Casey, l’interview « 10 Bons Sons »

Casey fait partie de ces artistes difficile à cerner, obscure pour certains, géniale pour d’autres. Radicale, intransigeante, sauvage, sensible, engagée, avec une plume aiguisée, qui ne demande qu’à écorcher à vif, elle mène sa barque depuis plus de vingt ans, en étant jamais partie mais toujours de retour. Après une traque de neuf mois, nous avons enfin pu échanger avec elle, lors de sa venue à Marseille début octobre pour un concert avec Ausgang, dans un climat particulier, le public étant masqué mais surtout devant rester assis pendant le show. Avant qu’elle ne se produise sur scène, laissant apparaitre une rappeuse décomplexée faisant du rock (une rockeuse ?), nous sommes revenus sur sa carrière, débutée dans la seconde moitié des années 1990. L’occasion d’évoquer son premier morceau sur la compilation L432, l’aventure Anfalsh, les Antilles, le poids du premier album, Frantz Fanon, le rock, la musicalité, ses nombreuses collaborations, les différentes facettes de son identité, Jimi Hendrix, ainsi que le chien de son voisin.

1 – Casey – « La parole est mienne » (L432, 1997)

Je reconnais, c’est « La parole est mienne » sur la compilation L432. C’est la première fois que j’apparais sur un disque, une des premières fois que je vais en studio et que j’enregistre. C’est une période où j’apprends. Je ne sais pas ce qu’est un studio, je ne sais pas compter mes mesures, je ne sais pas ce qu’est un contrat, je n’ai jamais touché de l’argent pour de la musique, je ne sais pas ce qu’est la SACEM…

C’est une période où on te retrouve sur tout un tas de compils (L432 donc, Opération Freestyle, Première Classe), sur certains albums (Faouzi Tarkhani, La Clinique, Less du Neuf) mais tu refuses aussi certaines invitations comme celle sur l’album de NTM…

En général je dis facilement non et je refuse des trucs. Mais je refuse des trucs parce que lorsque je ne comprends pas je dis non. C’est un truc qu’on m’a appris et que j’ai retenu, quand tu ne comprends pas le délire dis non et donne-toi du temps pour comprendre.

Et tu n’avais aucune ambition durant cette période où tu apparais sur pas mal de projets ?

Jusqu’à aujourd’hui malheureusement je ne crois pas être quelqu’un d’ambitieux. Par contre, j’ai un ego comme tout le monde et apparaitre, exister, j’en ai envie. Mais mon ambition s’arrête là où mon confort commence. Si je sens que ça ne m’intéresse pas ou que quelque chose me met mal à l’aise, qu’il faut que je fasse des courbettes, que je joue les commerciales pour exister, c’est là que ça s’arrête. Etre ambitieux, c’est aussi avoir le sens du compromis, aller au-delà de son inconfort et j’ai du mal avec ça.

2 – Anfalsh – « Freestyle live » (Que d’la haine, 2001)

(Elle sourit lorsqu’elle s’entend.) Alors c’est un live mais je ne me rappelle ni quand c’était ni où c’était. C’était la période Que d’la haine et là c’est vraiment que du confort. (sourire) Tu fais ce que tu veux, comme tu veux, avec les gens que tu veux. On est entre nous dans notre délire, on ne calcule personne. C’est une phase d’apprentissage aussi. On est en totale autonomie, on est une petite machine, on enregistre parce qu’on n’a que ça à foutre de nos journées. Vu qu’on est plusieurs, il y a une émulation, on écrit beaucoup, tout le temps et on se chauffe les uns les autres. Là, chacun trouve son style dans Anfalsh, chacun a sa personnalité, chacun s’affirme dans ce qu’il est. Je me rappelle qu’on rappait toute la journée, on avait des discussions sur le rap tout le temps, on s’embrouillait sur qui est le plus fort, qui est claqué, sur le rap américain, la East Coast, la West Coast… On a vingt piges et on est en effervescence toute la journée. C’était kiffant ! On racontait que des conneries, on se vannait, on vannait des rappeurs. On fait des pochettes inspirées de films d’horreur gore. On était vraiment dans une dynamique de groupe où on s’engrainait à être les plus cons possible. Les tapes Que d’la haine c’est ça en fait, on passe en revue les 10 000 manières d’étriper les MC’s, les éviscérer, les pendre… On était dans le 72ème degré.

