Furax Barbarossa, l’entretien « 10 Bons Sons »

Entre 2012 et 2017, plusieurs interviews de Furax Barbarossa sont parues dans nos colonnes, dans des contextes et des configurations divers, mais toujours reliés à une actualité ou une sortie. Alors qu’il s’apprête à livrer un nouvel album solo, presque huit ans après Testa Nera, nous avons cette fois-ci proposé au rappeur toulousain une interview « 10 Bons Sons », afin de balayer avec lui ses deux décennies d’activité derrière le micro, depuis ses débuts en 2002 avec la Section Marécage à sa signature chez Jardins Noirs, en passant par ses albums collectifs, ses disques en solo, en duo, ainsi que ses amitiés artistiques, son processus créatif et son travail d’écriture pour des clips et des interludes pour d’autres artistes.

1 – Furax Barbarossa, Reda, Sendo, Apa H, Komar & MNC – « Downset » (L’Offensive, 2005)

(rires) Je ne sais pas où tu es allé le chercher celui-là. Il n’est pas extrait d’une compilation Polychrome 7 ? Sale Elite Toulousaine ?

Si (la mixtape L’Offensive de Polychrome 7), et je pense que c’est le seul morceau que tu auras du mal à reconnaître dans cette sélection. Je cherchais un morceau collectif des débuts.

C’est mon premier morceau avec la Sale Elite Toulousaine. Je venais de les rencontrer, on n’était pas encore Polychrome 7. Mais c’était la même clique en vérité. C’est notre premier morceau en commun.

Tu commences à rapper avec la Section Marécage, c’est bien ça ?

Oui, qui n’avaient rien à voir avec Polychrome 7, c’était des mecs de Plaisance (Plaisance du Touch, en banlieue toulousaine, ndlr), les premiers avec qui j’ai fait de la musique en arrivant sur Toulouse. Ils avaient déjà un groupe, et m’ont intégré dedans. Mais ça n’a pas duré longtemps, et ensuite chacun a fait sa route.

Donc plus tard tu rencontres la Sale Elite Toulousaine, avec qui tu formes Polychrome 7.

C’est ça.

Si on regarde tes différents collectifs au fil du temps, de la Sale Elite Toulousaine à Bastard Prod, on se rend compte qu’il y a un tronc commun.

C’est ça, je ne suis pas passé du coq à l’âne, bien que de la Section Marécage à S.E.T. aucun ne soit resté. C’est moi qui ai basculé d’un groupe à un autre en vérité. Et ensuite Polychrome 7 a éclaté et c’est parti en Bastard Prod avec les survivants.

A peu près à la même époque, en 2004, ton premier maxi Crash Test sort. Pour quelqu’un qui a commencé à rapper en 2002, c’est assez rapide, surtout pour l’époque.

Oui mais le projet n’est pas énorme, c’est cinq titres, enregistrés dans un camion. Ça ne m’a pas pris beaucoup de temps. Je commençais à rapper, je voulais voir ce que ça donnait de faire des titres et les mettre sur un support. Pour moi c’était la suite logique. Mais c’est vrai que quand tu calcules, on ne sort pas un CD au bout de deux ans, c’est très tôt. Mais je ne voyais pas ça autrement.

Plus tard il sera disponible en téléchargement gratuit sur le site de Polychrome 7.

Oui mais en 2004, pour ma part, je n’ai pas internet ! A l’époque, je l’avais pressé moi-même, tout seul, avec des graveurs. J’imprimais des ronds autocollants qu’on collait sur le CD, les pochettes… Système D.

Donc il existe ? Des gens ont ce CD ?

Oui, il est sorti en physique.

Il doit coûter cher aujourd’hui.

(rires) Je ne sais pas, vu la qualité du truc ! Celui qui l’achète cher il se fait enfler !

Mais il doit être collector. Quand je vois que tu as re-pressé tes premiers albums Etat des lieux et En bas de l’échelle, je me dis que des gens seraient prêts à l’acheter.

Alors Etat des lieux n’était jamais sorti, c’est pour ça que c’est joli de le voir aujourd’hui. Il n’est jamais sorti en physique alors que j’avais fait la pochette, tout planifié, mais je ne me rappelle plus pourquoi, mais on ne l’a jamais pressé. C’est pour ça que ça m’a tenu à cœur, il n’y a pas longtemps, de le sortir en vinyle et en CD.

2 – Furax Barbarossa – « Frôler l’paradis » (Black Album, 2006)

Je crois que c’est « Génération » non ?

Ça pourrait oui, parce que le mot revient tout le long du morceau, mais il a un autre titre.

Ah oui, attends je sais, je vais te trouver le nom… Il me plaisait celui-là ! C’est moi qui ai fait la prod de ce truc-là…

C’est « Frôler l’paradis ».

