ pièce.

    En gros je cherche des contactes pour faire parler du projet et le diffuser au maximum.
    En espèrent que ça vous intéresse!!

    Gilen Bousquet « La Vilerie »

    https://www.youtube.com/watch?v=ww9x-CUt_jk

    https://www.facebook.com/GilenLaVilerie

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