Il est là, enfin là, l’album solo de Kacem Wapalek. Cette sortie, c’est l’aboutissement de plusieurs années de freestyles à la webcam balancées ci et là sur Youtube, la première concrétisation sonore et physique de la carrière d’un MC atypique. Des jeux de mots, il en est question ab initio dans le choix de son blase, puis dans le titre de son premier album solo. Alors imaginez dans le contenu de ses textes…
Mais le MC virtuellement renommé tient-il la route sur un projet entier ? Réussit-il son pari de transposer sa folie et ses rimes sur CD ? Eléments de réponse après un bon mois de digestion.
Si le titre-jeu de mot n’est pas inédit (« Bernadette Soubirou et ses Apparitions », groupe de rock des années 90’s l’ayant déjà utilisé pour leur album), il en dit un peu sur la couleur du produit. De rue, de rimes, de clins d’œil divers, de musiques entrainantes, il faut s’attendre à un projet chargé comme un dernier pilon avant le coucher. Kacem est un amateur de technique, et sa plume n’a d’égal que la torture qu’il s’inflige pour l’affûter à son maximum. Un travail de titan que l’on avait pu découvrir en exclusivité lors du concert au New Morning fin avril (dont voici le report et les photos chez nos amis de Cultiz), qui ne nous avait pas seulement mis l’eau à la bouche mais bien convaincu que l’attente était justifiée. Une énergie débordante, et un humour distillé gaiement qui nous emmènent dans son univers wapalekien ; il est capable aussi bien de nous conter « Le temps [qui] passe » tel un spleen baudelairien ou de nous envoyer sur le terrain politique pour tourner en dérision les acteurs du milieu tout en appuyant là où ça fait mal : « Quand le visage pâle attaque, il n’écoute pas l’OTAN / Ça pue l’intox’ et, même si c’est politique, ça n’explique pas les tanks / Viser ? Nan, les pilotes, eux, n’ont pas le temps / C’est quoi si c’est pas les thunes ? Pourquoi ne vont-ils pas en Palestine ? /Et de quel droit la police tue ? / J’aime pas les skins et, pour l’instant / J’empile un stock de vers anti-militaires en militant »
Kacem regorge de bonnes idées, et l’une des meilleures aura été de s’associer à Guts pour penser et réaliser l’architecture sonore de l’album. Le beatmaker et ex-fondateur de feu Alliance Ethnik apporte sa touche et cette magie qui vous fait passer de prods en prods très variées, sans que la perte de cohérence s’en ressente. Car lorsque l’on se pose la question des instrumentales sélectionnées, des noms rassurants surgissent : Juliano, Greg Frite, Bonetrips, Guts, One Drop Beats, Blanka, Vin’s Da Cuero ou Patchworks… rien que ça ! Reste encore à adapter le flow si particulier du Lyonnais aux prods et aux thèmes. En ça, c’est là encore plutôt réussi.
Le groove, il le partage avec Nemir pour un morceau « Comme d’hab » très jazzy et percutant, le Perpignanais confirmant une fois de plus son aisance dans la peau de toasteur. Son goût pour les ricochets rivalise de créativité sur le bien-nommé « Vingt sur vingt », puis il nous initie à une vibe reggae sur l’universel « Ventilo » reprenant l’air de « Bambino » de Dalida, avant de nous proposer une douceur arabisante, le joyeux titre « Décalages ».
« Moi, par le temps contraint, presque escroqué
J’ai cru en c’truc et, dans un troquet, contre un verre, j’ai troqué
Mon trac, en trinquant, me sont venus ces vers étriqués
Trinquons, si t’as l’temps, j’t’raconte… »
Je vous salis ma rue, c’est un long voyage au cours duquel on passera également par un hommage bien senti à Georges Brassens. A l’écoute, réécoute et ré-ré-écoutes, on s’aperçoit que les nombreux jeux de mots laissent finalement place à un ensemble sincère, frais, et dont le rendu ne dépareille pas entre le fond et la forme. Au risque de se répéter, l’attente était longue mais le grand format valait le coup.
Le regret sera formulé par les auditeurs de la première heure, qui auront noté que très peu de couplets/refrains (aucun ?) sont inédits, car certains sont régulièrement joués en concert ou ont déjà été entendus sur la freetape de 2009. D’aucuns seront surpris de ne pas entendre de prods d’Oster Lapwass, le producteur phare de l’Animalerie.
Gageons que le succès apparent en termes de vente ne soit en rien un hasard, mais bien la récolte méritée des fruits longtemps bichonnés par Kacem 1er, qui livre ici l’un des albums rap de l’année. En espérant que des clips viendront sous peu imager cette excellente salade de fruits.
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Encore une chronique a l’honneur de wapalek, alors que son album est quand même majoritairement composés des freestyles des dernières années, mis bout a bout, et que la qualité des « originaux » n’est pas au RDV….
Enfin, c’est comme la rolex pour un UMP, si t’as pas un article sur Kacem sur ton blog de hiphop, t’as raté ta vie…
Donc il est impossible d’apprécier l’album tel qu’il est en fait ? Merci pour cet éclairage TataYoyo, je vais me mettre à le détester à partir de maintenant !
Quel aboutissement de travail… ??
Walpalek je validerai quand il fera du neuf plus de 10 piges qu’il fait carriere avec ses 15 textes a tout casser…
Kacem c’est l’escroc du rap game bac +8 avec options recyclage.