« Frôler l’paradis » exactement ! On m’en reparle souvent de celui-là. Tu vois, je ne me réécoute pas trop, mais c’est un des rares morceaux qui me déplairait pas de réécouter aujourd’hui. Je trouve que la rime n’était pas moche dedans. Après j’ai un peu de mal avec les morceaux à l’ancienne parce que je ne les écoute pas avec les oreilles d’il y a dix piges en fait. Je les écoute avec les oreilles d’aujourd’hui et je trouve la rime pauvre, avec un schéma d’écriture qui n’est plus le mien, et j’ai du mal à les encaisser. Mais celui-là je l’ai toujours apprécié.

A l’occasion de la sortie en physique d’Etat des lieux et du Black Album (sortis tous les deux en 2006), tu as réécouté les projets ?

Non du tout, j’ai juste enlevé des titres que je ne voulais plus entendre dedans, rapport aux affinités que je n’avais plus avec certaines personnes.

A cette époque, tu travailles déjà avec Toxine (beatmaker avec qui il crée initialement Bastard Prod, ndlr) ?

Ah oui ! Après Crash Test, tout est signé Toxine et moi. Des nuits ensemble à créer. Et puis on a tout chez lui ; le studio dans les toilettes, la cabine d’enregistrement dans ses chiottes, et on avait tiré des câbles jusqu’à sa chambre. On enregistrait tout là-bas.

Les fameuses « chiottes de l’appart à Olive ».

Exactement. (rires) Je dis ça dans quel morceau ?

« Ça parle à qui » sur l’album de Bastard Prod (2017).

Oui, voilà.

Dans « Frôler l’paradis » tu décris une succession de situations, avec une écriture très visuelle, qui apparaissent comme des scènes…

(Il coupe) Des flashs.

Tu en as fait plusieurs comme ça, je pense aux deux « Ça m’fait pas marrer », à « Etoile noire »… C’est un style de morceaux que tu affectionnes.

J’appelle ça des morceaux fleuves moi. Je prends un thème général, et dedans je découpe en plusieurs thèmes. C’est vrai que c’est un style d’écriture que j’affectionne, ça permet de partir dans tous les sens, j’aime bien.

3 – Furax Barbarossa – « Croisades » (En bas de l’échelle, 2008)

Aaah. Classique. Disons que celui-là est d’actualité parce que c’est quasiment le fil rouge de mon nouvel album.

J’allais y venir.

Je travaille avec Guilty qui kiffe trop ce morceau, et il m’avait dit que ce serait bien que ce soit le fil rouge de l’album. Donc j’ai un peu axé ce nouveau disque sur mes voyages et sur mes anecdotes de voyages.

En voyant le clip de l’intro, « 26 degrés 5 », j’ai tout de suite pensé à « Croisades ».

Tant mieux, parce que c’était inconscient en fait. A la base on voulait récupérer le sample de « Croisades » et le mettre au début, mais on n’a pas pu. Et finalement je me rends compte que la musique derrière l’intro rappelle exagérément « Croisades » et son ambiance.

Je me souviens qu’il y a quelques années, au Bikini, tu avais accepté de jouer une « vieillerie », et que c’était justement « Croisades ».

Je t’avoue que c’est un morceau que je joue à chaque concert maintenant. A chaque fois j’ai cette même phrase au début, « j’ai écrit ce morceau en 1807 », et je balance le titre. Il y a des vieux morceaux que je n’aime pas réécouter, mais celui-là c’est un bout de ma vie. Je le rapperai jusqu’à la fin.

 « Croisades » est un des premiers morceaux sur lequel tu tiens le storytelling du début à la fin.

Oui, je reste sur le même personnage. Après il est très personnel, je ne pense pas que tu puisses faire vingt morceaux comme ça dans une carrière. Mais je suis arrivé à un âge où j’arrive à me livrer plus facilement qu’avant, et dans mon nouvel album il y en a trois dans ce registre.

4 – Furax Barbarossa – « Qui m’demande ? » (2011)

Celui-là il m’en faut pas beaucoup pour le reconnaître. Celui-là… (Il réfléchit) Je me rappelle encore du moment où j’ai fait l’instru avec Diaz d’Omerta-Muzik. On avait fait l’instru chez lui dans son petit appartement. Il y avait 40 types bourrés derrière, et on a quand même réussi à faire ça. Franchement je crois que c’est mon classique. Quand les gens parlent d’un titre de Furax, c’est celui-là qui revient le plus. Je finis tous mes concerts avec « Qui m’demande ? ».

C’était le premier extrait de l’album Testa Nera que tu préparais, qui ne sortira que deux ans et demi plus tard…

C’est un peu le départ ça. Un album c’est deux ans de création minimum pour moi. Pour le nouvel album j’en ai pris un de plus parce qu’on m’a dit de pousser et de faire encore des morceaux, mais d’habitude pour moi c’est deux piges.

C’est un de tes derniers clips solo à être aussi simple visuellement. Après celui-ci tu partiras sur des choses plus recherchées, avec des costumes, des concepts, etc.

