A l’heure où certains, en généralisant rapidement, déplorent l’absence de conscience politique ou sociale chez les rappeurs, on leurs conseillera d’écouter le dernier E.P. de Nodja. « Mon sal’air » est sorti le 16 Juin 2014 et on peut affirmer que c’est un E.P. sans surprise. Neuf titres percutants autoproduits, dans la continuité du premier maxi « De mes yeux » sortis en 2012 (toujours disponible en téléchargement gratuit). On y retrouve les thématiques classiques (quotidien, routine, drogue, racisme, problèmes sociaux) que Nodja aborde de manière brute et directe avec une plume d’une qualité indéniable. Petite description d’un E.P. sur et de notre époque !
La grandeur et la faiblesse du rap, c’est de décrire toujours les mêmes choses mais de manières différentes. S’il peut être question de grandeur, c’est parce qu’il y a là de la noblesse et une tâche belle et infinie, mais s’il est également question de faiblesse, c’est parce qu’on peut également considérer que le rap tourne en rond et qu’il n’arrive pas à se renouveler. Bien sûr, les puristes ne verront pas là une faiblesse, mais une forme de fidélité à l’idée d’un rap conscient et militant qui doit participer à l’éveil des consciences contre les préjugés. C’est à eux que s’adresse cet E.P. qui s’inscrit indubitablement dans cette veine.
« Gros j’ai la trique dans les ambiances ternes et enfumées où chaque fois que j’pratique un rap qui fait taire les enculés, je change l’oppression qui m’étouffe en énergie de lutte, l’inertie me butte, donc j’me bats contre les fils de pute. »
La force de Nodja, c’est la rage qu’il arrive à transmettre dans ses sons. Le rendu final est brut, sans fioritures, et on notera la complémentarité entre la musique et les textes. Rien de surprenant dès lors que les prods sont le fruit de Nodja lui-même (parfois en collaboration avec Tobby ou MSB). A ce niveau-là, il s’agit encore de prods assez classiques à l’image de ce que l’on retrouve actuellement dans l’underground français. Mais il n’y a rien de surprenant à cela puisque c’est dans l’entourage de L’uZine qu’officie Nodja. Il s’agit d’ailleurs du seul featuring de l’E.P. sur lequel pose également Skud (exception faite de DJ Persecut sur « La saleté »). On notera que la présence de L’uZine sur l’album ne se contente pas d’être « vocale » puisque le skeud est enregistré et mixé par TonyToxik, au studio de L’uZine, ainsi que masterisé par MSB. La collaboration entrevue sur l’album de L’uZine ou en live avec le crew porte ses fruits ; mais c’est surtout une certaine idée du rap qui est défendue par ces rappeurs. On y adhère ou pas, toutefois on ne peut que constater que l’alchimie est là. Nodja sait ce qu’il fait, et il le fait bien.
N’en déplaise à certains, Nodja nous montre que le rap est encore un instrument de lutte et de militantisme. Grâce à une plume acérée, des prods solides et une réalisation professionnelle, cet E.P. fait mouche et on ne peut que vous conseiller de vous le procurer par ici.
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