Les Svinkels, c’est avant tout un parcours atypique. On pourrait deviser longtemps sur ce qui caractérise leur musique, trouver des influences et des qualificatifs multiples, mais s’il y a bien une chose qui les définit encore aujourd’hui, c’est leur capacité à remplir des salles, à rassembler toujours autant de monde en concert, même dix ans après leur dernier album, Dirty Centre. Nous avons profité de leur concert toulousain (organisé par Regarts, merci à eux), pour revenir avec Gérard Baste, Nikus Pokus et DJ Pone (Xanax était occupé à finir de se préparer pour le show) sur plus de dix ans d’apparitions discographiques, au travers d’une rétrospective en dix actes.
1 – Svinkels : « Alcootest » (Police, 1997)
Gérard Baste : Police.
Nikus Pokus : C’est le premier morceau de notre discographie, la première sortie en tant que Svinkels.
DJ Pone : Produit par Guts !
N : L’instru est de Guts oui, c’était le beatmaker d’Alliance Ethnik. Il a ensuite réalisé notre premier EP.
G : Par la suite il a bossé avec Big Red, les Sages Poètes de la Rue…
P : Et puis maintenant c’est un bienheureux, il fait son projet solo qui tourne bien, avec des zikos.
G : C’est un super mec, on l’aime beaucoup. Il faut savoir que ce morceau est le premier qu’on ait sorti. Il y avait Nikus et moi dessus, et il y avait un autre morceau sur Police avec Xanax et Fred Lansac, qui était notre DJ de l’époque, sous le nom des Professionnels. On était deux binômes en fait. Pour la petite histoire, sur la première version de ce morceau on reprenait le sample d’Inspecteur Gadget. (Il chante l’air) Quelques années plus tard il a été repris par Disiz La Peste et Orelsan.
N : On a ça dans nos tiroirs, on ressortira peut-être ces inédits un jour, peut-être même cette année…
2 – Svinkels : « Cereal Killer » (Juste fais là, 1998)
N : Première version de « Cereal Killer », sur un instru de Fred Lansac.
G : La voix c’était un petit sample tiré d’un téléfilm de Stephen King qui s’appelle Les Langoliers, avec des espèces de monstres qui mangent le temps. C’est notre premier gros morceau, à Nikus et moi, et un des premiers gros morceaux de Svinkels. On l’avait maquetté dans cette version-là…
N : La toute première version c’était un instru de moi, qu’on va aussi peut-être ressortir. On a envie de faire découvrir des vieux sons jamais sortis. Quand on nous voit dans le terrain vague tout jeunots, c’est sur cette première version.
G : L’outro, c’est l’instru du morceau tel qu’il était à la base. Il durait presque 8 minutes. On est allé le faire écouter en maisons de disques à l’époque, et les gars nous regardaient en mode : « Euh, mais le morceau fait 8 minutes là… »
N : On a pire, on des morceaux de 10 minutes !
On ressent fort l’influence Wu-Tang.
G : C’était une grande influence à l’époque, mais c’était aussi dû au fait que les sampleurs avaient très peu de temps de sample à séquencer, donc tout le monde avait des samples ralentis, ou accélérés. C’était sur notre premier EP, toujours avec Fred Lansac.
N : Janvier 1998 la sortie.
G : L’EP avait été réalisé, chaperonné par Guts.
P : C’était sur le label de Faster Jay.
C’est drôle toutes ces connexions entre les Svinkels et Alliance Ethnik.
G : Et Crazy B était dans les Birdy Nam Nam avec Pone.
P : Le premier album des Birdy Nam Nam est aussi sorti sur le label Faster Jay (KIF, ndlr).
G : En fait le seul qui a rien fait c’est K-Mel ! Il avait pris les sous, ça allait pour lui !
3 – Svinkels : « Front contre front » (Tapis Rouge, 1999)
G : « Front contre front » ?
N : Le sample c’est…
P : Roberta Flack !
G : La chanteuse dans laquelle tu sautes quand il pleut. (rires) Tapis rouge, premier album, et un morceau qui nous tenait à cœur à l’époque. Il y avait un combat, il fallait toujours en parler, c’était important pour nous.