Pour celui-là on était chez Abrazif, Liltone Morris était là, et il a clippé. Aujourd’hui c’est un YouTubeur qui marche fort. Il m’a dit qu’il était chaud pour le clipper, et on est descendu dans le parking de chez Abrazif sur un coup de tête. Là on est en-dessous de son appartement, dans le noir, et on suit le néon. Classic shit. On ne s’est pas pris la tête. Mais c’est vrai qu’aujourd’hui je ne pourrais plus clipper sur un coup de tête. Je programme tout, et j’essaie de faire des trucs de qualité. Ça me plaît de faire des trucs cinématographiques. Bien que le dernier, « Uragano », ne soit pas du cinéma non plus. Mais c’est millimétré.

Oui, le concept est même plus simple que l’intro du nouvel album, « 26 degrés 5 ».

Oui, mais là je pars sur un concept de huis-clos. Tous les clips qui arrivent sont des huis-clos. Je ne sais pas si tu as remarqué, mais à la fin de l’intro, je rentre dans une porte, et j’arrive dans « Uragano ». A la fin d’« Uragano » je rentre dans une porte, et je sors dans un endroit, et je suis postiché en Léon. Donc je rentre et sors par une porte « espace – temps », façon Stargate. Je rentre dans une porte et j’arrive dans un autre endroit. Tous mes clips vont être des huis-clos.

Pour revenir à « Qui m’demande ? », quand c’est sorti, je l’ai vu comme le début de l’ère « Bastard Prod » en tant que collectif, et l’arrêt de Polychrome 7.

C’est vrai, c’est le premier morceau post-Polychrome 7, collectif qui s’arrête en 2010. Et c’est vrai que c’est le premier morceau de l’ère « Bastard Prod », il y a même le tampon dans le clip. C’est clairement le début.

5 – Scylla feat. Furax Barbarossa – « Cherche » (Thermocline, 2011)

C’est mon premier featuring avec ce petit jeune homme fragile. (sourire) C’est notre premier morceau, on s’était rencontré l’année d’avant en Belgique. J’étais venu en Belgique pour tourner un clip avec L’Hexaler, pour le morceau « Playoffs ». On est parti faire une radio à Bruxelles, et il y avait Scylla, et même Ebola (qui a réalisé de nombreux visuels pour Furax et Scylla, ndlr). Je le connaissais un petit peu avant, on m’avait envoyé le morceau « S.C.Y », une découperie. Bref, on flashe, et on décide de faire un titre ensemble. On fait même deux morceaux ce jour-là. Celui-là et un autre qui n’est jamais sorti.

Pour un premier morceau, il y a déjà une forte alchimie. Rien que le concept des personnages du pirate et de l’ogre suppose d’avoir des écritures compatibles.

Scylla n’est pas quelqu’un qui peut écrire un morceau en mode « viens on prend une feuille on écrit ». Il n’y a pas de ça. Il faut d’abord discuter d’un thème, d’une direction, de comment on va le faire. Toi dans ton seize tu parles de quoi ? Et moi dans le mien ? C’est des mathématiques de travailler avec lui. Ce morceau c’est un seize chacun, puis un ping-pong (passe-passe, ndlr). Il a commencé, j’ai écouté, puis écrit en conséquence, et après on a écrit le dernier couplet ensemble.

C’est le début d’une relation artistique qui ne va jamais s’arrêter.

Oui, il est sur tous mes projets. Et je devais être sur tous ses projets, mais il a fait le bâtard. (rires) Il est parti un peu ailleurs, mais on s’envoie des messages quasiment tous les jours. J’ai beaucoup de respect pour ce mec-là, musicalement et dans la vie de tous les jours. Là il n’est pas loin de chez nous, à Toulouse, il est en phase de création. Et ce n’est pas un secret de te dire qu’il est présent sur mon nouvel album.

L’album commun est toujours d’actualité ?

Oui, on en a encore reparlé hier. C’est terriblement d’actualité, sauf qu’il a son projet à boucler, moi je vais rentrer dans la promo du mien. Mais c’est sûr, c’est dans les tuyaux. Après comme je te disais, il s’est un peu écarté du rap, il est dans quelque chose de plus chanson française. C’est pour ça que je lui ai demandé s’il était chaud pour faire du rap pour notre album commun, et c’est le cas ! Je pense qu’on va faire ce qu’on sait faire, mais un peu plus moderne. En tout cas je n’arrêterai pas la musique tant qu’on n’aura pas fait cet album commun.

6 – Jeff Le Nerf, Swift Guad, 10Vers & Furax Barbarossa – « J’commence ma journée » (Inglourious Bastardz, 2012)

Ça c’est « J’commence ma journée », c’est moi qui ai fait la prod, avec un sample du Peuple De L’Herbe. C’est quand on était en Suisse. On est resté là-bas une semaine et demi à dix dans un studio, c’est un souvenir incroyable. Ça fusait c’était terrible.

Tu es un de ceux qui apparais le plus sur cet album collectif.

Oui, il y avait un noyau dur : Jeff, Neka, 10Vers, moi. C’est nous qui sommes restés le plus longtemps là-bas dans le studio (Rootscore, à Genève, ndlr). Après les autres se sont greffés, puis on est allé en chercher d’autres pour faire deux, trois seize comme Scylla, L’Hexaler… Sinon à la base c’est vraiment nous quatre.

