10 Bons Sons US en mai 2022

Le mois du muguet 2022 a vu la 214ème fusillade de masse survenue depuis le début de l’année aux États-Unis. Oui, vous ne rêvez pas, il n’y a aucune coquille ou faute dans la phrase du dessus et c’est aberrant. Quand est-ce que les choses vont changer ? Quand est ce que ces 50 sénateurs à Washington vont bouger le petit doigt pour ne serait-ce qu’une régulation des armes ? Un contrôle plus assidu du marché des armes à feu ? Difficile d’enchaîner après ça et de « parler » musique. Mais il paraît que que celle-ci adoucit les mœurs. Alors essayons.

Kendrick Lamar – The Heart Part. 5 (prod. Beach Noise)

Comment ne pas évoquer le retour de Kendrick Lamar après 5 années de silence…. « The Heart Part.5 » fut le premier extrait du nouvel album de Kendrick Lamar, sorti ce mois-ci et intitulé Mr. Morale and the Big Steppers. Un morceau unique et puissant dont seul Kendrick a le secret. Une production aux petits oignons, très soul, très funk, appuyée par une ligne de basse groovy et un riff de guitare ultra entêtant : voilà pour la recette de l’instrumentale. Rajoutez à ça un refrain « emprunté » à Marvin Gaye (« I want you », 1976), une écriture incroyablement incisive et de multiples références bien senties (Lauryn Hill, DJ Khaled ou encore Jay-Z).
La cerise sur le gâteau c’est bien evidemment le clip qui accompagne le morceau, réalisé avec la technologie deepfake, qui permet au rappeur de Compton de se muer en O.J. Simpson, Kanye West, Jussie Smollett, Will Smith, Kobe Bryant et Nipsey Hussle… Des poignants hommages dont seul Kendrick a le secret.
Chapeau bas monsieur. – Clément

Logic – Therapy Music feat. Russ (prod. 6ix)

Le rappeur préféré de la rédaction (surtout pour Xavier et Wilhelm) revient aux affaires après une année de repos et son dernier opus de sa trilogie Bobby Tarantino. Attendu pour le mois de juin, Vinyl Days devrait être le huitième album studio du rappeur originaire du Maryland. On y retrouvera DJ Premier (le morceau est désormais disponible), Blu, Exile (disponible également) et Russ, avec le morceau qui nous intéresse ici. « Therapy Music » porte bien son nom, et les deux rappeurs livrent ici une track introspective et sans refrain, allant directement au but, comme ce fameux club de football français. – Clément

Jeshi – Killing me slowly (prod. Kelvin Krash & Jonah)

Son style avait déjà attiré l’attention depuis quelques années, mais c’est seulement ce mois-ci que Jeshi dévoile son véritable premier album. Sur « Killing me slowly », on retrouve les ingrédients qui ont fait son succès. La boucle de piano appelle au spleen, et Jeshi délivre un couplet aux accents blues : en traitant de ses propres problèmes (la mort de ses proches, les difficultés financières), il dépeint ceux de toute une catégorie sociale. Dans l’interprétation, il trouve le parfait équilibre en émotion et pudeur. On vous invite à aller écouter « Universal Credit » qui regorge de très bons morceaux du même type. – Jérémy

Danger Mouse & Black Thought – No gold teeth (prod. Danger Mouse)

Black Thought, le légendaire rappeur des Roots vient d’annoncer la sortie d’un album commun avec Danger Mouse. Difficile donc d’en ignorer le premier extrait sorti ce mois-ci. La production évolutive bascule tour à tour de courts extraits de guitare à un sample vocal avant de s’envoler sur quelques notes de clavier. La richesse de la ligne de batterie sied parfaitement au style versatile de Black Thought. Rimeur hors-pair, le rappeur de Phillie est capable de rebondir où il veut. La démonstration technique est efficace, reste à savoir où les deux bougres vont nous mener pour la suite. La sortie de « Cheat codes » est prévue pour le 5 août. – Jérémy

Rick Hyde – Arriverderci (Prod. Daringer)

