10 Bons Sons sur l’Islam

Alors que le Ramadan 2024 bat son plein, nous avons profité de l’occasion pour nous intéresser aux différents morceaux sur l’Islam. En effet, de nombreux rappeurs ont mis en musique leur foi, en évoquant leur religion, leur conversion, les rites, spécificités et problématiques de leur culte, ce que la pratique religieuse leur apporte.

Dans cette sélection de dix morceaux, nous voyagerons des années 1990 à nos jours, de Marseille au Havre, de Paris à Strasbourg, à travers des professions de foi, des storytellings, des textes sans concession, de l’introspection, de la remise en question et mais aussi de l’humour. Bismillah !

Akhenaton – Dirigé vers l’Est (Métèque et Mat, 1995)

Si Akhenaton s’était distingué en 1993 sur Ombre est lumière en solo avec « Le Mia » et l’émouvant « Une femme seule », le double CD comportait son lot de morceaux aux références spirituelles, religieuses. Assez logiquement, il a eu l’opportunité de réaliser son propre album Métèque et Mat en 1995. Puisant dans les différentes facettes de sa personnalité, Philippe Fragione livre et produit 19 titres personnels, dans lesquels il met à l’honneur ses origines napolitaines, sa cité phocéenne, ses influences new-yorkaises, ses introspections ainsi que sa foi. Dans « Dirigé vers l’Est », Chill aborde sa conversion à l’Islam, cette renaissance qui lui a permis de débuter une nouvelle vie. Se considérant dès lors comme « la chenille qui devient un sphinx », le jeune père, semble laisser derrière lui, sans regret, celui qui « a du fêter ses vingt ans avec trois bouteilles de Valstar ». Le texte mystique se veut ambitieux et montre l’attrait d’Akhenaton, ou plutôt d’Abd Al-Hakim (le serviteur du Sage), pour la religion islamique, lui qui ne semble pas s’être contenté de prononcer la profession de foi pour entrer dans la communauté musulmane, mais s’est bel et bien instruit, en étudiant les livres sacrés. Le titre renvoie à la principale ville sainte de l’Islam, La Mecque, vers laquelle prient et sont enterrés les musulmans. Le format du morceau est intéressant : à une époque où les trois couplets étaient « obligatoires », il s’affranchit de cette norme avec deux couplets de 24 mesures (lui qui toute sa carrière a eu bien du mal à se contenter de seize mesures). Ajoutons que le refrain comporte notamment des scratches, réalisés non pas par Kheops, mais par Cut Killer et fait allusion à Jésus, appelé Aïssa en Islam, ainsi qu’à la fin des temps.

A écouter : Akhenaton – « Sol Invictus » et « Nuits à Médine »; Kery James – « 28 décembre 77 »

NAP – La fin du monde (La fin du monde, 1998)

Dans notre dossier sur l’exceptionnelle année 1998, sur les vingt disques retenus, seuls deux ne proviennent pas de l’axe Paris / Marseille : Résurrection des Toulousains de KDD et La Fin du Monde de NAP. Les 18 titres des Strasbourgeois ont marqué le public averti de l’époque au point que le vinyle soit devenu une pièce de choix chez les collectionneurs. L’introduction de l’album annonce la couleur en citant la sourate 84 du Coran, « La Déchirure » qui fait allusion à la fin des temps, transition parfaite pour le premier morceau, morceau éponyme d’ailleurs. Dans le titre « La fin du monde », nous n’avons pas affaire au groupe entier mais juste à Abd Al Malik en solo, lui qui semble en être le leader naturel. Il narre ce qui correspond à l’apocalypse pour les croyants musulmans, à un film au scénario catastrophe pour les autres. Les signes annonciateurs font froid dans le dos : débauche, guerre, inversion des valeurs, catastrophes naturelles, famine, venue sur Terre de l’Antéchrist et donc le recul de la religion. L’interprétation est d’une grande justesse et cette retranscription de la fin des temps d’après le texte coranique se veut assez précise (elle se conclut par l’évocation d’Azrafil qui signale le Jour du Jugement dernier pour les muslims). Abd Al Malik (le serviteur de Dieu en arabe) effectue une sorte de rappel afin de sensibiliser son auditoire aux maux de notre société. Son propos se veut solennel, bien aidé par la prod de Bilal, le sample de Mozart « Dies Irae » et le refrain qui amènent un côté épique au morceau. Dans le reste de l’album, le groupe du Neuhof, quartier strasbourgeois ravagé par la came, le sida et la violence, a disséminé des allusions à l’islam, qui a très certainement été un refuge pour eux.