N : On voulait être impliqués, un peu sérieux.
G : C’était notre côté un peu sérieux. Aujourd’hui ça s’est vachement banalisé, alors que c’est les mêmes connards. C’est passé dans la culture populaire, et le ton s’est un peu adouci. Pour nous c’était très important, d’ailleurs on a ensuite fait un morceau sur Bons pour l’asile, « L’Internazionale » qui aborde un peu les mêmes thèmes.
C’est un morceau « conscient », mais avec la patte Svinkels.
G : On nous a déjà demandés si ce n’était pas un peu démago de faire des morceaux anti-FN, ou avec des thématiques qui s’adressent à un public qui pense déjà la même chose que nous. Mais ça fait du bien de le dire, et ça fournit de l’énergie pour ne pas oublier les choses. D’ailleurs on va jouer ce morceau ce soir, vingt ans plus tard, même si le Front National ne s’appelle plus pareil, que c’est moins d’actualité… C’est un plus petit clin d’œil.
N : Dans notre public, ça m’étonnerait pas qu’il y ait des gens qui aient voté Sarko.
G : Ou même Front National.
N : Ça a même été dit.
G : C’est comme ça, les gens sont parfois en manque de repères, c’est aussi à ça que ça sert, sans être démago, de dire « Attention, faut pas oublier. » Ce n’est pas parce que ça s’est banalisé que ça ne reste pas dangereux.
4 – Svinkels : « Raid Def Jam » (Bois mes paroles, 2000)
G : « Raid Def Jam ». J’aime bien ce concept d’interview ! Super histoire ce morceau. C’est un inédit qu’on a rajouté sur une réédition de Juste fais là.
P : Produit par Arnaud Rebotini…
N : Et Ludovic Bource.
G : Les deux ont eu un César ! L’un pour The Artist, l’autre pour 120 BPM. On essaie de travailler avec des gens qui ont des Césars et des Oscars. (rires) C’est dommage parce que Pone était sur pas mal de petites musiques de films et de pièces de théâtre, et là, ça a pris du retard, mais lui aussi aura un César un jour ! Ludovic Bource, qui a fait The Artist, nous a produit « Le Svink c’est chic », « Cereal Killer », « Happy Hour », « Dizy »… Il est derrière nos morceaux un peu pop, un peu tubesques. Par la suite il a travaillé avec Oxmo, Passi, Alain Bashung, jusqu’à devenir un grand de la musique de films et faire The Artist, Problemos, et les films de Michel Hazanavicius de manière générale. A l’époque il avait un projet avec Rebotini qui s’appelait Avalanche. Ils avaient eu l’idée de nous inviter et de faire un truc sur un riff d’électro de Black Sabbath’s. Ça nous parlait totalement parce qu’on a vraiment été élevés au rap du label Def Jam, les trucs de Rick Rubin avec des gros beats électro sur des riff de hard rock. On a fait un morceau hommage à ces années-là en parlant de nous dans les cours de récré.
N : Ça parle de notre apprentissage du hip-hop, et des cours de récré effectivement, l’époque de l’émission de Sydney.
Nous sommes en 2000, année durant laquelle Pone rejoint l’équipe. Vous pouvez nous parler de son intégration ?
P : C’était en 1999.
G : Pone ça s’est fait comme ça, avec des amis communs comme Guts en l’occurrence, qui produisait un groupe qui s’appelait Les Rieurs, dont Pone était le DJ. Il a croisé un pote à nous qui faisait nos clips, à la montagne…
P : Il m’a vu en soirée, et il m’a fait : « Tiens, je connais des mecs, tu devrais bien t’entendre avec eux ! » (rires). Guts me parlait des Svinkels, j’avais été les voir en concert au New Morning. Bref, un pote m’a dit : « Je suis un pote des Svinkels, ils cherchent un DJ. » J’ai été au concert des Beastie Boys en 1999 à l’Olympia. Nico était devant le concert, il distribuait des tracts. Je suis allé le voir, je me suis présenté.
G : C’est pas la fois où il a jeté un CD dans la gueule de MCA ?