Derrière la figure de proue Benny the Butcher, l’ultra productif RJ Payne et le MC-beatmaker tout aussi actif 38 Spesh, il a été difficile pour Rick Hyde, au cours des dernières années, de se faire une place comme tête émergeante du collectif Black Soprano Family. Pour autant, même si ses apparitions sont plus rares, elles demeurent généralement de grande qualité, comme il l’a prouvé sur « Survivor’s Remorse » aux côté du chef de file, ou plus récemment sur Plates II, qui était son premier long format. Avec Stima, il remet le bleu de chauffe pour un EP dans une teneur plus sombre et mafieuse, lui qui avait développé un goût pour les refrains chantés, et « Arriverderci » en est une bonne illustration, Daringer nous remettant encore un sample dont il a le secret. – Xavier

Payroll Giovanni – Tommy Bunz

On ne vous fera jamais suffisamment la promotion de Payroll Giovanni. Et cela tombe bien, puisque le boug fait plutôt partie de la frange productive de la scène outre-Atlantique. Après l’excellent long-format Giovanni’s Way (que nous avions chroniqué ici), le Detroitian revient avec Back 2 the Basics à un format plus en phase avec ce qu’il faisait jusque-là ; 12 titres, 34 minutes, de la nervosité et des beats g-funk passés au climatiseur. Pas de producteur crédité sur « Tommy Bunz », titre un peu plus lent que l’ensemble, permettant au protagoniste de prendre un ton menaçant du plus bel effet. – Xavier

Flee Lord & Mephux feat. Fat Joe – The Essence

Des nouvelles de Flee Lord ! S’il a logiquement baissé son rythme de production depuis son extraordinaire année 2020 qui l’avait vu sortir quasiment un projet par mois, le rappeur hispanique du Queens n’est toujours pas prêt de chômer, même s’il ne s’agit « que » de son premier album de l’année 2022. Il s’agit donc de la suite de ses aventures avec le beatmaker Mephux, membre comme lui du label Lord Mobb, avec le troisième volet des Pray for the Evil, accompagné d’une liste d’invités locale et transgénérationnelle. Ainsi, on retrouve par exemple ce bon vieux Fat Joe sur « The Essence », titre de circonstance au vu de la conjoncture actuelle. Sur ce court morceau, les deux MC’s font preuve d’une belle alchimie sur un beat à la véritable teinture Queens, entre la force des kicks et la boucle lancinante et angoissante trouvée par Mephux. – Xavier

Elcamino feat. Curren$y – Better Than Love (prod.)

Si l’on commence à reconnaître la recette d’Elcamino, on s’étonnera qu’il se livre autant sur sur Let There Be Light, en particulier la première moitié. Avant de plonger dans ses tourments, il nous offre le petit bijou « Better Than Love », sorte de petite bouffée d’air avant le plongeon, même si le message n’est déjà pas des plus enthousiastes. La présence de Curren$y s’impose comme la cerise sur un déjà très bon gâteau. On sent une réouverture sur la deuxième partie du disque où Camino explore des univers différents ou explore plus ses capacités vocales qu’il n’a l’habitude de le faire en solo. – Wilhelm

DJ Muggs feat. Method Man & Slick Rick – Metropolis

En amont de la sortie du troisième volet des Soul Assassins, DJ Muggs a sorti une (relativement) longue vidéo promotionnelle dont le coeur est le clip de « Metropolis ». Pour l’occasion, le légendaire producteur reçoit les non moins légendaires Slick Rick et Method Man, excusez du peu. Pour les moins patients, le morceau seul est disponible ici. Le casting devrait suffire à susciter l’intérêt des esthètes que vous êtes, nous profiterons donc des quelques lignes suivante pour signaler la sortie, ce même mois de mai, de la dernière mouture des Meth Lab, qui vaut bien qu’on y jette une oreille. – Wilhelm

Retch – Focus (prod. Yakree & Aloy)

Il y a des rappeurs dont on attend, parfois désespérément, un renouvellement. Des rappeurs chez qui on commence à voir, las, les ficelles. C’est exactement l’inverse qui se passe avec Retch : c’est grosso modo jamais très différent, mais c’est grosso modo toujours très appréciable. Dès « Focus », morceau introductif d’ « Administrative Segregation », l’auditeur habitué enfile ses pantoufles et part en terrain connu. Le premier couplet, qui reviendra comme un refrain – sans sonner comme un refrain, renforce la sensation qu’il vide un sac bien rempli à chaque passage derrière le micro. – Wilhelm

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