J’ai choisi ce morceau, parce que tu y partages un couplet avec 10Vers, et qu’il ne pouvait pas ne pas figurer dans cette sélection. Aujourd’hui c’est lui qui t’accompagne sur scène.

Vu qu’aujourd’hui je tourne en solo, je ne voyais personne d’autre pour le faire. C’est un MC à part entière, qui fait des albums avant d’être mon backeur. Il me dépanne, et dans mon live il fait des morceaux que je backe comme lui me backe sur les miens. On est chacun le backeur de l’autre. Lui et moi on est ensemble depuis plus de quinze ans.

Il y a des morceaux entre Polychrome 7 et Clan D’Instinct qui en attestent comme « Le même pédigrée ».

« Entre chiens et loups » !

J’ai aussi mis ce morceau parce que je voulais une touche de légèreté dans la sélection.

Le thème s’y prêtait. Mais j’aurais pu faire dans la noirceur avec ce genre de thème, mais tout dépend de l’ambiance dans laquelle tu crées. Là on était en mode festif, c’était n’importe quoi, à dix dans un studio. On ne se levait pas parce qu’on ne se couchait pas. Rien qu’on écrivait, rien que ça travaillait. Il y avait toujours un mec dans la cabine en train d’enregistrer, on dormait par terre dans le studio. On aurait dû le filmer, on aurait fait un documentaire incroyable.

Il a été question d’un deuxième volet il me semble.

Oui, ça a été dans les tuyaux pendant un moment, et ça l’est encore en vérité. Jeff avait arrêté, mais il s’y remet fort là, je le vois partout sur TikTok, il est en forme. Il prépare un projet au studio Rootscore où on a enregistré Inglourious Bastardz. A tout moment Inglourious 2 peut apparaître, même si je ne pense pas qu’il y aura les mêmes personnes dedans.

7 – Furax Barbarossa – « Fin 2012 » (Testa Nera, 2014)

J’ai fait la prod aussi de celle-là. Pour l’instant, de ce que les gens ont entendu, c’est ce que je considère comme mon meilleur morceau. C’est ma pièce maîtresse. On parlait tout à l’heure de morceaux introspectifs, pour moi c’en est un. Du début à la fin je suis sur moi, et je raconte. Pour moi c’est mon meilleur titre, hors album qui va sortir bien sûr. Dans l’album qui va arriver il y a des choses qui le déclassent, mais « Fin 2012 », au niveau de la rime et de la prod, le combo est parfait.

Dans l’introspection ils sont dans la continuité de « J’oublierai pas », « Fin 2006 », ou de « Croisades ». Et « Le meilleur des hommes » qui sort après, est pour moi une sorte de « Fin 2017 ».

Exactement. C’est des morceaux très personnels, on pourrait les lier et les mettre les uns à la suite des autres. Dans l’album qui arrive, il y a encore la suite.

Le clip de « Fin 2012 » colle bien à l’ambiance.

Le clip est bien, mais aujourd’hui je travaille avec des gens qui ont une autre qualité d’image, et quand je vois la qualité de l’image du « Meilleur des hommes » par exemple, je me rends compte que ce n’est pas foufou. On a l’impression que c’est un peu tourné au caméscope. Bon, ça lui donne un style, mais aujourd’hui je suis tellement attaché à la qualité et à la belle image, que j’ai un peu du mal avec ça. Et c’est le clip le plus long de l’histoire du hip-hop, Skip avait un planning compliqué, moi aussi, et on a mis un an à tourner ce truc.

Le clip de « Fin 2012 », réalisé par Tarmack Film, est sorti lui aussi bien après la parution de l’album.

A l’époque on ne calculait pas trop tout ça. Aujourd’hui on prépare les clips avant la sortie de l’album, on a déjà réfléchi aux morceaux qu’on va clipper. C’est plus professionnel. A l’époque on était vraiment à l’arrache là-dessus. Aucune technique commerciale, rien. Au feeling.

8 – Furax Barbarossa & Jeff Le Nerf – « Virus » (Dernier Manuscrit, 2017)

« Virus », avec Jeff Le Nerf. Je place ce projet dans mon top 3, en deuxième ou troisième position, je me suis régalé à le faire. C’est un truc qu’on voulait faire depuis l’époque Inglourious déjà. Après la semaine d’enregistrement à Rootscore dont je te parlais, on est resté tous les deux au studio, et on a commencé à gratter un ou deux morceaux ensemble. De là est née l’idée de faire un projet commun. On s’y est attelé fort, mais à distance en fait. J’étais chez moi, j’enregistrais un couplet, je lui envoyais, il enregistrait son couplet.

Sur « Virus » on ne sent pas cette distance.

Tu ne la sens sur aucun des morceaux. Quand tu le réécoutes on dirait qu’on est ensemble. Avec Scylla il y a une alchimie, mais avec Jeff aussi. On parle le même rap lui et moi. Il n’y a pas de miracle, ça s’entend.

Sur un morceau comme « Virus », extrêmement technique, est-ce qu’il y a eu une forme de compétition saine entre les deux ?