3 – Casey – « Chez moi » (Tragédie d’une trajectoire, 2006)

Ça c’est « Chez moi », dans le premier album, sur une instru de Laloo. Je voulais faire un morceau pour parler des Antilles. Je voulais sortir de l’image de carte postale qu’on peut en avoir et des clichés, notamment coloniaux, à savoir la Compagnie Créole, les palmiers, les gens qui ne seraient que dilettantes, qui ne penseraient qu’à boire, danser et sourire… Je voulais rendre hommage à la Caraïbe, à cette histoire, et c’était important en tant que descendant de caribéens, de descendant d’esclaves. Je voulais corriger l’image coloniale qu’on pouvait avoir en France des Antilles. Après ce qui s’est passé autour du morceau, je ne l’ai pas contrôlé.

Tu n’hésites pas aussi dans le morceau à évoquer les côtés moins reluisants des Antilles…

L’histoire des Antilles n’est pas simple, c’est une histoire faite de familles éclatées, de filles mères, de pères qui ne sont pas ancrés, qui n’arrivent pas à construire des familles, qui courent à droite à gauche… Mais ça a une racine, c’est parce que durant l’esclavage, il n’y a pas pu y avoir de famille, la cellule familiale n’a pas existé. Les sociétés antillaises sont des sociétés matriarcales, ce sont les femmes qui gèrent, ce sont les femmes qui dominent. Et même si ce sont aussi des sociétés machistes, les femmes sont fortes parce qu’avec les hommes, ils étaient à égalité dans les champs de canne. Il restait aux hommes le côté reproducteur, même si ça fait cliché de dire ça. Mais les choses ont changé, les hommes essaient d’être des pères de famille, même si c’est dur quand tu n’as pas de famille, quand à tout moment on peut te séparer, quand on peut vendre ton enfant, qu’il n’y a pas de mariage, parce que le mariage c’est un droit de cuissage. Tout ça n’aide pas à construire une cellule familiale. Ce dont je parle, c’est la résultante de toute cette histoire. Ça tu peux le voir chez les afro-américains ou les afro-caribéens, il s’agit souvent de sociétés matriarcales où les femmes élèvent seules leurs enfants ; ça vient de quelque part, c’est une histoire commune.

Tu évoques dans ce morceau une part de ton identité, comme dans Banlieue Nord d’ailleurs. Est-ce qu’à ce titre, tu t’es pris la tête pour être à la hauteur du sujet ?

Là c’est mon premier album, c’est après le EP Ennemi de l’ordre et je pense que j’ai voulu être très appliquée. Parce que c’est une époque où l’étape du premier album était importante. Aujourd’hui, tu sors un album ça ne compte plus, tu balances des morceaux comme ça. Mais avant c’était important, donc tu te prends la tête, tu essaies de conceptualiser un peu le truc, de lui donner de l’épaisseur.

J’ai donc fait deux morceaux sur mon identité un peu morcelée, sur ce qu’est être de la banlieue, ce qu’est être des Antilles, sur mon identité interne aussi, psychologique, avec le morceau Tragédie d’une trajectoire. Des fois j’étais peut-être même trop scolaire à vouloir bien bosser le truc alors que sur les Que d’la haine, j’avais plutôt tendance à plus lâcher le truc. Pour le premier album, tu as l’illusion, le fantasme de faire quelque chose, je ne dis pas parfait, mais bien (elle appuie sur ce dernier mot, ndlr). Et c’est à partir de ce disque-là que je me suis rendue compte qu’il fallait se détendre, qu’un album ce n’est qu’un disque, qu’un morceau n’est qu’un morceau, qu’il représente juste le moment où tu le fais et que tu ne peux pas tout mettre dedans, parce que peut-être que tu en feras d’autres. Peut-être que tu diras autre chose, d’une autre manière. Mais à cette époque, j’avais vraiment l’ambition de tout mettre dans cet album.

4 – Casey, Hamé, Zone Libre – « Les mains noires » (L’Angle mort, 2009)

(Dès les premières mesures) Zone Libre, « Les mains noires ». C’était avec Hamé et il avait proposé la thématique du morceau. On est donc partis sur un truc où chacun relate son histoire avec la symbolique des mains noires, qui correspondent aussi aux mains des travailleurs. Mais de suite ç’a été les mains noires des ancêtres pour un hommage. Et on a voulu faire un lien entre l’Algérie et les Antilles. On nous dit tout le temps qu’on est divisés, alors que dans les luttes anticoloniales, tous les colonisés étaient ensemble. Frantz Fanon a combattu en Algérie.