N : C’était pas à ce concert mais à Bercy.
Il s’est passé quoi exactement ?
G : Il a tendu un CD à MCA en lui disant : « Prends le CD des Svinkels ! » MCA lui tourne le dos, et Nico le lui jette dans la gueule ! C’est à cause de Nico qu’il est mort.
P : C’est pas bien… Donc pour reprendre, Nico m’a dit de passer chez lui, ils avaient des test pressing de Tapis Rouge, Mathieu (Gérard Baste, ndlr) est arrivé…
G : Bourré ?
P : Non, tu étais frais.
G : Après on a été se faire un couscous.
P : Un couscous à Strasbourg Saint Denis qui a fermé d’ailleurs. Ensuite on a fait notre premier concert au Gambetta, un petit bar.
G : On a tourné une vidéo de répet’ où on fait ce morceau avec Pone aux platines, c’est un peu notre morceau « 3 MC & 1 DJ », avec Pone qui fait quelques pas de break dance. On est très jeunes dessus.
P : Elle est trouvable sur Youtube.
G : On en a des choses à dire sur nos morceaux, mine de rien !
5 – Svinkels feat. TTC : « Association de gens normals » (Compilation Quality Streetz 2, 2002)
G : Morceau avec TTC. Un morceau un poil renié par TTC comme par Para One. Ce n’est pas celui dont ils sont le plus fiers, pourtant quand tu tapes « TTC » sur Deezer, c’est le premier morceau qui arrive.
P : On n’a jamais eu l’instru en plus, on ne l’a jamais faite en live.
G : J’avais rencontré Globe qui faisait du tag en fait, et qui bossait à Génération. Il faisait cette série de compils qui s’appelaient Quality Streetz, sur le label CO2 Activity. Il me dit qu’il aimerait bien nous mettre dessus, pour un morceau avec TTC. Sur le volume 1 il y avait Freko et Cyanure d’ATK qui avaient fait « Association de dingos ». C’est à cette occasion que j’ai commencé à voir TTC, on a un peu sympathisé, puis on a fait le morceau.
N : Il est bien connu ce morceau, il passait sur Nova.
G : Il a bien marché, mais on n’avait pas vraiment accroché de fou avec TTC, c’était bien avant le projet Qhuit. On se connaissait un peu comme ça, on s’estimait mais sans plus. Ils étaient un peu dans leur délire et nous dans le nôtre. Puis il s’est trouvé que Jérôme de la marque de t-shirts Qhuit a décidé de faire une compilation (en 2008, ndlr) en mettant ensemble Svinkels, Triptik et TTC, et c’est plus là qu’on s’est rapproché. On est parti en Bretagne ensemble. Sur le chemin, TTC nous ont fait écouter « Dans le club ». Avant ça on avait tous des réserves sur TTC, leur délire, etc.
P : Ils mettent « Dans le club » et là on s’est tous regardés, on en revenait pas… Tu sais, quand tu entends un truc et tu sais que ce truc va s’inscrire dans l’histoire.
G : Mais tu sais, même si ça a eu moins d’impact, au même moment Triptik sortait « Bouge tes cheveux » qui était incroyable aussi. Nous on arrivait avec « Le Svink c’est chic » qui amenait aussi un truc nouveau à notre échelle. Il y a eu un alignement des planètes. On s’est retrouvés pendant 5 ou 6 jours en Bretagne à faire des sons. C’était ouf, il y avait une vraie énergie, un vrai truc qui se passait. On a fini en faisant un énorme concert dans un tout petit bar, c’était énorme. Gros souvenir, on respecte TTC.
Ils se sont reformés aussi il y a quelques mois.
G : Eux ont fait une petite reformation plus discrète.
On reparlera de Qhuit dans quelques sons….
6 – Svinkels : « Ça sert à rien » (Bons pour l’asile, 2003)
N : « Ça sert à rien »
G : Première instru de Nikus depuis le début de cette sélection, sachant que Nico fait les deux tiers de nos instrus. On a eu du Fredo, du Ludovic Bource, du Para One… Là tu as Nikus à son meilleur, avec un vrai délire.