(rires) Encore une fois, chez nous il n’y pas de compet’, ou peut-être qu’on ne se l’avoue pas. Quand je fais un morceau avec Jeff, je ne me dis pas « faut que je plie Jeff ». Je n’ai pas cet esprit-là parce que je ne fais pas de featuring avec des gens que je ne connais pas. Le plan de « y’a machin qui veut faire un featuring avec toi, tu devrais le faire », et tu y vas avec pour but de plier le mec, ça m’arrive très très rarement, parce que je ne fais que des featurings par affinité avec des gens que je connais depuis très longtemps. Quand je partage un morceau avec quelqu’un, mon seul but c’est de faire un bête de titre. Donc la compétition non. Et on a les mêmes schémas d’écriture, malgré des placements différents. Avec Jeff on cherche la belle rime, celle qui surprend. Je ne pense pas qu’il y ait de compétition.

Dans ta discographie, c’est ton deuxième album commun après Jour de deuil en 2010, sans compter ton projet de disque commun en préparation avec Scylla. C’est rare dans le rap français.

Se mélanger sur tout un projet c’est vrai que c’est rare. Et il y a encore un autre projet dans les tuyaux parce que j’ai envie d’en faire un avec L’Hexaler. C’est la famille, quand on fait un morceau ensemble, on se regarde et on se dit « faut qu’on fasse un album ». C’est obligé, c’est la suite logique des choses.

En 2017 il y a aussi l’album de la Bastard, qui sort quelques mois avant, pour lequel vous avez bien communiqué. En revanche, pour Dernier Manuscrit avec Jeff Le Nerf, vous ne faites pas de promo,  ni de concert.

Ce projet est mort dans l’œuf, comme la plupart de mes projets. A l’époque on sortait un album et on ne le défendait pas, il y avait zéro promo, on passait directement à autre chose. Quelle erreur. C’est des trucs qu’on apprend avec le temps, mais c’était notre façon de faire, on sortait un projet et on passait à autre chose. J’étais dégoûté, celui-là je voulais vraiment le défendre, et partir en tournée. Après la finalisation de l’album, Jeff était moins chaud. Il avait monté sa boîte donc le rap était secondaire pour lui. C’est un regret de ne pas l’avoir défendu.

Sur cet album on retrouve Kool Shen. J’imagine que c’est Jeff qui l’a ramené.

Bien sûr. Je voulais absolument faire un titre avec lui, c’était un rêve, et Jeff m’a dit « vas-y, c’est parti ». On n’a pas enregistré le titre ensemble, mais je l’ai rencontré grâce à ça. En fait il a entendu nos deux couplets, il était chaud, et il l’a lui aussi fait à distance. Ensuite il m’a invité à deux ou trois dates sur la tournée NTM. J’y suis allé et j’ai pu le rencontrer.

9 – Furax Barbarossa – « Presse mécanique » (A l’isolement, 2020)

Comment il s’appelle celui-là ? « Presse mécanique ». Ça me rappelle l’isolement fort, c’était une drôle de période. Je ne sais pas pendant combien de temps j’ai fait ça, mais toutes mes semaines étaient focalisées là-dessus, vu que je devais sortir tous les mardis. C’était une époque où je fumais beaucoup, donc pour un seize il me fallait bien trois ou quatre jours, je me prenais la tête. Aujourd’hui tu me vois fumer mais je crapote un cigare. J’ai arrêté de fumer, et j’écris un seize en une journée, même moins. Aujourd’hui je fais des morceaux en une journée, et ils sont de la même qualité qu’avant. Mon cerveau va plus vite.

En interview tu m’avais dit que tu t’arrachais les cheveux pour un couplet, que tu pouvais passer une nuit entière dessus.

C’était la bédave. Je me rends compte que le fait d’avoir arrêté de fumer m’a réveillé. J’étais endormi complet. Je pouvais passer deux heures sur une ligne, à bien tourner la phrase, pour bien chercher la réponse derrière. Aujourd’hui, tout ça c’est une gymnastique qui glisse, parce que j’ai arrêté de fumer. Donc pendant ces semaines de confinement, il me fallait trois jours pour écrire à peu près, après je me cassais la tête pour la vidéo parce que je me filmais tout seul, je me trouvais un petit concept. Donc ça me prenait vraiment toute la semaine, et c’est comme ça que je n’ai pas vu passer ce premier confinement.

Il y a des morceaux assez patate dans le projet, tu pensais à la scène pendant leur création ?

Alors pas du tout, je marche au feeling. J’avais passé une annonce en story Insta pour des prods, et j’ai été complètement inondé ! C’est là que j’ai rencontré pas mal de beatmakers comme Tha Manz par exemple, j’ai fidélisé fort avec Mehsah. Du coup j’étais inondé de prods. Moi je me base à l’instru en fait. Si l’instru est violente, je ne peux qu’être violent derrière. Si elle bouge ça va bouger, si elle est triste mon texte sera triste, et ainsi de suite. Je m’adapte quoi. Il n’y a pas de volonté de faire des albums de scène, mais en vérité, ça sur scène, c’est un carnage. Je rentre avec A l’isolement en concert maintenant en plus, je le joue d’entrée de jeu, c’est incroyable. C’est presque si je peux tendre le micro et ne rien dire. C’est de la folie comment ce truc a tourné.