A écouter : La Cliqua – « Un dernier jour sur terre »

K-Rhyme Le Roi – La Qibla (Comme un aimant, 2000)

Quand on évoque l’âge d’or du rap marseillais, on oublie souvent de citer K-Rhyme Le Roi, bien qu’il ait été présent sur Taxi, sur les Chroniques de Mars (« Démon », excellent storytelling sous-côté), sur Opération Freestyle, et surtout en compagnie de Freeman sur L’Palais de Justice (dans lequel il a notamment osé aborder la guerre civile algérienne de la décennie noire dans le titre « Bladi », avec Khaled). L’ancien membre du Soul Swing se retrouve néanmoins et assez logiquement au casting de la bande originale du film Comme un Aimant, lui qui est un représentant du centre-ville, de Belsunce, un mec de la rue. Dans son morceau solo intitulé « La Qibla », le MC Arabica a le regard dirigé vers l’Est, en direction de la pierre noire de la Kabaa, provenant du paradis d’après les croyances musulmanes. Ce qui marque à l’écoute, c’est la relative complexité du texte, les tournures alambiquées ainsi que quelques références pointues (Hamza, Dhû-l-Qarnayn), montrant que K-Rhyme Le Roi maîtrise des fondements coraniques (détail qui n’en est pas, ne commence-t-il pas son morceau en disant « Bismillah »?). Il en profite aussi pour mettre en avant sa technique, en enchaînant ci et là allitérations et assonances. Bien que réalisée par Akhenaton et Bruno Coulais, la prod ne semble pas être un cadeau tant elle semble difficile à chevaucher (et K-Rhyme Le Roi ne s’en sort pas trop mal !) On ne peut pas dire que le titre ait eu du succès, coincé il est vrai dans la tracklist entre Isaac Hayes et Talib Kweli et éclipsé par des morceaux devenus des classiques dès la sortie de l’album (« Comme un aimant » de Chiens de Paille, « J’voulais dire » d’Akhenaton et surtout « Belsunce Breakdown » de Bouga).

A écouter : Freeman – « La terre n’est pas mon chez moi »

INTERLUDE 1 : Djamil le Shlag

L’époque du Ramadan en été…

Ness & Cité – Bismillah (Ghetto Moudjahidin, 2001)

Proof et Sals’a ont réussi à mettre leur ville du Havre sur la carte, malgré un premier album intitulé Ghetto Moudjahidin, sorti à la Saint-Valentin, quelques mois avant les attentats du 11 septembre, l’année où les sorties rap français sont de très grande qualité (Salif, FF, Oxmo, Tandem, Rohff, AKH, Saïan, Kery, notamment) et en indépendance totale. Dans le morceau « Bismillah », ils se permettent d’ailleurs d’exprimer le fond de leurs pensées, sans ambages. Ils ne sont pas tendres envers l’église catholique, tiennent des propos pas très gay friendly (« Aucune situation pour ceux qui demandent l’aumône et sous mes yeux des manifs monstres pour normaliser l’homo ») et critiquent l’islamophobie grandissante, même si ce n’est rien en comparaison avec le monde post attentat contre les tours jumelles (Le Pen n’a-t-il pas atteint pour la première fois le second tour des Présidentielles en avril 2002, avant que cela ne devienne une triste habitude avec sa fille ?). Croyants et pratiquants (la prière notamment : « Chaque jour mon front collé sur le sol »), Sals’a et Proof ne privilégient pas le fond sur la forme puisque leur sens de la formule fait mouche (« Tant de preuves, pourtant l’État nie l’Au-Delà, les gens sont comme ce mec aveugle qui croit que ce qu’il voit »), l’instru est punchy et attribuons une mention spéciale au refrain entêtant, avec ses scratches de choix réalisés par DJ Yahya. En dépit de contre-indication religieuse, Ness & Cité a continué de mettre sa foi en musique à travers leur label Dîn Records, qui ne laisse pas de doute quant à leur conviction religieuse (Dîn étant l’équivalent en langue arabe de religion) et avec un minaret sur le logo.