N : Celui-ci a failli passer à la trappe. Mathieu m’avait dit : « Tu me donnes toutes tes instrus, toutes les boucles que tu as dans ton Atari. » Je lui ai donc fait une cassette avec vraiment tout ce que j’avais. Un matin il me dit : « Hier soir j’ai écouté la cassette, cet instru on peut pas passer à côté ».
G : Il pensait qu’elle n’était pas ouf alors qu’en fait… Déjà une instru qui est travaillé avec des ponts, des relances, c’est chanmé. Aujourd’hui les gens ne font quasiment plus ça. On a vachement kiffé dessus, et ça a posé les bases d’une problématique qu’on a vachement exploitée par la suite, qui était le truc de dire « ça sert à rien ». Par exemple : oui, on kiffe trop les américains, mais on sera jamais des américains. Le morceau a vachement bien marché parce que l’instru est super fat, super efficace, en plus on a peu de morceaux qui sont très hip-hop comme ça. Et puis le fait qu’on introduise ce type de problématique, ajouté à la mise en abîme de commenter un beat tout en chantant, c’est quand même assez expérimental, tout en étant fluide. Donc je pense qu’on a bien fait le taf ce jour-là.
J’ai l’impression que ce morceau dévoile un peu les goûts de chacun.
N : Je crois qu’on est tous d’accord dans le groupe pour partir dans plusieurs directions.
G : On a toujours eu ce truc de se dispatcher les rôles. Xavier c’est le grognon, et puis c’est le seul black du groupe, Nico c’est le côté plus franchouillard, politisé, et moi le côté déconne.
P : Et moi ?
G : Toi t’es le mec plus connu que nous. (rires) Ce morceau a aussi posé les bases d’un Dirty Centre. On se questionnait un peu justement sur notre place, sur où se positionner… Et on ne sait toujours pas.
7 – Triptik feat. Svinkels : « Comment ça ? » (TR-303, 2003)
G : « Comment ça ? » sur TR-303. Triptik c’est la famille, on adore. On a commencé à fréquenter Triptik via Drixxxé qui était un beatmaker que tout le monde adorait à Paris. Il y a un moment où si tu sortais un album, tu allais voir Drixxxé. Il était très très présent et super fort. Leur invitation nous a fait très plaisir, parce que c’est un des premiers groupes de hip-hop traditionnel à nous demander de collaborer. Aujourd’hui on les classe des fois dans la même catégorie que nous : rap un peu blanc, ayant fricoté avec l’électro… Mais eux à l’époque c’était les compilations Double H, Homecore, ils étaient vraiment dans le hip-hop. On était fiers qu’ils nous apprécient et bossent avec nous, plus qu’avec des TTC qui étaient vraiment expérimentaux. Là c’était plus : « Ah, on fait du rap. »
J’ai l’impression que de par votre parcours, vos débuts, vous étiez quand même relativement acceptés dans le milieu rap.
G : Oui et non. On a toujours tourné autour du pot en disant qu’on ne comprenait pas pourquoi on n’était pas réellement acceptés dans le milieu hip-hop, qui était assez sclérosé à l’époque. Et en même temps on n’avait pas le recul pour voir qu’on avait vachement de différences avec ces groupes-là. On voulait être là-dedans, mais on n’avait pas le même background, pas la même façon d’aborder les choses. Les sujets, le vocabulaire qu’on employait, la façon dont on se tournait en dérision, le second degré… C’était très peu employé à l’époque. On ne s’en rendait pas tant compte que ça parce qu’on se basait sur des groupes américains pour qui le fun était important : Redman, Beatnuts, Busta Rhymes et les Leaders Of The New School, House Of Pain, Beastie Boys… Pour nous on faisait la même chose en français, mais le public ne le percevait pas. On se basait là-dessus, mais on le faisait d’une manière qui était complètement la nôtre, et qui est quand même en marge du truc classique de rap, même pour aujourd’hui alors que c’est très ouvert. Nous on ne rentrera jamais dans le microcosme, bien qu’on ait parfois voulu.