On sait que la scène compte beaucoup pour toi, tu as un public très réceptif. Tu n’écris donc jamais en pensant à la scène ?

Jamais. Je n’ai jamais fait ça parce que ça pourrait me freiner dans ma création, de me dire « non ça ne va pas marcher sur scène… » C’est une gymnastique que je n’ai pas envie de faire. Je fais des morceaux, et à la fin je me dis : « ça c’est c’est un morceau de scène, ça un morceau d’album ». Mais généralement sur chacun de mes albums, à part un ou deux titres, tout est faisable sur scène.

Tu tournais beaucoup en concert avant la Covid, qui a pris tout le monde de court de ce côté-là. Est-ce que ça redémarre comme tu veux ?

Jusqu’à il y a deux mois c’était bouillant, puis c’est devenu un peu plat parce que les gens sont en attente de l’album. Les gens se disent qu’il vaut mieux attendre qu’il soit sorti pour me booker. Et puis avec l’album qui arrive je vais sûrement signer un bail avec Auguri ou Bleu Citron, qui donnera quelque chose de régulier, et de plus pro. Là ça va partir en tournée, clairement. On n’a jamais fait de tournée à proprement parler d’ailleurs, parce qu’on tournait toute l’année, en mélangeant nos projets. On ne défendait pas un projet, on voyait les concerts d’une autre manière. Maintenant on va partir sur un bail comme ça. On va sortir l’album et le défendre pendant un an ou deux.

Mehsah est aussi signé chez Jardins Noirs, on t’a beaucoup vu à ses côtés sur les réseaux sociaux. Il a un rôle sur ton nouvel album ?

Oui, fort. Il vient de passer deux mois chez moi, il est reparti il n’y a pas longtemps, et pourtant l’album est complètement fini. Entre guillemets, c’est mon nouveau Toxine. Toxine a pris un peu de retrait par rapport à la musique, même si on part toujours faire les concerts ensemble, c’est la famille. Mais j’ai trouvé en Mehsah le meilleur binôme actuel que je puisse avoir. On a fait je ne sais pas combien de prods ensemble pour l’album. Je ne pourrais pas te donner de chiffre, mais je crois qu’il est présent sur au moins cinq ou six prods de l’album.

Toxine intervient quand même sur l’album ?

Oui, il en a deux. Je ne pouvais pas le laisser comme ça, je l’ai un peu poussé au cul. (rires)

En même temps que la sortie physique d’A l’isolement, tu sors un maxi, qui s’appelle Cha O Ha. D’où sortent ces morceaux ? C’était des titres qui n’avaient pas leur place sur l’album ?

Je n’aime pas dire ça parce que ça les fait passer pour des restes. J’ai fait plein de titres, trente ou quarante. Ces titres-là ne collaient pas à la direction artistique du projet et je voulais absolument qu’ils sortent. Quand j’écris et que j’enregistre un morceau, je veux absolument qu’il sorte. Je n’ai pas un morceau qui dort. Je n’ai pas un morceau dans ma carrière qui n’est jamais sorti, parce que je les aime tous. Quand je finis un morceau je me dis qu’il faut que les gens l’entendent. Je ne vois pas la chose autrement. Donc ces morceaux, c’était une bonne manière d’écouler les deux faces du vinyle. A l’isolement c’est 17 minutes, c’est light. Donc on s’est dit pourquoi ne pas faire un cadeau à ceux qui vont se précipiter sur le vinyle parce qu’on n’en a fait que 500, leur offrir un petit maxi derrière. D’ailleurs je vais le re-presser parce qu’il y a beaucoup de gens qui ne l’ont pas eu. On a des galères pour presser des vinyles avec le manque de matières premières, mais il devrait arriver dans quelques semaines.

Dans ce projet il y a un morceau qui s’appelle « Flat line », que tu débutes en disant : « J’étais de ceux qui vivent en équipe, maintenant je suis de ceux qui disent ‘on est quitte’ ». Est-ce que c’est un peu un constat sur ta situation, vingt ans après tes débuts ?

Ce n’est pas une pique du tout envers ces gens avec qui je ne rappe plus, ça n’a rien à voir. Mais c’est plutôt pour dire qu’on commence tous en équipe, et qu’on finira tous seuls, c’est inévitable. Quand tu regardes tous les groupes aujourd’hui, à part L’Uzine, il n’y a pas un groupe qui n’a pas éclaté. C’est comme ça, c’est la suite logique, il y a un temps pour tout. Même quand tu regardes IAM, ce n’est plus IAM du début, il manque Freeman… C’est le lot de tous les groupes, c’est la musique qui veut ça.