A écouter : Médine – « Don’t Panik »

Chicken Boubou – Pas 2 porc (2002)

Si depuis le milieu des années 2010, les codes du rap français ont changé, permettant aux rappeurs de s’affranchir de certaines règles, il n’en était pas de même à la fin des nineties et au début de la décennie 2000. Parmi toutes les « restrictions » que s’imposait le game, il n’était pas bienvenu de faire preuve d’humour dans ses textes, en dépit de quelques exemples (« J’ai pas de face » d’Akhenaton ou « Le Fainéant » de Faf Larage). L’arrivée d’un comique, au nom de Chicken Boubou, qui faisait du rap en parodiant « Hardcore », un classique d’Ideal J dans le morceau « Pas de porc » a fait parler dans le milieu (le titre était d’ailleurs présent dans le CD sampler de Groove N°55). Alors que Monsieur Tout le monde n’a pas forcément en tête les cinq piliers de l’Islam (Profession de foi, Prière, Ramadan, Aumône, Pèlerinage à La Mecque), il est notoire que les musulmans de mangent pas de porc, le Coran l’interdisant, cette viande étant donc haram. Sur quatre minutes et accompagné de Teddy Corona s’il vous plaît, Chicken Boubou martèle à quel point il est inconcevable pour un muslim de consommer jambon, cochon, lardon, rillettes et autre mortadelle (il aurait pu ajouter la gélatine de porc dans les bonbons !). Les passages hilarants se succèdent, le refrain colle avec l’original et on est impressionné par le nombre de phases bien senties (entre autres : « Si par malheur le porc prenait forme humaine, il tiendrait les propos de ce bâtard de Le Pen »). Chicken Boubou s’est attaché à mettre un peu d’humour dans le rap français des années 2000 qui en manquait cruellement en reprenant notamment IAM (« Independenza », devient « Ramène les pizzas ») ou encore Soprano (« Halla Halla »  devient « Hallal Hallal »).

A écouter : Ideal J – « Hardcore »

Abd Al Malik – 12 Septembre 2001 (Gibraltar, 2006)

Alors que les attentas du 11 septembre 2001 ont empêché le groupe The Coup de sortir leur album Party Music avec sa pochette prémonitoire, Jay Z, qui sortait ce même jour Blueprint, n’a pas été embarrassé lui par Ben Laden. Mais le monde qui se présente dès lors aux musulmans ne sera plus comme avant : l’Islam se retrouvera alors au centre de « l’Axe du Mal » pour Bush et consorts, les États-Unis interviendront en Afghanistan contre les Talibans, l’Irak (et Saddam Hussein) sera accusé de détenir des armes de destruction massive et subira une nouvelle guerre du Golfe tandis que les musulmans de France pâtiraient aussi de ce contexte. Dans l’inclassable et non moins excellent album Gibraltar, Abd Al Malik aborde dans le morceau « 12 septembre 2001 » ce monde d’après. Un monde où la stigmatisation serait courante, où l’amalgame se ferait entre terroristes et musulmans, un monde où la radicalisation de quelques-uns serait payée par le plus grand nombre, où les attentats se multiplient en Occident, mais surtout dans le monde arabo-musulman, un monde où l’on mélange la politique avec la foi. Dans ce morceau hors format (six couplets de dix mesures avec une prod évolutive et un refrain egotripé), l’auteur converti à l’Islam se revendique du Coran (sans zèle), de Deleuze, Derrida, Debray, mais il déplore surtout, à l’image d’un Amin Maalouf, que nos identités deviennent parfois meurtrières. Il avait d’ailleurs publié en 2004 son premier ouvrage intitulé Qu’Allah bénisse la France, humaniste à souhait, qu’il adaptera plus tard au cinéma. Bon client pour les médias, il sera invité régulièrement sur les plateaux télé, en tant que rappeur, banlieusard, noir, musulman, au point d’être critiqué par ses communautés, pour de plus ou moins bonnes raisons.

A écouter : Médine – « 11 septembre » ; Akhenaton – « Hier matin », Sako – « Ce matin » et Dosseh – « Djamel »

INTERLUDE 2 : Djamil Le Shlag

Le Ramadan, un mois vraiment incroyable!