Oui, mais vous avez certainement ouvert quelques portes.
G : Oui c’est sûr.
N : On ne se pose plus la question.
G : Aujourd’hui, quand on nous demande si on a un héritage, on ne pense pas vraiment avoir marqué le truc. Il y a peut-être des groupes qui nous ont écoutés, mais notre vrai héritage c’est d’avoir ouvert des portes à un moment où ça ne se faisait pas, celles des concerts notamment quand ça ne se faisait plus du tout. Là quand j’écoute Skyrock, il y a des places à gagner à la Skyroulette pour Niska, Fianso, Damso… Ils sont tous en concert !
8 – Qhuit : « Intro » (Gran Bang, 2004)
N : C’est le premier morceau de Qhuit.
P : Je rappe aussi dessus ! (sous le nom de Ponar, ndlr)
N : C’est une instru à moi.
G : C’est vrai, hyper bien d’ailleurs. C’est un sample du morceau de Cypress Hill et Sonic Youth sur Judgement Night. (Il chantonne) « Sugar come by and get me high »
P : Et il y avait eu ce concert impossible aussi : TTC, Triptik, Svinkels. Une demi-heure chacun.
G : A la fin on a fini tous ensemble en freestyle, et on a chanté du Démocrates D.
N : Moi je me suis endormi sur le côté de scène parce que trop défoncé.
G : Moi je suis tombé, j’ai fini à l’hôpital.
P : C’était dans un tout petit truc en Bretagne, les gens se sont pris notre concert le plus culte.
G : Le Up In Smoke Tour français devant 120 personnes ! (rires)
N : C’était un jour où il faisait plus de 30 degrés au fin fond de la Bretagne, ce qui n’est pas courant. Dans la salle il faisait 40 degrés.
Comment Qhuit a-t-il fait pour vous réunir tous ? Ça n’a pas dû être simple…
N : Ça s’est fait naturellement.
G : On était tous à Paris.
N : Quand on a fini le projet Qhuit chez Jérôme dans son appart, Black Boul’ avait quitté Triptik. En l’espace de six mois pas mal de choses avaient changé. Triptik splitait, Black Boul’ ne voulait plus participer au disque. Teki aussi avait décidé de ne plus participer mais Cuizi a quand même participé.
P : Black Boul’ est sur le projet non ?
N : Oui, mais quand on a fait la deuxième grosse session chez Jérôme pour finaliser, il ne voulait plus y être.
G : Ça s’est vraiment fait autour de la marque qui était faite par deux mecs hyper sympas avec qui on s’est super bien entendus.
N : A peu de temps près ça capotait. Pour nous c’est un peu notre black album, ou notre red album.
G : On est sur quasiment tous les titres
Vous arrivez à décliner le thème de l’alcool sur tout un album quand même.
G : Je donne toujours l’exemple des mecs qui écrivent des polars. Tu prends un écrivain comme James Ellroy, il va toujours de raconter une histoire de meurtre, ce qui n’empêche pas à ses livres d’être différents. Nous on fait de la musique, donc on peut toujours se renouveler en plus. Tu as des gens qui écrivent des romans d’amour, nous on écrit des histoires de fêtes. Il ne s’agit pas que d’alcool, même si c’est quelque chose dont il est beaucoup question étant donné que ça nous réunit. Au départ c’était tout l’aspect festif, avec tout ce que ça a de positif et de négatif. C’est notre fond de commerce, on ne va pas mentir.
9 – Le Peuple de l’Herbe feat. Svinkels : « Monde de merde » (2008)
G : Le Peuple de l’Herbe ?
Oui.
G : Alors avec le Peuple de l’Herbe c’est assez incroyable. En fait c’est les gens typiques qu’on croise en festival. Svinkels est un des premiers groupes de rap français à avoir fait beaucoup de festivals, à une époque où ça ne reflétait pas ce que tu entendais à la radio. Ça reflétait une autre culture, un peu alternative. Il y avait des groupes comme Le Peuple de l’Herbe qui cartonnaient en festival sans passer à la radio.
P : High Tone aussi, qui défonçaient tout.