Il me semble d’ailleurs qu’il est enterré en Algérie.

Oui parce que la France ne voulait pas de lui ! Je trouve que c’est beau qu’il soit enterré là-bas ! C’est un symbole qui nous lie Maghrébins et Caribéens, alors qu’on nous dit qu’on n’a rien à voir, qu’on est dissemblables. Frantz Fanon fait le lien, on combattait ensemble. Pareil lorsque les Black Panthers débarquent en Algérie. Le rappeler, c’est une manière de récupérer notre histoire. Parce que nous les gosses d’immigrés on a une histoire en France, mais on est toujours en train de nous couper cette histoire. On a une histoire, on a nos chanteurs, par exemple Karim Kacel que je kiffe ! Ce n’est pas Renaud qui raconte notre histoire, celle des banlieusards, des rebeus, des renois, des prolos. On se bat pour essayer de récupérer notre histoire. Frantz Fanon fait partie de cette histoire commune ! A un moment, un Martiniquais et les Algériens ont combattu ensemble ! C’est beau ! Fanon fait pont entre l’Algérie et la Martinique, ça défonce ! Alors que toute la journée entre Antillais et rebeus, on traine ensemble, on se connait, on connait les fêtes des uns et des autres, l’argot de chacun, sa nourriture. On se vanne, on est ensemble, parce qu’à un moment, on a tous été colonisés et traités de la même manière. Et c’est bien de le rappeler.

A cette époque, que ce soit avec ce projet ou Les Contes du chaos, tu vas vers le rock. Que pensais-tu que ça allait t’apporter de plus que le rap ?

J’ai toujours kiffé le kero en fait. Je me suis toujours dit que le jour où j’aurai une opportunité de faire un truc fusion, j’irais sans pitié ! J’ai eu cette opportunité, on a essayé et on a appris parce qu’il a fallu travailler avec des musiciens, appréhender les choses différemment, le rock c’est une autre dynamique, ça bouge tout le temps. Surtout, la scène a été une super expérience. J’ai fait mon apprentissage scénique grâce au rock. Parce qu’il y a beaucoup de dates, qu’il fallait avoir une énergie… J’ai kiffé ! J’ai appris et j’espère que je me suis améliorée sur des trucs, notamment sur scène.

5 – Casey – « Vais-je grandir un jour ? » (Music all Black Stamp, 2009)

Ah ok ! C’est Sydney qui m’a proposé de participer à cette compil’ et c’est la première fois que j’enregistre avec des musiciens, parce que je n’avais pas encore fait Zone Libre il me semble. C’était vraiment un truc que j’ai toujours voulu faire et j’ai tellement kiffé le faire.

D’habitude tu posais sur des instrus plus rapides, plus froides, là tu es avec des musiciens pour un morceau très personnel ; est-ce que c’est la prod qui te pousse à faire un tel morceau ?

Carrément, c’est la prod, la pulse. (Elle cherche ses mots) Je pense que c’est pour tout le monde pareil, même si je n’en sais rien en fait, mais souvent c’est la prod qui pose le décor et toi tu arpentes le décor. La prod en soi c’est déjà un parcours fléché. Là j’avais une instru un peu groove avec une certaine vibe et puis c’était marrant d’essayer de poser autrement, ça m’a amené sur un autre flow.

6 – Casey – « Libérez la bête » (Libérez la bête, 2010)

Ouai, « Libérez la bête ». C’est vraiment sur ce morceau-là que je me lâche. J’ai toujours regretté de ne pas me lâcher comme sur les Que d’la haine ou les Représailles, où j’y vais au second degré, au 40ème degré. Mais dès qu’il s’agit d’un album, ça me figeait un peu, fallait faire attention parce que c’est important, c’est un entretien d’embauche le truc, faut y aller bien habillé, il y a un petit côté blédard (rires). Genre tu vas à la messe le dimanche, il faut mettre tes chaussures cirées, c’est ça un album.