Diam’s – Lili (SOS, 2009)

La trajectoire de Diam’s a été inédite dans le rap français, de l’underground des années 90 et de ses mixtapes (Sachons dire non) aux disque d’or et de platine, en passant par des dizaines de featurings avec tout le game, une Victoire de la Musique en 2004, une tournée des Zéniths en 2007, au point qu’elle soit considérée comme LA rappeuse de France. Sauf que toute médaille a son revers. Elle qui n’était pas prédestinée à devenir une star du rap, l’icône d’une génération, l’étendard des féministes, un personnage public, a subi de plein fouet cette sur-exposition, d’autant plus au regard de ses problèmes psychologiques (elle a été diagnostiquée bipolaire). S’en suivront en 2008 dépression, tentative de suicide et surtout découverte de l’Islam. Son album SOS, au titre ô combien évocateur, porte le sceau de cette sérénité retrouvée. Comme à son habitude, elle propose une musique très personnelle, susceptible de toucher le plus grand nombre. C’est sûre de ce postulat qu’elle fait le morceau « Lili ». Dans ce piano-voix dont elle a le secret, elle met toute sa plume dans ce texte lourd de sens en racontant de prime abord le malaise d’une adolescente qu’elle ne peut que trop bien comprendre. Isolée, discriminée au point d’être déscolarisée, négligée, malade, incomprise, sa souffrance fait mal à entendre en même temps que l’interprétation se fait du bout des lèvres, comme un aveu qu’on voulait garder pour soi. On se dit que Mélanie n’est pas allée bien loin pour trouver l’inspiration, tant les similitudes avec son parcours cabossé sont nombreuses. C’est à la dernière mesure du morceau que l’on comprend que cette Lili n’est pas une leucémique en stade terminal mais une jeune fille convertie qui porte le voile. Dans ce morceau donc, Diam’s interroge la laïcité qui stigmatise et exclut plus qu’elle ne libère à ses yeux.

A écouter : Freeman feat K-Rhyme Le Roi – « Le voile du silence »; Médine – « Don’t laïk »

Kery James – Constat amer (Dernier MC, 2013)

La Umma correspond à la communauté musulmane du monde entier, par delà les nations. Or, celle-ci ne semble pas à vrai dire si unie que ça et Kery James l’a bien remarqué. Avec son style si caractéristique, moins moraliste que lucide, il ne fait pas dans le spectaculaire (ni punchlines fracassantes ni multisyllabiques) mais dans le morceau de bravoure. Craignant que ce « nous ne soit qu’illusoire », n’hésitant pas à pointer du doigt certains travers des différentes communautés auxquelles il appartient, Alix Mathurin, devenu Ali lors de sa conversion en 2001, dresse un constat amer des banlieusards et des musulmans. Si ces derniers sont souvent diabolisés, dans notre pays notamment, il serait bien hypocrite de les idéaliser d’après lui. N’ose-t-il pas aborder les dissensions qui fracturent l’apparente homogénéité des muslims de France, maghrébins, subsahariens et turcs en tête, ainsi que le complexe de supériorité qu’ils pourraient ressentir à l’égard du Machrek et de l’Extrême Orient ? Kery déplore qu’il s’agit moins souvent d’une opposition nous contre eux que d’un nous contre nous bien plus tabou, qu’avant de se concentrer sur la poutre qu’il y a dans l’œil de l’autre, il vaudrait mieux se concentrer sur celle qu’il y a dans le notre. S’il réclame un besoin de résolution, d’évolution, de révolution, le bilan qu’il tire de la situation de la 2ème France n’est pas glorieux et en cela, on peut saluer le courage de faire cette auto-critique, qui peut certainement lui attirer les foudres de ses congénères, adeptes de l’Islam ou vivant en banlieue. Mais ce morceau n’a pas symbolisé de suicide commercial ou communautaire de Kery James, du fait de sa légitimité à tenir un tel discours, notamment depuis les albums Si c’était à refaire ainsi que Savoir et vivre ensemble, fortement inspirés par la religion musulmane.