10 – Furax Barabarossa – « Uragano » (Caravelle, 2022)

Ça c’est le dernier bébé, et bizarrement c’est un des premiers morceaux que j’ai écrit pour cet album. Donc il a deux ans dans le bec. Mais alors… Je ne pouvais pas mettre autre chose en intro de l’album. Quand j’ai entendu la prod d’Amertume, je lui ai dit : « c’est l’intro de mon album, ça c’est clair ». Bon après on a peu torpillé la prod avec Guilty, on l’a un peu modernisée. Mais ce titre-là donne la température du projet qui arrive.

On pourrait avoir l’impression que ta rencontre avec le beatmaker Guilty (Katrina Squad) est récente, mais en vérité vous vous connaissez depuis longtemps.

Oui, on avait fait « La punition » ensemble, il y a plus de dix ans. On s’est perdu de vue, lui a fait ses bails, il était sur Muret (à une vingtaine de kilomètres de Toulouse, ndlr). Puis il y a quelques années on s’est recontacté pour l’écriture des interludes de SCH pour JVLIVS, ou un petit avant ça même. Là on a discuté, et il m’a proposé de signer chez Jardins Noirs, le label qu’il venait de monter, pour deux projets. Et c’était parti. Si je devais signer dans une maison de disque, c’était avec des gens que je connaissais. Je ne serais pas allé ailleurs. Lui je le connaissais, et son associé Gaël Duveau aussi, c’était assez logique de travailler avec eux. C’est un régal parce que c’est un mec qui connait la musique comme personne. Il a une oreille incroyable, toujours le mot juste, même si on n’est pas d’accord sur tout. On est de la même génération mais il est très moderne dans ses choix d’éléments. Tout ce qu’ils font avec Katrina Squad c’est quand même super moderne. Mais il sait s’adapter, il sait qu’avec moi il ne faut pas dénaturer ma musique, mais lui amener un petit coup de pouce, un peu de modernité. Il sait le faire, j’ai appris trop de choses avec lui.

Tu as écrit les interludes de JVLIVS 1 et 2, et tu t’es retrouvé invité au Planète Rap de SCH. Tu sens que tout ça t’a amené un coup de projecteur ?

En vérité je suis un peu dégoûté de ce Planète Rap parce qu’ils m’ont appelé la veille pour venir rapper. Le jour-même, on leur a dit qu’il n’y aurait pas de freestyle, que ça ne rapperait pas. Moi j’étais déjà à Paris, j’étais à la radio, et j’ai dû ambiancer un de mes morceaux. Si tu regardes la vidéo aujourd’hui tu vas comprendre pourquoi je suis tout rouge : je suis énervé que j’en peux plus, je me demande ce que je fous là… C’est un très mauvais souvenir pour moi. Ça aurait pu être quelque chose, mais ça n’a rien apporté du tout. Avec ce genre de truc, quand tu ne fais pas de live, que tu arrives pour backer un morceau, tu n’impressionnes personne.

Pour revenir à ce qu’on disait plus tôt, l’évolution entre ton précédent album Testa Nera et Uragano serait le fil conducteur ?

Dans un album il y en a toujours un pour moi, même si je le fais inconsciemment. A la fin je me dis : « Ah tiens, le fil conducteur c’est ça en fait ». Maintenant que je travaille avec Guilty c’est un peu différent. Ce qu’il veut, avant d’avoir un album, c’est un fil conducteur. Donc on se trouve une ligne directrice et on essaie de rester dessus au maximum, même s’il y a quelques morceaux qui s’en éloignent. Mais la ligne directrice est là, et je pense qu’il faut construire un album comme ça en fait, même si je l’ai toujours fait inconsciemment. J’ai réécouté Testa Nera il n’y a pas longtemps, du début à la fin, et c’est cohérent, alors que je ne me suis pas fait la réflexion de me dire « il faut faire ça ». Je pense que c’est un mood dans lequel tu es pendant que tu écris qui fait que ça se suit. C’est inévitable.

L’intro « 26 degrés 5 » m’a rappelé ce que tu as fait pour les interludes de JVLIVS.

C’est logique, parce que j’ai fait pour JVLIVS ce que j’aurais fait pour moi. J’ai toujours fait des interludes comme ça, ou alors quand ce n’était pas moi c’était des passages de films. Par exemple, j’ai un morceau qui arrive avec la voix d’Albert Camus, pour laquelle on m’a dit de faire attention. J’ai répondu « ça, ça ne saute pas, c’est pas possible ». Je veux le garder, et on va voir comment ça se passe. Mais aujourd’hui, maintenant que je suis dans le bail et qu’on a plein de problèmes avec les droits d’auteur, je préfère que ce soit moi qui parle, parce que je sais le faire, et que ça me plaît de raconter des trucs. Ça m’a ouvert des portes puisque je l’ai fait pour d’autres personnes comme les interludes pour le rappeur guadeloupéen Titof. Je l’ai aussi fait pour Mehsah. C’est un exercice qui me plaît. Fort.

As-tu déjà été contacté pour être acteur, jouer dans des fictions ?