On peut aussi parler des Birdy Nam Nam à cette époque aussi.
P : On était juste des groupes qui mettions des grosses raclées sur scène. On tournait mais on ne vendait pas de disques.
N : Tu fais le modeste ! (rires)
G : On a rencontré plein de groupes comme ça, qu’on n’écoutait pas à la base.
N : On a sympathisé avec Le Peuple de l’Herbe quand on a fait les Eurockéennes. On avait été programmés à 17h sur la grosse scène. Ils nous ont suivis après ça.
G : C’était Svinkels / Peuple de l’Herbe / Korn / Slipknot. Pour la faire courte, ils nous ont invités à faire un morceau, on était super contents, ils nous ont super bien reçus.
N : On a été deux jours à Lyon.
G : Et ils savent comment s’amuser en plus. On fait le morceau, on est très content de le faire, mais on n’est pas fan de ouf au départ.
N : On l’a fait très vite sans trop réfléchir, ce qui est bien parce que parfois on est lent pour boucler des morceaux.
G : Et je trouve qu’il a vachement bien vieilli finalement, il a un esprit rock qui nous correspond.
N : On a failli le mettre dans le set.
10 – Svinkels : « C’est des cons » (Dirty Centre, 2008)
G : « C’est des cons » sur une instru de Nico encore.
N : On voulait le jouer sur scène mais on trouve qu’il n’a pas forcément bien vieilli, surtout au niveau du son. On l’a fait en répet’, on voulait l’inclure dans le set parce qu’on ne l’a jamais chanté sur scène, face au public, ce qui serait assez marrant, mais on le sent pas.
G : On n’y arrive pas. C’est un morceau qu’on a fait hyper sérieusement, dans lequel on ne parle que de choses vraies. Tout est vrai dedans.
N : Ce ne sont que des anecdotes qui sont arrivées à nos fans, qu’on nous a rapportées. « Pourquoi vous ne jouez pas que ‘Le punk’ ? » « Pourquoi l’album ne sort pas en cassette ? » « Vous mixez avec un bouton. »
G : On voulait faire un vrai hommage au public et à la relation qu’on a avec, qui est un petit peu entre chien et chat, dans la mesure où souvent on ne répond pas aux messages que nous envoient les fans, mais on s’excuse. Parce qu’on les lit tous en même temps. On n’a pas toujours la vie qui fait qu’on a le temps de répondre. A côté de ça on est super fiers de faire ce qu’on fait, et tu n’es rien sans ton public. Le nôtre est hyper fidèle. Il n’y a pas de demi-mesure avec Svinkels. Soit tu connais, soit tu ne connais pas. Il y en a énormément qui ne connaissent pas, mais dans ton entourage tu as toujours un mec qui est fan de Svinkels. En général c’est le plus bourré ou le plus chiant.
Le parking du Bikini était déjà un apéro gigantesque à 19h en arrivant pour l’interview.
G : C’est exactement ça. Il y en a qui ratent le concert parce qu’ils restent sur le parking. Ils ont pris leur ticket, et à un moment ils font : « Comment ça c’est fini ? »
N : Tu en as c’est juste un moment flou le concert, parce qu’ils sont trop alcoolisés. Le lendemain ils se souviennent juste de bribes.
Dernière question : qu’est-ce qui vous a remotivé à monter à nouveau sur scène ensemble, dix ans après votre séparation ?
G : L’envie de se retrouver, de refaire les morceaux. Le temps qui fait que tout le monde se rend compte de ses erreurs. Personnellement j’avais envie de rejouer les morceaux, et de les rejouer avec les gars. C’est simple. Il y a eu deux ou trois circonstances de la vie qui font qu’on s’est retrouvés, notamment la fois où on a rejoué pour la première fois ensemble pour un concert hommage au chanteur des Parabellum. A partir de là on s’est dit qu’on allait reprendre les concerts.
Merci pour l’interview.
G : C’était sympa cette petite rétrospective ! Au passage, mon morceau préféré des Svink, c’est « Hard amat’ », c’est vraiment ce que j’aime bien faire avec ce groupe, d’ailleurs on le joue ce soir.