Et avec Libérez la bête je me suis lâchée comme ça arrive sur les Que d’la haine et je suis partie dans un délire de chasse à l’homme. L’allégorie de la chasse à l’homme comme symbole de l’acharnement sur ce qu’on est, des enfants d’immigrés, etc. Et pour moi l’instru amène vraiment un truc martial (elle tape des pieds pour mimer le pas militaire, ndlr), avec des gens qui avancent dans une forêt… Paranoïaque comme je suis, je me dis qu’on me cherche, qu’on me chasse, qu’on me persécute et c’est vraiment cette instru-là qui m’a lancé dans ce délire.

En plus je me rappelle au-dessus de chez moi, il y avait un chien qui n’arrêtait pas de couiner, j’étais montée l’enregistrer parce qu’il pleurait et que c’est vraiment flippant les pleurs de chiens ! Ça met mal à l’aise, tu ne sais pas si c’est des pleurs d’enfant, d’animal. Et puis j’ai mis ces pleurs au début du morceau.

7 – Asocial Club – « 99% » (Toute entre est définitive, 2014)

Je ne reconnais pas de suite… Ah c’est « 99% » ! Asocial club. (Lire notre interview du collectif.) Là c’est la rencontre avec plusieurs rappeurs, en l’occurrence Prodige, Al, on se connaissait déjà, Vîrus on le rencontre par le biais de Tcho et il devait y avoir Rocé mais il était pas mal occupé. Comme pour Zone Libre, on essaie, on expérimente parce qu’on va aussi sur le terrain des autres, sur d’autres instrus, sur d’autres thématiques. Et j’aime bien les histoires collectives en fait parce que c’est un apprentissage. Tu apprends des autres, ils te ramènent une matière différente, ça te bouscule. L’Asocial Club c’était ça.

C’est marrant parce que tu peux être vue par certains comme quelqu’un d’asocial, de féroce, alors que tu passes ton temps à te mélanger en fait !

Mais grave ! Les gens pensent que je suis fermée, que je refuse les collabs, mais on ne me propose jamais rien en fait ! Certains se disent peut-être que d’emblée je refuse tout mais je ne refuse pas tant que ça. J’apprends quand je me mélange, quand je suis avec d’autres. Par contre, c’est vrai que je n’aime pas les rapports superficiels. J’ai besoin de connaitre un peu les gens pour taffer avec eux. C’est vrai que tu peux faire de la musique avec untel sans même te rencontrer. Vu que je suis un peu sauvage, j’ai besoin de savoir où je mets le pied. Non pas que je veuille être amie avec tout le monde, mais j’ai besoin (elle cherche ses mots) d’admirer l’autre. J’ai besoin d’admirer l’autre, de me dire que cette personne a telle ou telle qualité, qu’elle est intelligente… Je connais plein de gens qui sont très forts dans ce qu’ils font mais humainement ils sont médiocres. C’est con, on s’en fout, mais personnellement, ça peut me poser problème. J’ai besoin d’être impressionnée. C’est comme en amitié, tu aimes tes potes parce que d’une certaine manière tu admires ce qu’ils sont, leur liberté… Les gens avec qui je taffe, j’ai besoin qu’ils m’apportent quelque chose, qu’ils me montrent les choses d’une autre manière, sous un autre angle. Effectivement, ça fait pas mal d’écrémage au final.

Prenons la compil 93 Empire, qui avait l’ambition de regrouper pas mal de rappeurs du département, je n’ai pas été étonné de ne pas te retrouver dans la tracklist.

Chacun fait ce qu’il veut. Le 93 c’est grand, il y a plein de rappeurs. Il y a plein de disques qui sortent toute la journée, ici ou ailleurs ! Et puis on n’est pas de la même génération avec Sofiane. Les gens qui pensaient que je devais y être ont tort parce que ça voudrait dire qu’il faut forcément créer des liens qui n’existent pas.

8 – Casey – « Places gratuites » (2016)

« Places gratuites », pour le court métrage Vers la tendresse d’Alice Diop. Alice est une amie dont je kiffe le taf, elle fait des documentaires et là elle est à l’aune de faire son premier film. Elle m’a demandé de faire un morceau en me laissant très libre, elle m’avait montré des images du film. Surtout, le discours et les témoignages des personnes qui apparaissent sont magnifiques. L’instru est de Hery.

C’est une instru particulière qui te fait prendre un flow inédit. Tu laisses plus que d’habitude respirer la prod, avec des silences dans ton interprétation.