J’ai un ami, Chill, avec qui je fais mes clips. J’ai écrit des clips avec lui pour SCH, Ninho, Keblack, Naza… Un jour je l’ai accompagné sur un tournage pour voir comment ça se passait, sur « Putana » de Ninho. Le chef opérateur m’a dit qu’il aimait bien ma tête, je lui ai dit que j’étais rappeur, je lui ai montré ce que je faisais. Il a un peu craqué, et m’a dit qu’il me voulait pour son prochain court-métrage. Donc c’est dans les tuyaux, ça prend un peu de temps parce que le cinéma c’est toujours un peu long, mais c’est un premier pas. Sinon personne d’autre n’est rentré en contact avec moi. C’est quelque chose qui me plairait, mais si la musique est un milieu fermé, le cinéma l’est encore plus. Mais je pense qu’il ne faut attendre personne pour faire ce genre de bail. On a fait la musique tout seul, le cinéma on le fera tout seul aussi. On a YouTube aujourd’hui, et tout ce qu’il faut pour le faire. Avec un iPhone on peut faire une série de ouf. Après je n’ai pas toutes les armes pour être acteur, mais ça me plairait d’essayer.

Certains rappeurs disent que le fait d’avoir joué dans beaucoup de clips permet d’avoir déjà quelques automatismes.

C’est vrai, mais de là à jouer la tristesse et pleurer sur commande, il y a quand même un travail. Où aller chercher ça en soi, comment le faire, avec quinze personnes qui me regardent ? Pour aller chercher ce lâcher prise, tu dois prendre des cours, c’est inévitable. En ce moment je regarde Walking Dead, et j’hallucine sur leur capacité à chialer. Tous les acteurs de cette série, à un moment, ils sont en train de chialer. Je trouve ça incroyable d’arriver à être aussi crédible, et je crois que ce n’est pas donné à tout le monde. Toutes les autres émotions sont facilement jouables, mais alors la peine et la tristesse… Enfin voilà, tout ça pour te dire que je n’ai peut-être pas encore toutes les couleurs à ma palette.

Mais tu as quand même un pied dans le milieu, de par ton travail d’écriture.

Oui, c’est un truc qui me plaît. L’écriture de scénarii, les dialogues… J’ai écrit plein de trucs. Dans mon téléphone j’ai plein de court-métrages. Et j’aime beaucoup les dialogues, les punchlines. J’aime ces films à la Audiard où rien que tu écoutes, tu n’as pas besoin de regarder, et tu en prends plein la gueule. J’aime les gros dialogues, et franchement je sais le faire, je sais écrire tout ça. Donc tu n’es pas à l’abri de me voir bientôt faire des conneries sur YouTube.

Même s’il ne s’est pas rien passé, il aura fallu huit ans pour avoir un nouvel album de ta part.

Si on ne veut parler que de solo oui. Et d’ailleurs c’est inexplicable. Quand je réfléchis à ça je n’arrive pas à trouver d’explication viable. Je ne sais pas. (rires) Mais je ne suis pas resté à glander : j’ai fait des albums en duo, en groupe, des EP. En tout cas je suis sur cet album depuis deux, trois piges. Et puis le fait d’avoir signé dans un label m’a amené d’autres choses, mais m’a aussi freiné puisque que je ne suis plus tout seul à décider. En vérité, si ça ne tenait qu’à moi, l’album serait déjà sorti, et ce ne serait pas forcément une bonne chose.

Pour Testa Nera, tu avais dit que ce serait ton dernier album, je n’ai pas l’impression que tu le diras sur cet album.

Même si la flamme n’était pas éteinte, je l’ai dit sur « Fin 2012 », le dernier morceau que j’ai écrit pour Testa Nera. Je crois que je ne me suis jamais autant pris la tête sur un morceau que pour « Fin 2012 ». A la fin de ce morceau je suis complètement lessivé, je n’en peux plus, je me demande : « Je me casse la tête, mais pour quoi ? ». A l’époque il n’y avait pas plus d’engouement que ça autour de moi, et j’avais l’impression de travailler dans le vent. Je me disais « passe à autre chose, va prendre ton argent ailleurs. » J’ai eu cette réflexion-là, et je l’ai dit dans le morceau. Aujourd’hui, quand je le rappe sur scène, je croise les doigts quand je dis ça. « Mensonge ». Je ne pourrais rien faire d’autre en fait. Il y en a qui annoncent leur retraite vingt fois, moi je me suis fourvoyé une fois, et je ne le referai pas. La prochaine fois que je dirai ça je disparaîtrai pour de bon.

Ceux qui sont partis pour de bon, comme Salif ou Fabe par exemple, ne l’ont pas crié sur les toits.

Exactement. Après, si moi je faisais ça, je le verrais comme un manque de respect pour tous ceux qui m’aiment et qui attendent un nouvel album de ma part. C’est un choix personnel, chacun fait vraiment comme il veut, mais moi je ferai ça très solennellement. Quand je partirai, je ferai un joli truc je pense. Une belle voix off qui raconte des trucs, un morceau d’enculé derrière, et basta. Mais franchement on n’en est vraiment pas là parce que je suis en feu, je n’arrête pas d’écrire, je suis toujours en train de composer. Depuis que j’ai arrêté de fumer c’est deux fois pire en plus. Ce qui pourra m’arrêter, ce sera l’âge et les années.

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