A écouter : Le Rat Luciano, Sat, Rohff – « Nous contre eux » ; Relo – « Nous contre nous » ; Kery James – « Elle »

Ali – Salaam (Que la paix soit sur vous, 2015)

Dès sa deuxième trace discographique sur L432, dans le morceau « Les vrais savent », Ali se distinguait par des références religieuses. En compagnie de Booba, il formait le groupe Lunatic, duo contre nature entre le vice et la vertu, chacun traînant son acolyte dans son giron. Il était évident qu’A.L.I. apparaîtrait dans ces 10 Bons Sons sur l’Islam, tant sa musique est imprégnée par sa foi, que ce soit sur Chaos et Harmonie (2005), Le Rassemblement (2010 ; sorti au même moment que Lunatic de Booba, alimentant les rumeurs les plus folles) ou Que la paix soit sur vous (2015). De nombreux morceaux auraient donc pu être choisis pour montrer à quel point Ali accorde une large place à la religion musulmane, à la spiritualité, dans sa vie et dans son rap (ne porte-t-il pas la tabaa sur le front ? Son nom d’artiste n’est-il pas celui du cousin, gendre et disciple du prophète Muhammad ?). Le fil rouge de sa carrière réside certainement dans une recherche de paix, pour lui, pour tous ; ainsi, nous avons opté pour « Salaam » au titre explicite (Paix en arabe). Dès l’introduction, ce mantra est répété, scandé de manière mélodieuse, pour instaurer une ambiance paisible afin de délivrer ses ultimes messages en guise de clôture d’album (son dernier en date d’ailleurs). Ali fait allégeance à Allah et rend compte de sa ligne directrice, face au bien, au mal (« La main peut gifler, je préfère qu’elle caresse »). La suite est intéressante dans le sens où il semble s’adresser non pas seulement aux musulmans, mais aux croyants de toutes les chapelles, quant au dernier couplet, on sent un Ali recherchant l’apaisement (« Priant pour les oppressés et ceux qui n’ont connu que la guerre »). Que la paix soit sur tous.

A écouter aussi : Ali – « Positive énergie »

Médine – Sara (Grand Médine, 2020)

Nous aurions pu aisément mettre dix morceaux de Médine dans cette sélection tant son identité religieuse est omniprésente, dans son label (Dîn records), ses concepts d’albums (11 septembre, Jihad), son imagerie (un boulehya avec un tee-shirt « I’m muslim, don’t panik »), jusqu’à son nom de scène qui n’est autre que son prénom dans la vie et celui d’une ville sainte de l’Islam. De plus, son goût de la provocation lui a permis de faire parler de lui, bien delà des frontières du rap (avec notamment les titres « Don’t Laïk » ou « Bataclan »). Mais il serait trompeur de réduire Médine à un rappeur communautaire ou sulfureux. S’il a ouvert sa musique tout au long de sa carrière, il est resté fidèle à une constante, se pencher sur les zones d’ombre de notre histoire à travers sa série Enfant du destin, donnant voix au chapitre aux oubliés, aux victimes, aux persécutés, en accordant une attention particulière à ses coreligionnaires, palestiniens, birmans et chinois. C’est d’ailleurs ce dernier morceau qui nous intéresse ici, intitulé « Sara », dans lequel nous suivons cette jeune fille Ouïghour, de confession musulmane, ethnie vivant à l’Ouest du territoire chinois. Le pouvoir incarné par Xi Jinping a mis en place une violente politique répressive à l’encontre de cette minorité religieuse et Médine a pris fait et cause pour ses congénères (contrairement à tant de pays arabo-musulmans silencieux face à leur partenaire commercial chinois…). Avec son écriture et son interprétation tranchantes, Médine rend compte du drame vécu par ces turcophones : de la surveillance aux discriminations, des stérilisations aux assassinats, des conversions forcées aux déportations dans les camps de concentration, soit un véritable génocide programmé par l’État chinois. Contrairement aux autres épisodes de la saga Enfant du destin, Sara n’arrive pas à se venger, comme pour souligner le déséquilibre des forces entre cette puissance mondiale et un peuple sans défense.

A voir : Chine, le drame ouïghour

INTERLUDE 3 : DJ Chelou

Et saha ftourkoum bien sûr !

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Un commentaire

  • Très bon travail, mais vous auriez pu citer Mysa avec le titre  » ma communauté » dans l’album enfermé dehors jamais libre.

Commentaires

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