Hery absorbe d’autres choses, de la trap, de l’electro. Forcément le flow change, tu tentes des trucs en fait ! De ma génération, tu en as qui sont enracinés dans un style de rap et qui pensent que leur manière de faire est la meilleure. Tu retrouves ça dans chaque génération d’ailleurs. Moi il y a des trucs nouveaux que je kiffe et que j’ai envie d’essayer. J’aimais bien l’instru de ce morceau.

(Entrée du manager qui annonce que le temps imparti pour l’interview est écoulé.)

9 – Harry la hache feat Casey – « En bas de la page » (2019)

C’est avec Prodige pour « En bas de la page ».

Je vais te questionner direct pour gagner un peu de temps. J’ai l’impression que sur ce morceau, tu poses un peu un couplet synthèse de ta carrière : il est très personnel, presque impudique, tu affirmes ton côté mi-homme mi-femme, ni homme ni femme, ton positionnement entre rap et rock.

Ce truc de mi-homme mi-femme, ça faisait longtemps que je tournais autour, sur d’autres morceaux. Là c’est la première fois que je le dis franchement avec la formule « mi-racli mi-raclo ». Et puis sur ce morceau je chantonne aussi, de manière réellement assumée. A cette période j’étais en train d’enregistrer Ausgang dans lequel je chante aussi. Donc ça y est, j’avais un côté relâché, où je chante, où je m’en fous, façon je ne sais pas chanter. Mais j’aime vraiment ce morceau, le couplet de Prodige est mortel, je kiffe l’instru. J’ai voulu essayé d’autres trucs.

10 – Ausgang – « Chuck Berry » (Gangrène, 2020)

« Chuck Berry », avec Ausgang. C’est le dernier truc que j’ai enregistré. A l’époque de Zone Libre, j’avais souvent des rencontres avec des journalistes, des fans de rock qui venaient au concert, mais qui avaient une condescendance avec le rap genre « tu as fait du rap, là tu fais du rock, avec des guitares, tu as compris la vérité ». On m’a déjà demandé : « C’est bon c’est fini les platines, etc. », comme si j’avais enfin vu la vierge. Et à cette époque, je leur rappelais que le rock c’est noir, que lorsque je fais du rock, je suis à ma place. Mais ça c’est très français, chez les anglo-saxons, c’est moins clivé.

Tu as voulu faire une sorte de réappropriation culturelle.

Oui et puis même de remettre les choses à l’endroit ! Le guitariste le plus iconique, le plus aimé au monde, c’est Jimi Hendrix, ce n’est pas un hasard ! Tout le monde fait comme s’il n’était pas noir. Vraiment Jimi Hendrix a perdu sa couleur au passage. Mais Hendrix est noir ! C’est lui qui a pensé à tordre l’hymne national, ce n’est pas rien. Ne faites pas comme si le fait qu’il soit noir, qu’il soit né dans les années 1950 dans un pays ségrégué, ça n’a pas influé sur sa manière de jouer, sur sa manière d’être éclaté, marginal. Si t’es noir, t’as pas besoin d’être punk ! Punk, c’est une position que tu prends pour te mettre à l’écart. Le noir n’a pas besoin d’être punk, il est punk de fait. De fait il est en marge. Jimi Hendrix en étant lui-même, noir, a éclaté toutes les normes. En France, tout le monde l’adore mais personne ne te rappelle son histoire. Dans ce morceau, je voulais vraiment lui rendre hommage ainsi qu’à Chuck Berry qui a participé à la naissance du rock. Donc quand tu as l’impression qu’un rockeur c’est un blanc en boots et qu’un rappeur c’est nécessairement un noir avec une casquette à l’envers, tu te trompes. Entre ces deux extrémités, il se passe plein de choses. C’est un peu mon histoire et c’est même l’histoire de ceux qui font de la trap et qui ne savent même pas que le rock c’est leur histoire. Le rock fait partie de l’histoire de la musique noire.

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3 commentaires

  • Intéressant, dommage que le choix des morceaux semblent un peu trop évident et que l’entretien paraisse un peu court, mais le choix de l’artiste….?

  • Intéressant, dommage que le choix des morceaux semblent un peu trop évident et que l’entretien paraisse un peu court, mais le choix de l’artiste nickel !
    @+

Commentaires

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